« Dans cet univers plein de bruit et de fureur, c’est le bruit des uns qui provoque la fureur des autres. » Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, difficile de trouver plus approprié que cette citation d’Antoine Blondin pour introduire l’examen du texte qui nous occupe aujourd’hui.
Pour autant, bruit et fureur sont relatifs à des lieux et à des circonstances : un bruit insupportable ici peut être jugé tout à fait acceptable là-bas. C’est cette réalité à géométrie variable qui est aujourd’hui interrogée.
Dans un souci de protection de la santé publique, le législateur a souhaité, par un décret pris le 7 août 2017, établir une règle de protection des riverains « des risques liés aux bruits et aux sons amplifiés ».
Ce texte définit des niveaux sonores à respecter par des activités impliquant la diffusion de sons amplifiés à des niveaux sonores élevés. Il détermine également des mesures de protection individuelle des risques auditifs, telles que l’information du public, la mise à disposition de protections auditives et la mise en place de dispositions permettant le repos auditif. Les seuils sont fixés en décibels dits « pondérés », des niveaux de pression acoustiques maximums, sur une durée déterminée.
Ces dispositions concernent les activités impliquant la diffusion de sons à des niveaux sonores élevés, tels les festivals.
Le décret comporte également un volet concernant les lieux hébergeant des activités susceptibles d’occasionner la diffusion de sons amplifiés à des niveaux sonores élevés, en prenant cette fois en compte un critère d’émergence de bruit, c’est-à-dire la différence entre le niveau de bruit ambiant « comportant le bruit particulier mis en cause » et le niveau de bruit résiduel constitué par l’ensemble des bruits habituels.
Curieusement, on trouve dans ce décret des dérogations pour les bruits provenant des infrastructures de transport et des véhicules qui y circulent, des installations particulières de la défense nationale, des installations nucléaires de base, des installations de transport et de distribution d’énergie, des mines, des carrières, et de certaines installations classées pour la protection de l’environnement, de même, pour une raison qui m’est inconnue, des lieux hébergeant des activités bruyantes situées à Saint-Barthélemy !
Ce cadre, qui se veut de bon sens, prévoit évidemment des dérogations, lesquelles induisent des incohérences. Ainsi, le bruit émis par un véhicule sur une infrastructure routière n’est pas plafonné – comme si l’on considérait qu’il ne représentait pas de risque pour la santé des riverains. Depuis la parution du décret Bruits de 2017, le même bruit émis par le même véhicule peut être interdit s’il est produit dans l’enceinte d’un circuit automobile, et ce pour protéger la santé de ses riverains – comme si la santé des riverains d’une autoroute comptait moins que la santé des riverains d’un circuit automobile…
Ce n’est pas anecdotique en effet, au-delà d’être incohérent, puisque ce système a de graves conséquences pour le sport automobile. Il représente une menace certaine pour les manifestations et, par conséquent, les circuits, qui se trouvent désormais dans une situation juridique fragile.
Nous sommes plusieurs sur ces travées à mesurer le rayonnement des circuits automobiles et leur effet d’entraînement sur les entreprises locales, qui se constituent souvent en pôles techniques, économiques et de formation, véritables creusets de recherche pour nos territoires.
Nous constatons également, pour le pratiquer au quotidien, qu’un fonctionnement dynamique régulier entraîne une attraction touristique et « ruisselle » sur tous les lieux d’hébergement touristique.
Je vous en parle savamment, car, étant élue de la Nièvre, département rural peu connu, combien de fois ai-je constaté que l’unique moyen de faire identifier mon territoire consistait à citer le circuit de Nevers Magny-Cours – et aussi le vin de Pouilly, je dois bien l’avouer…