Intervention de Bariza Khiari

Réunion du 13 avril 2011 à 14h30
Immigration intégration et nationalité — Article 30

Photo de Bariza KhiariBariza Khiari :

L'article 30 prévoit de faire passer le délai d’intervention du juge des libertés et de la détention de quarante-huit heures à quatre jours.

Cet allongement s’appuie sur deux arguments principaux.

Le premier argument est clairement affirmé à la page 249 du rapport établi par la commission des lois de l’Assemblée nationale en vue de l’examen en première lecture de ce texte : le juge des libertés et de la détention est un empêcheur d’expulser en rond, parce qu’il a le malheur de vouloir faire respecter l’État de droit.

Mes chers collègues, croyez-vous sincèrement que le Conseil constitutionnel sera sensible à une proposition qui affiche clairement sa volonté de contourner l’État de droit, au nom de l’efficacité de la politique migratoire ? Le Conseil constitutionnel doit-il estimer, comme vous, que l’étranger n’est pas un homme comme les autres et qu’il a, de ce fait, moins de droits ?

Selon les estimations de la CIMADE, avec cette mesure, ce ne sont pas moins de 4 000 étrangers qui pourraient être expulsés sans le moindre accès au juge des libertés et de la détention.

La majorité estime par ailleurs que les procédures actuelles sont trop enchevêtrées et que cela nuit à la bonne administration de la justice, objectif de valeur constitutionnelle.

D’une part, il n’est pas certain que porter atteinte aux droits de l’homme puisse servir de caution au respect d’un objectif de valeur constitutionnelle. D’autre part, je cherche en quoi le recours au juge des libertés et de la détention, dans un délai de quarante-huit heures, a rendu la bonne administration de la justice impossible...

Ce n’est donc pas la justice qui fonctionne mal : c’est bien plutôt votre politique migratoire qui est entravée.

Par ailleurs, je ne crois pas que réaliser 25 000 expulsions par an soit un objectif de valeur constitutionnelle !

L’existence de deux procédures conjointes mais distinctes – administrative, d’un côté, judiciaire, de l’autre – découle d’un principe fondamental reconnu par les lois de la République. Chacune des juridictions statue sur la matière qui lui échoit : le juge judiciaire se prononce sur la liberté individuelle quand le juge administratif examine la légalité de l’arrêté qui lui est soumis. La bonne administration de la justice suppose le respect de cette séparation et une absence de confusion des procédures.

Le juge des libertés et de la détention et le juge administratif travaillent indépendamment l’un de l’autre ; cela doit perdurer. La justice ne s’en portera que mieux !

En toute circonstance, le juge des libertés et de la détention doit intervenir le plus rapidement possible. C’est le sens des amendements que nous vous présenterons.

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