Intervention de Philippe Marini

Réunion du 27 juillet 2007 à 15h00
Travail emploi et pouvoir d'achat — Article 6

Photo de Philippe MariniPhilippe Marini, rapporteur général :

La commission croit beaucoup au caractère incitatif et vertueux du dispositif « 50 000 euros ». C'est un levier puissant qui permettra aux petites et très petites entreprises d'être considérées comme des vecteurs d'investissement.

Dans notre pays, le monde de l'entreprise est trop fragmenté : ceux qui ont réussi dans les grandes entreprises ne s'intéressent pas suffisamment à la naissance, à l'accompagnement et au développement des moyennes, des petites, voire des très petites entreprises. Ces dernières peuvent en effet être plus ou moins récentes, avoir une activité plus ou moins technologique. Les priorités qualitatives peuvent donc varier.

Dans sa conception même, cette mesure porte une vision nouvelle du risque entrepreneurial. Pour vous en convaincre, mes chers collègues, je voudrais vous citer des extraits de notes que je viens de recevoir de deux associations qui semblent oeuvrer très utilement pour l'intérêt général dans ces domaines : le mouvement ETHIC - les Entreprises de taille humaine indépendantes et de croissance - et l'association Entreprise et progrès, qui incarne un patronat parfois quelque peu non conformiste.

Voici donc ce que le mouvement ETHIC écrit : « Les petites et moyennes entreprises manquent de fonds propres et sont incapables de financer leur développement. Elles ne trouvent pas de financement auprès des banques, et moins la somme demandée est importante, moins on leur prête !

« Il convient en outre de s'appuyer sur cette mesure intelligente pour insuffler aux Français le sens du partage du risque entrepreneurial. Rien de tel pour cela que l'épargne de proximité au sens concret du terme.

« Le principe d'instituer des fonds communs de placement sur mesure, nous fait retomber dans un système d'intermédiaires financiers qui s'éloigne justement du principe d'investissement personnalisé dans lequel l'investisseur s'implique. »

Entreprise et Progrès, de son côté, écrit : « Entreprise et Progrès a toujours été favorable à la possibilité pour les contribuables de déduire une partie de leur ISF en faveur d'un investissement dans les PME. ». De même, on lit plus loin : « Pour que l'investisseur privé apporte non seulement son argent mais aussi ses conseils et son réseau, il faut obligatoirement qu'il s'agisse d'un investissement ? direct ? c'est-à-dire librement choisi pour qu'existe un véritable ? affectio societatis ?.

« Cet objectif n'est pas atteint si ce dispositif étend le bénéfice de cette mesure aux parts de FCPR, de FCPI ou de FIP. On incite à nouveau les capitaux en recherche de défiscalisation à aller vers des produits financiers qui ont montré leur limite. Entreprise et Progrès, qui représente les intérêts des entrepreneurs et non ceux des intermédiaires financiers, appuie donc le Sénat en la personne de son rapporteur Philippe Marini » - merci ! - « pour que l'on garde ce lien direct indispensable entre l'investisseur privé et le responsable de la TPE-PME. »

Au regard de ces considérations que j'ai tenu à citer, car elles me paraissent tout à fait spontanées et authentiques, la commission a préparé un amendement que je me permets de présenter par avance, monsieur le président, et qui vise à encourager les cercles d'investisseurs.

Par ailleurs, notamment pour les souscriptions les plus faibles en valeur unitaire, nous avons réfléchi à l'utilisation d'un outil existant qui n'a pas eu jusqu'ici un très grand succès, mais qui, après tout, pourrait être dynamisé par ce nouveau dispositif, à savoir les fonds d'investissement de proximité - là aussi, nous pouvons remercier M. Dutreil de la loi pour l'initiative économique !

L'amendement de M. Adnot, sous-amendé par le Gouvernement, me semble tout à fait raisonnable.

Après Mme la ministre, je me permets d'insister : il est nécessaire du point de vue constitutionnel que l'avantage fiscal soit bien dimensionné, c'est-à-dire proportionné à la situation, dès lors qu'il s'agit de produits de gestion professionnelle, de risques mutualisés et non plus d'une prise directe de risques dans une entreprise déterminée.

En d'autres termes, la jurisprudence constitutionnelle sera nécessairement guidée par le principe de proportionnalité.

Tant que l'ISF existe, et nous avons vu tout à l'heure que cet impôt continuera d'exister -, toute exonération sera jugée en référence à une proportionnalité par rapport à l'intérêt général poursuivi. Ici, l'intérêt général poursuivi est précisément d'apporter des fonds à des entreprises qui n'en auraient pas, et également d'assumer un risque qui est direct et total.

Par conséquent, tout véhicule intermédiaire qui, par nature, est un véhicule de mutualisation du risque vient limiter en quelque sorte la légitimité de l'avantage accordé.

C'est pourquoi il me semble tout à fait indispensable de suivre le Gouvernement et de substituer dans l'amendement de M. Adnot le taux de 50 % au taux de 75 % en termes de calcul de l'avantage fiscal.

Pour le reste, Mme la ministre a fait un geste d'ouverture en direction de Philippe Adnot en se déclarant prête à accepter que le montant maximal de souscription dans un FIP soit porté à 10 000 euros, au lieu de 5 000 euros.

Puisque le souci de Philippe Adnot est de permettre aux petits cotisants de se grouper au sein de « véhicules de proximité », il me semble qu'on lui donne pleinement satisfaction en fixant ce plafond à 10 000 euros.

Je demande donc à notre collègue de bien vouloir accepter cette analyse et de se rallier au sous-amendement du Gouvernement. Cela nous permettrait de voter tous ensemble un dispositif qui marque un réel progrès dans le sens d'une valorisation du tissu des petites et moyennes entreprises.

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