L'article 20 présente deux éléments de réforme : d'une part, la territorialisation de la CNDA, et, d'autre part, l'organisation du jugement par une formation collégiale ou par un juge unique.
Aucun amendement de suppression visant les alinéas relatifs à la territorialisation de la CNDA n'a été déposé, monsieur le ministre. Toutefois, je dois à notre assemblée quelques explications.
Nous n'avons pas émis d'avis défavorable sur ce point, car cette proximité accrue peut avoir un intérêt. Cependant, nous attirons votre attention sur le coût éventuel de cette réforme. Vous proposez la création de cinq à six chambres territoriales, en précisant que les salles d'audience seront celles des cours administratives d'appel. Nous avons quelques doutes quant au niveau des investissements qui seront nécessaires…
Sans vouloir polémiquer, je vous rappelle, même si vous avez déjà bien en tête cet élément, que, avant de lancer votre réforme, l'État avait décidé de doter la CNDA de nouveaux locaux, qui seront inaugurés dans un peu plus de deux ans. Nous ne voudrions pas que, à la date de l'inauguration, de nombreux mètres carrés se révèlent finalement inutiles en raison de la création des chambres territoriales survenue dans l'intervalle. Nous espérons que vous saurez vous en assurer.
J'en arrive au sujet soulevé par les auteurs de ces amendements, qui visent exclusivement la composition de la chambre de jugement.
M. le ministre nous a déjà donné deux éléments de réponse.
Premièrement, la plupart des pays européens fonctionnent de cette manière.
Deuxièmement, nous avons interrogé les associations, et aucune ne s'est plainte : en effet, le taux d'approbation et de rejet par les juges uniques et par les formations collégiales est exactement le même.
Il n'y a donc pas de problème selon nous. Toutefois, si vous avez un doute, je voudrais vous donner deux arguments supplémentaires.
Tout d'abord, la CNDA se situe dans l'environnement du Conseil d'État, si j'ose dire. C'est un conseiller d'État qui la préside, et le Conseil d'État est le juge de cassation de cette cour. Or le Conseil d'État a une culture de la collégialité. Ne vous inquiétez donc pas : si un problème se pose en la matière, le Conseil d'État y remédiera.
Ensuite, chers collègues, il me semble que votre lecture du texte concerné est partielle : vous omettez notamment ce qui constitue la clé de sa rédaction et qui, sans être discourtois vis-à-vis des services de M. le ministre, est caractéristique de la section du contentieux du Conseil d'État.
En effet, selon cette rédaction, le président de la CNDA ou de la formation en juridiction peut renvoyer devant une formation collégiale « s'il estime qu'elle pose une question qui le justifie ».
La formule est extrêmement large : à tout moment, la CNDA peut renvoyer le jugement à une formation collégiale. Certes, la notion de « difficulté sérieuse » aurait semblé plus familière aux juristes, mais, dans son avis sur le projet de loi publié le 26 janvier 2023, le Conseil d'État a préféré lui substituer celle qui a été précédemment citée ; si elle est inhabituelle, cette rédaction est la seule possible et la plus pertinente.
En effet, une affaire peut apparaître « sérieuse » au mois de novembre 2023, mais présenter beaucoup moins de difficultés un an plus tard au regard de l'évolution de la situation géopolitique du pays ; à l'inverse, un pays dont la situation ne pose a priori pas de difficultés peut en révéler d'importantes quelques mois plus tard.
La rédaction que je vous ai lue signifie donc que le président de la CNDA, à tout moment, peut orienter les dossiers suivant la complexité de la situation à évaluer. Il s'agit tout simplement de tenir compte de l'évolution de la situation géopolitique. C'est une rédaction de bon goût !
J'émets donc un avis défavorable sur ces quatre amendements.