Avant de conclure, je voudrais me réjouir que, malgré une actualité économique et financière si pressante, le Conseil européen ait conservé à son ordre du jour un point sur l’énergie et le changement climatique.
Car rien ne serait pire que de laisser croire que tout se ramène désormais à retrouver à n’importe quel prix un meilleur niveau d’activité. Nous avons déjà oublié l’envolée du prix de l’énergie, des matières premières, des produits alimentaires et les inquiétudes face au réchauffement de la planète qui étaient au centre des préoccupations avant le déclenchement de la crise financière.
Pourtant, au-delà des fluctuations économiques, c’est bien notre conception du développement qui doit changer.
Quelle que soit la complexité de l’entreprise, il faut absolument conjuguer la lutte contre la crise et le tournant vers le développement durable. C’est seulement ainsi que nous sortirons par le haut des difficultés si graves que nous traversons.
Et nous n’y parviendrons pas si le couple franco-allemand ne joue pas pleinement son rôle, qui n’est pas exclusif, qui n’est pas suffisant, mais qui est irremplaçable. Bien sûr, nos amis britanniques peuvent être des partenaires essentiels sur certains sujets importants. Mais c’est avec l’Allemagne que nous pouvons avoir une force d’entraînement à caractère global pour faire progresser la construction européenne dans son ensemble. C’est pourquoi je me réjouis de constater que les relations franco-allemandes semblent actuellement repartir du bon pied : nous savons, monsieur le ministre, que vous faites beaucoup pour cela.
On peut toujours essayer de tirer un bien d’un mal. Cette crise nous invite à changer beaucoup de choses : à l’échelon européen, à l’échelon national et, même, à l’échelon individuel.
On me dira peut-être que j’inflige au Sénat un sermon de carême, mais cette crise montre à quel point nous nous sommes éloignés des valeurs européennes.
J’ai participé à la convention qui a élaboré la charte des droits fondamentaux, puis à celle qui a préparé le traité constitutionnel ; nous nous sommes référés aux meilleurs héritages de l’Europe, nous avons proclamé notre attachement aux principes de solidarité, de justice entre les générations, de développement durable, de dignité humaine ; mais, finalement, ce n’était peut-être que des mots… La réalité, c’est la course au profit, l’indifférence à l’avenir comme au passé, le culte de la consommation. Nous voyons aujourd’hui où cela nous a conduits.
Il faudrait en tirer les conséquences dans les politiques que nous menons, et même dans nos comportements ; il faudrait prendre au sérieux les valeurs européennes que nous proclamons. Si tel était le cas, et ce sera ma conclusion, madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, cette crise pourrait à long terme se révéler salutaire pour l’Europe.