Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, l’article 19 de la Déclaration universelle des droits de l’homme et l’article 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales reconnaissent le droit à l’information comme une composante essentielle des libertés d’opinion et d’expression.
Dans une démocratie, l’exercice de ce droit suppose que l’État veille à assurer le pluralisme de l’information sur tout le territoire, par tous les moyens de communication.
Quelle que soit la progression réelle des moyens électroniques de communication sur le territoire national, la presse écrite reste un support d’information essentiel, et ce particulièrement dans les zones rurales, où les habitants ne bénéficient pas tous, loin s’en faut encore aujourd’hui, du haut débit ou du très haut débit.
Le rôle primordial du transport de la presse est, d’ailleurs, reconnu dans notre nation, puisqu’il fait partie des quatre missions de service public confiées à La Poste, à côté du service universel postal, de la présence postale territoriale et de l’accessibilité bancaire.
La mission de service public du transport et de la distribution de la presse est ainsi garantie dans son principe par la loi du 21 mai 2005.
Qu’en est-il dans les faits ?
D’un coût annuel de 1, 2 milliard d’euros, la mission de transport et de distribution de la presse connaît un déficit structurel, qui s’est élevé à 414 millions d’euros en 2007 après contribution de l’État de 242 millions d’euros.
Alors que le marché du courrier va être totalement ouvert à la concurrence au 1er janvier 2011, il est nécessaire de garantir le bon exercice de cette mission de service public.
Un protocole d’accord entre l’État, la presse et La Poste a donc été signé le 23 juillet 2008 pour la période 2009-2015. Selon ses signataires, il devrait permettre de couvrir, au terme de cette période, les coûts complets du transport de la presse, les éditeurs acceptant des hausses tarifaires en moyenne de 1, 5 % à 4 % par an, La Poste s’engageant à réduire ses coûts nets attribuables au transport de la presse de 200 millions d’euros en 2015 hors inflation et l’État réduisant progressivement sa contribution annuelle de 242 millions d’euros à 180 millions d’euros entre 2009 et 2015.
Que faut-il penser de cet accord ?
L’optimisme affiché dans cet accord a de quoi laisser un peu dubitatif.
D’abord, je ferai un constat : l’État va réduire sa contribution.
Ensuite, comment ne pas s’interroger sur les conséquences de l’importante revalorisation des tarifs postaux et son incidence sur des éditeurs dont certains titres de presse connaissent de grandes difficultés ? Faut-il se satisfaire de l’affirmation selon laquelle les tarifs de presse de La Poste demeureront parmi les plus abordables en Europe ?
Enfin, que penser de l’engagement pris par La Poste de considérer la question du déficit du transport de la presse définitivement réglée dès lors que le protocole sera intégralement appliqué et de faire son affaire, le cas échéant, de tout écart résiduel entre les coûts attribuables au transport de la presse et les recettes provenant des clients éditeurs et de la contribution de l’État ?
En effet, si la question du déficit n’était pas réglée, le risque serait réel de voir La Poste, confrontée à la concurrence, réduire le champ de sa mission de transport et de distribution.
Pour éviter ce risque et contribuer à assurer l’avenir de la presse écrite, l’État doit s’engager à renforcer, si besoin est, sa contribution au transport de la presse. Nous considérons, madame la ministre, que, quoi qu’il arrive, il doit accompagner La Poste à un niveau suffisant pour garantir dans la durée l’exercice d’un droit aussi fondamental que le droit à l’information de tous les citoyens.