ayant demandé si, dans le cas d'un virus finalement peu dangereux comme celui de la grippe A (H1N1)v, le fait qu'un grand nombre de personnes contractent la maladie pouvait avoir le même effet protecteur qu'une vaccination générale, M. Philippe Kourilsky a répondu négativement.
Il a rappelé que, initialement, on ne savait pas que le virus serait beaucoup moins dangereux qu'il l'était apparu au Mexique. Alors que la grippe saisonnière cause en moyenne quelque 1 000 à 3 000 morts par an en France, il y a eu 300 décès avec la grippe pandémique. Ce chiffre est inférieur à ce qui était craint mais n'est pas nul.
Pourquoi le virus avait-il été nettement moins dangereux qu'attendu ?
S'il n'y a pas de réponse certaine, une explication assez plausible se fonde sur les deux segments du système immunitaire que l'on observe en immunologie.
D'une part, le système immunitaire adaptatif fabrique des anticorps neutralisants contre les agents infectieux tels que les virus. En matière de grippe, il est généralement admis que ce sont des anticorps qui éliminent l'infection.
D'autre part, dans le second segment du système immunitaire, des cellules tueuses ou Lymphocytes T Cytotoxiques (CTL) interviennent. Cette immunité cellulaire est donc de nature à atténuer la force de l'affection.
S'il est facile de mesurer le nombre d'anticorps, analyser les réponses cellulaires est beaucoup plus difficile, d'autant plus qu'elles sont typées selon les individus par ce qu'on appelle le Human Leucocyte Antigen (HLA), sorte de carte d'identité immunitaire découverte grâce aux travaux du prix Nobel de médecine Jean Dausset, conduits il y a une quarantaine d'années.
L'immunité cellulaire est très difficile à étudier. Les travaux pour la mesurer sont beaucoup moins avancés que ceux concernant les anticorps. Toutefois, selon des articles parus en 2009 et au début de l'année 2010, en particulier dans le numéro 48 du volume 106 du 1er décembre 2009 de la revue américaine Proceedings of the National Academy of Sciences, l'immunité cellulaire que l'on a pu mesurer a posteriori a montré une réactivité croisée avec le virus H1N1. Les individus qui avaient été exposés à la grippe saisonnière montraient des niveaux non négligeables de réaction croisée avec le virus pandémique.
A la demande de M. François Autain, président, M. Philippe Kourilsky a communiqué cet article aux membres de la commission d'enquête.