Intervention de Olivier Jacquin

Réunion du 23 octobre 2023 à 16h00
Services express régionaux métropolitains — Adoption en procédure accélérée d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Olivier JacquinOlivier Jacquin :

Madame la présidente, je suis ravi de « reprendre du service » sous votre présidence éclairée !

Monsieur le ministre, mes chers collègues, voilà un peu moins d'un an, alors que nous étions en plein examen budgétaire, nous apprîmes, au détour d'une vidéo, que le Président de la République décidait, sur un coup de tête, de déployer dix projets de RER métropolitains.

Ce nouveau fait du prince est un épisode supplémentaire de l'incohérence complète de la politique qu'il mène en matière de transports depuis 2017, passant des mobilités du quotidien, un jour, à la relance de la grande vitesse, le lendemain, puis au contrat de performance avec SNCF Réseau qui bloque le ferroviaire...

Nous voilà revenus à la case départ, sans que les étapes précédentes soient questionnées de nouveau... Nous serons également empêchés de le faire aujourd'hui, l'article 40 de la Constitution ayant été invoqué contre mon amendement visant à réformer ce contrat de performance et à briser le carcan de SNCF Réseau.

Alors que le ministre a entamé cet été des concertations afin de bâtir une nécessaire nouvelle loi de programmation des infrastructures, et que l'ensemble des acteurs, à commencer par les collectivités, se plaignent du manque de financements, nous allons débattre de la création d'une nouvelle offre de mobilités.

Si je salue le retour de la priorité donnée aux mobilités du quotidien au travers de ce texte, je pense, monsieur le ministre – sans vouloir faire offense au président Jean-Marc Zulesi –, qu'un projet de loi aurait été plus adapté. À côté d'une étude d'impact et d'un avis du Conseil d'État, vous auriez pu y accoler plus aisément un indispensable volet « financement », et éviter que nous ne légiférions une nouvelle fois à l'aveugle. Nous n'avons en effet aucune idée, à l'heure du 49.3, de ce qu'il adviendra de nos avancées lors des débats budgétaires. Mon collègue Simon Uzenat reviendra sur la question des financements à la suite de mon intervention.

Mes chers collègues, je suis particulièrement heureux de vous retrouver aujourd'hui dans cet hémicycle pour débattre des mobilités du quotidien, dès le début de cette session. Permettez-moi, d'ores et déjà, de remercier notre rapporteur, Philippe Tabarot, et de saluer l'excellent travail qu'il a effectué dans un esprit tant d'ouverture que de compromis lors des dernières semaines, afin d'aboutir au texte le plus consensuel possible.

Si la moitié d'entre nous était en campagne ces derniers mois, nous avons tous et toutes été interpellés sur le sujet prégnant des mobilités. Le déploiement des solutions prévues dans la boîte à outils qu'est la loi d'orientation des mobilités de 2019 est en cours et encore inachevé. Nous accueillons donc très positivement cette nouvelle brique, qui servira à stimuler les autres en développant de nouveaux services dans une dizaine de métropoles, du moins en l'état actuel du texte. C'est sur ce point que je voudrais m'arrêter.

Aucun d'entre nous, qu'il ait été alors parlementaire ou non, n'a oublié la crise des gilets jaunes, pas plus que les fractures sociales et territoriales qu'elle a révélées. Le danger est grand qu'elles ressurgissent à l'aune du développement de ces RER dans les seules métropoles, si nous ne prenons pas correctement en compte leurs périphéries, voire leurs aires d'attractivité. Cela est d'autant plus vrai à l'heure des ZFE, déjà mal acceptées, et des mesures compensatoires, trop faibles et trop lentes à déployer.

Par conséquent, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain salue la décision de l'Assemblée nationale de d'étendre l'intention d'Emmanuel Macron, en passant de simples « projets de réseaux express métropolitains » à de véritables « services express régionaux métropolitains », et en sortant de fait du seul mode de transport ferroviaire.

La moitié du chemin est faite, allons au bout de la logique ! Si nous voulons être à la hauteur de nos ambitions climatiques, nous ne pouvons pas nous contenter de dix projets dans les plus grandes métropoles.

Osons le choc d'offre, comme nous y invitent SNCF Réseau depuis 2020, la Fédération nationale des associations d'usagers des transports (Fnaut), nos grandes entreprises de transport, de nombreux présidents de région et d'agglomération, ou encore le Conseil d'orientation des infrastructures.

Quittons la seule logique métropolitaine pour celle des mobilités pour tous ! Étendons cette belle idée des Serm, qui ne saurait être réservée aux seules métropoles, à des agglomérations de plus petite taille. Organisons les déplacements de demain autour d'une offre complète de services en s'appuyant sur les logiques de rabattement, depuis la voiture individuelle socialisée – covoiturage, autopartage – et le vélo, jusqu'aux modes de transport plus lourds – bus à haut niveau de service (BHNS) et train.

Accompagnons les collectivités périurbaines afin d'offrir des solutions aux habitants qui seront demain exclus des ZFE, pour qu'ils continuent d'aller travailler, étudier, et d'accéder aux services publics qui ont souvent disparu de leur environnement immédiat, à commencer par les services de santé.

Bien sûr – et nous y reviendrons longuement –, le ferroviaire doit avoir une place prépondérante dans cette organisation et demeurer, quand il existe, l'épine dorsale de l'écosystème de mobilité.

Nos débats, dont certains seront techniques, porteront sur la transformation de la Société du Grand Paris, les garanties à apporter à SNCF Réseau et à SNCF Gares & Connexions, ainsi qu'à leurs salariés, les pactes de gouvernance avec les collectivités, la planification et la labellisation, l'interopérabilité ou encore les contrats opérationnels de mobilité.

Je souhaite profiter de l'occasion qui m'est offerte ici pour vous enjoindre à poser, au travers de cette proposition de loi bienvenue mais encore incomplète, les bases d'une grande politique publique des mobilités qui ne doit oublier aucun territoire, et surtout pas la nécessaire transformation de nos déplacements face à l'urgence climatique.

Faisons confiance à nos régions et à nos intercommunalités. Donnons-leur tous les outils et tous les moyens pour développer des services complets, ambitieux et adaptés aux réalités locales. Telle était l'ambition de la LOM au travers de la création des bassins de mobilités et des transferts de compétences aux AOM. Il est plus que temps de concrétiser ce travail auquel le Sénat avait massivement contribué. Alors, allons-y !

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