Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, vendredi dernier, nous avons rejeté l’Ondam pour 2024. Pour la première fois, dans le cadre de l’examen de ce PLFSS, nous avons approché le cœur du débat : l’avenir de la sécurité sociale.
Permettez-moi de revenir sur ce point en guise de préliminaire. L’Ondam est-il un outil pilotable ? L’ensemble des travées, ou presque, ont répondu « non ».
L’Ondam a-t-il été piloté depuis la crise sanitaire ? Le Gouvernement a répondu « non ».
L’Ondam tel qu’il est présenté au Parlement est-il un outil démocratiquement satisfaisant ? Encore « non » !
Notre groupe a rejeté l’Ondam. Toutefois, contrairement à la majorité sénatoriale, il ne s’agissait pas de sanctionner une dérive de l’Ondam ou de condamner des dépenses excessives d’assurance maladie. Que d’hypocrisies lors de notre débat ! Alors que le déficit de la sécurité sociale s’aggrave au fil des années et atteint 8, 8 milliards d’euros en 2023, la majorité sénatoriale et le Gouvernement ont rejeté nos propositions de nouvelles recettes.
Notre amendement visant à créer une cotisation sur les superprofits aurait rapporté à lui seul 10 milliards d’euros de recettes pour la sécurité sociale et aurait rétabli, sans aucune autre taxe, une justice sociale nécessaire.
Ainsi, faute de perspectives avons-nous rejeté l’Ondam, en l’absence d’une trajectoire claire de financement permettant de garantir la sécurité sociale, face à une voie illusoire dans ses moyens et sans issue dans sa réalité.
Soyons précis. Quel défi fallait-il relever pour sauver notre sécurité sociale et répondre aux enjeux d’avenir ? Je vous parle là d’une réalité : urgences hospitalières engorgées, difficultés pour trouver un médecin généraliste en secteur 1, possibilité moindre de bénéficier d’une retraite avant de mourir, accès aux soins réduit lorsqu’on n’est pas français, inégalité devant l’achat d’un fauteuil roulant.
Je vous parle simplement de notre contrat social de solidarité, de fraternité et d’égalité. Je le répète, je sais que, dans cet hémicycle, y compris sur les bancs du Gouvernement, nous sommes nombreuses et nombreux à partager l’idéal de cette conquête sociale, à nous battre pour que les plus précaires aient accès aux droits fondamentaux, à souhaiter que la sécurité sociale soit garantie.
Or ce texte n’apporte aucune solution à la désertification médicale, aux problématiques d’accès aux soins, à l’épidémie de maladies chroniques, aux problématiques de la santé environnementale, à la réduction des inégalités et à l’égal accès aux droits. Il manque, pour l’hôpital public, un milliard d’euros et, pour notre pays, des milliers de professionnels de santé. En un mot, face à l’urgence écologique, sociale, et économique, il eût fallu un virage majeur pour préserver la sécurité sociale et protéger les plus précaires. Or ce texte ne l’amorce pas. Il ressemble plus à un patchwork bricolé qu’à un plan de financement.
Soyons clairvoyants ! Le Gouvernement engagera sa responsabilité devant l’Assemblée nationale pour faire adopter le texte budgétaire qu’il souhaite. Pauvre démocratie ! Je compte sur vous, monsieur le ministre, madame la ministre, pour protéger, pour le moins, les mesures utiles que nous avons intégrées à ce projet de loi et que nous pouvons partager, quels que soient nos désaccords, notamment en termes de prévention.
Je pense à l’intensification de l’information et de la sensibilisation dans les établissements scolaires pour que la campagne vaccinale contre le virus du papillome humain soit un succès, à l’amélioration de la continuité de la prise en charge des frais de santé des Françaises et des Français de l’étranger qui viennent se réinstaller en France, à la création d’une taxe sur les publicités pour les jeux d’argent et de hasard, à la suppression de la ponction dans les caisses d’assurance chômage ou encore au maintien de la contribution tarifaire d’acheminement vers la Caisse nationale des industries électriques et gazières pour le financement des pensions de retraite.
Toutefois, certains enjeux majeurs de la santé et de la protection sociale n’ont pas pu être correctement discutés la semaine dernière et ont été finalement balayés. Nous ne pouvons pas faire l’économie de la santé environnementale, de la démocratie sanitaire, de la réduction des risques, de la santé communautaire et de la lutte contre les addictions. Autant de sujets dont le texte ne s’empare pas !
Le Gouvernement ayant ouvert la consultation publique pour la stratégie de santé 2023-2033, je l’invite à venir nous la présenter. Notre commission a proposé un débat dans ce cadre, car cette stratégie manque aujourd’hui cruellement.
Vous l’aurez compris, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires considère ce texte insuffisant pour répondre aux enjeux contemporains de la santé et de la protection sociale. Malgré quelques mesures de prévention et le début d’une autre tarification hospitalière, ce projet de loi propose un statu quo.
Le financement, c’est b usiness as usual, et le navire « sécurité sociale » poursuit sa navigation sans voir l’iceberg vers lequel il fonce. Pour la santé et le social, comme pour le climat, il n’y a pas de b usiness as usual ! Il y a un naufrage annoncé, et nous voguons à bord d’un Titanic que nous croyons insubmersible, mais qui, sans prise de conscience rapide, coulera assurément. Préparons-nous ! Il y a urgence pour garantir notre sécurité sociale et environnementale. Notre groupe votera donc contre ce texte.