Intervention de Philippe Bonnecarrere

Réunion du 10 novembre 2023 à 9h30
Immigration et intégration — Article 21

Photo de Philippe BonnecarrerePhilippe Bonnecarrere :

Nous sommes confrontés dans cette discussion commune à deux types de propositions de sens exactement inverse : les amendements sénatoriaux visent à réduire ou à supprimer les possibilités de visio-audience ; l’amendement du Gouvernement tend à amoindrir les garanties que nous avons prévues.

Faut-il offrir la possibilité de tenir des visio-audiences dans un local de rétention administrative (LRA) ou dans un CRA ? Oui, il faut être raisonnable !

Si un étranger se trouve dans une zone d’attente à l’aéroport de Roissy, faudra-t-il mobiliser une escorte pour se rendre à Montreuil ? Si c’est à l’aéroport de Bâle-Mulhouse ou d’Orly, faudra-t-il aller à Strasbourg ou au tribunal administratif de Versailles ? Cela paraît totalement déraisonnable du point de vue de l’organisation. Je ne vois donc pas comment faire autrement que de prévoir des visio-audiences.

Ainsi, autant nous avons une approche plus réservée pour ce qui concerne les entretiens auprès de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) ou de la Cour nationale du droit d’asile (CNDA), autant, en l’espèce, l’utilisation de la visio-audience nous paraît justifiée.

Reste à définir les garanties. Dans notre pays, une audience doit être publique, sauf quand le juge décide qu’elle doit se tenir à huis clos. Il faut donc qu’il y ait aussi, au sein du CRA ou du LRA, une possibilité d’accès pour le public.

Ensuite, se pose la question de l’interprète ; nos collègues voudraient que celui-ci soit systématiquement sur place.

Encore une fois, prenons l’exemple de l’aéroport de Bâle-Mulhouse. Je ne sais pas combien s’y tiennent d’audiences chaque jour ; je ne pense pas qu’elles soient si nombreuses, mais il me paraît aberrant d’imposer la présence sur place d’un interprète compétent dans la langue requise parmi les plus de cent langues potentiellement pertinentes. C’est impossible à mettre en œuvre ! S’il n’y a pas sur place d’interprète compétent dans la langue concernée, on en trouvera un qui traduira depuis son domicile, en visioconférence, les propos échangés.

Par ailleurs, dans notre esprit, il est évident que l’avocat doit être présent.

Enfin, il nous semble normal que l’on mette le dossier à la disposition de l’intéressé.

Nous avons le sentiment que les garanties que nous proposons sont suffisantes, mais nécessaires, donc nous n’avons pas l’intention de les diminuer. Il ne me paraît pas scandaleux, pour rendre la justice, de prévoir que le local soit adapté à l’accueil du public ni de demander que l’intéressé puisse avoir accès à son dossier. Je sais que vous essaierez de revenir sur ce point à l’Assemblée nationale, monsieur le ministre, mais nous avons tâché d’être équilibrés, tant d’un point de vue pratique qu’au regard des garanties à accorder.

La commission émet donc un avis défavorable sur l’ensemble de ces amendements.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion