Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je remercie au nom de mon groupe tous les collègues ayant animé ce débat.
La transition écologique et énergétique est désormais le cadre d'action des collectivités territoriales et, plus largement, notre horizon commun en matière d'intérêt général.
Les collectivités vont devoir augmenter considérablement leurs investissements si nous voulons atteindre les objectifs nationaux et européens dans le cadre de la stratégie nationale bas-carbone.
Depuis 2017, monsieur le ministre, l'État a mis beaucoup de temps pour formaliser la planification écologique nécessaire à la définition du cadre d'action publique.
Je salue le travail réalisé par le secrétariat général à la planification écologique (SGPE), mais beaucoup reste à faire et de nombreuses questions demeurent en suspens. J'en évoquerai deux, majeures : le financement des politiques publiques de transition écologique et la méthode pour garantir une action globalement efficiente.
D'ores et déjà, il est indispensable de s'assurer que les collectivités territoriales auront une capacité financière suffisante, dans la durée, pour mener à terme les projets. Ce point est absolument central.
Pour financer leur action en matière de transition écologique, les collectivités devront combiner le recours à l'emprunt à des niveaux – il faut en avoir conscience – inhabituels ; la réorientation de certains de leurs choix d'investissement vers la transition écologique ; l'augmentation de leurs ressources propres par le biais des politiques tarifaires, de prélèvements sur leurs fonds de roulement ou de ce qu'il reste de fiscalité. En outre, les soutiens financiers de l'État, hypothétiques, seront essentiels pour mobiliser la Nation.
Aucun de ces leviers n'est facile à utiliser ; ils devront être combinés.
En réalité, la situation nécessitera plus que des ajustements ponctuels. Il ne faut pas se mentir, le mur des investissements liés au climat obligera à reconsidérer la structure de l'équilibre financier issu de la décentralisation. On ne passera pas facilement de 55 milliards d'euros d'investissement aujourd'hui à 80 milliards d'euros en 2030.
À partir de ce constat, quelles sont les difficultés à traiter ?
D'abord, le rapport à l'endettement est très variable suivant le type et la taille des collectivités. La nécessité d'emprunter au-delà des niveaux habituels, parce qu'il le faudra, sera pour certaines un frein.
Ensuite, les collectivités devront faire des arbitrages entre actions liées au climat et investissements plus classiques. Ce chantier restera difficile tant qu'il n'existera pas, avec l'État, une vision partagée du sujet.
Nous considérons que le renforcement des soutiens de l'État aux collectivités est indispensable pour la réussite nationale en matière climatique. La nécessité de redresser les comptes publics n'exonère pas l'État d'aider les collectivités pour réussir la transition climatique.
L'évaluation et la revue des politiques publiques spécifiques de l'État devraient permettre de trouver des économies, en même temps que des ressources, tout en améliorant les services publics.
L'indexation de la DGF sur l'inflation – non prévue à ce jour – et la pérennisation du fonds vert à 2, 5 milliards d'euros par an ne suffiront pas à résoudre l'équation financière de l'action climatique des collectivités locales. Pour bien mesurer les conséquences, les projections indiquent que l'encours de dette des collectivités augmenterait de plus de 77 milliards d'euros en 2030 par rapport à 2022.
À système fiscal constant, l'aide de l'État sera d'autant plus décisive que la diminution structurelle des ressources des régions et départements est dès aujourd'hui forte, avec des conséquences sensibles sur les aides futures à l'investissement du bloc communal.
Notre système de fiscalité locale est-il adapté aux besoins de financement de la transition écologique ? Non. Le Gouvernement est aussi attendu sur ce point, monsieur le ministre.
Le programme de stabilité présenté à la commission européenne et le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027 devraient être en ligne avec les besoins de financement des collectivités locales. Ils ne le sont pas ! L'État connaît-il bien le niveau des investissements liés au climat qui incomberont aux collectivités locales ? Personnellement, j'en doute. L'expertise de M. Jean Pisani-Ferry pourrait être utilement mobilisée à cet égard. L'adoption d'une loi de programmation pluriannuelle des finances publiques, que nous appelons de nos vœux, clarifierait aussi ce point.
Je conclus en évoquant la méthode. La relation entre État et collectivités doit être opérationnellement adaptée à la transition écologique. Les contrats de relance et de transition écologique (CRTE), les COP et autres instances de ce type ne suffiront pas et risquent de constituer – cela a été évoqué – des facteurs de complexité accrue.
C'est d'un accompagnement opérationnel que les collectivités ont besoin : de l'ingénierie, qui demandera des ressources spécifiques non disponibles aujourd'hui, jusqu'à l'exercice de la maîtrise d'ouvrage et l'évaluation de la performance climatique des projets réalisés.
Le dialogue entre l'État et les collectivités doit être réinventé en se basant sur des revues de plans pluriannuels d'investissement (PPI) cohérents avec les possibilités locales de financement et les objectifs retenus en matière de climat.
La réussite de la transition écologique du point de vue des collectivités passera par des moyens adaptés et par une refonte du dialogue et de la gestion de projets avec l'État.