En effet, je pense que nous ne parlons pas du même article… Lorsque Mme Vogel est intervenue, elle a assuré qu’il fallait que les personnes maîtrisent parfaitement le français. Ce n’est pas ce qui est écrit dans l’article 1er C : « L’autorisation de séjourner en France au titre du regroupement familial est délivrée à l’étranger sous réserve qu’il justifie au préalable, auprès de l’autorité compétente, par tout moyen, d’une connaissance de la langue française lui permettant au moins de communiquer de façon élémentaire, au moyen d’énoncés très simples visant à satisfaire des besoins concrets et d’expressions familières et quotidiennes. » Il ne s’agit pas de maîtriser « parfaitement » le français !
Madame Vogel, vous demandiez comment faire avec les femmes afghanes. Les femmes afghanes – pardon de le préciser – ne relèvent pas du regroupement familial, dont nous parlons au travers de cet article, mais de la réunification familiale, en tant que réfugiées. Dans les pays qui poussent à demander l’asile et dans lesquels sont commises des persécutions, il est évident que nous ne demanderons pas que les personnes prennent des cours de français avant d’accepter leur réunification familiale. L’article a seulement trait aux gens qui relèvent du regroupement familial, selon la distinction qui n’a pas été faite précédemment par le sénateur Ravier.
Il ne faut pas caricaturer le dispositif. Comme l’a évoqué Mme la rapporteure, il a déjà existé à partir de novembre 2007. La majorité socialiste ne l’a supprimé qu’en décembre 2016, dans les six derniers mois de la présidence de M. Hollande, preuve qu’il a été possible de vivre les quatre cinquièmes de son quinquennat avec le « pré-CAI » sans que la République se soit effondrée !
Il est vrai que d’autres pays ont mis en place ce même dispositif. Puisque vous parliez d’exemples à l’étranger, il est demandé en Allemagne pour le regroupement familial que les personnes parlent de façon élémentaire l’allemand ; elles ont le droit de se présenter à trois tests avant de prétendre au regroupement. Le gouvernement allemand réunit socialistes et verts ; je n’ai pas eu l’impression qu’il avait dénaturé profondément leur politique d’intégration…
Des points peuvent être améliorés, parce que notre dispositif a une limite : il faut déterminer où se prennent les cours de français. Que prévoyait le « pré-CAI », dont sont inspirées, j’imagine, les dispositions prévues par la commission des lois ? Lorsque l’on opposait un refus à une personne parce qu’elle ne maîtrisait pas de manière élémentaire la langue, il fallait lui fournir des cours. L’Ofii le fait extrêmement bien ; le sénateur Karoutchi pourrait en témoigner.
La question se pose pour les pays où ne se trouve pas l’Ofii. Mme la députée Jacquier-Laforge a proposé l’année dernière qu’il soit possible d’assurer ces cours soit de manière numérique – comme cela a été indiqué, ce ne serait possible ni partout ni tout le temps, donc forcément imparfait – soit dans les antennes de l’Alliance française.
On peut tout à fait imaginer retravailler la mesure en renvoyant à un décret les dispositions concrètes de son application. Ce renvoi permettrait de prévoir des exceptions, du moins des corrections, là où il n’est pas possible de suivre en ligne ses études ou d’avoir accès à l’Ofii, là où l’Alliance française est absente – avouez que peu de pays sont concernés – et dans les cas qui ne relèvent pas de l’asile, donc de la réunification familiale.
En tout cas, il me semble que le texte écrit par la commission des lois est frappé au coin du bon sens. Le Gouvernement le soutient et émet un avis défavorable sur ces trois amendements de suppression.