Intervention de Claude Guéant

Réunion du 13 avril 2011 à 14h30
Immigration intégration et nationalité — Article 30, amendement 208

Claude Guéant, ministre :

Je tiens de nouveau à saluer le travail de réflexion mené par la commission des lois. Les positions du Gouvernement et celles de la commission sont maintenant très proches, aussi bien sur l’articulation à mettre en œuvre pour l’exercice des compétences respectives du juge administratif et du juge judiciaire que sur la question du délai.

Avec l'amendement n° 208, nous souhaitons porter le délai d’intervention du JLD de quatre à cinq jours, car nous estimons qu’il s’agirait d’une réforme extrêmement utile. Loin d’être contraire à nos principes constitutionnels, elle permettrait, au contraire, de mieux les respecter.

Ainsi, elle garantirait une « bonne administration de la justice », qui est un objectif de valeur constitutionnelle découlant des articles 14 et 15 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, et le respect de la compétence de la juridiction administrative, reconnue comme un principe de valeur constitutionnelle.

Certains se demandent – M. le rapporteur s’en est fait l’écho – si le report à cinq jours est bien compatible avec le principe selon lequel l’autorité judiciaire est gardienne de la liberté individuelle.

J’ai trois réponses à apporter à cette interrogation.

Première réponse : comme M. le rapporteur l’a décrit tout à l’heure de façon scrupuleuse, le Conseil constitutionnel n’a jamais estimé qu’un délai de cinq jours ne serait pas acceptable. Dans une décision de 1997, il a validé le délai actuel de quarante-huit heures ; dans une décision de 1980, il a censuré un délai de sept jours ; s’agissant des zones d’attente, il n’a pas jugé inconstitutionnel un délai de quatre jours. Pour autant, le Conseil n’a pas fixé de bornes plus précises.

J’ajoute qu’il a admis, dans une décision de novembre dernier, un délai de quinze jours pour les hospitalisations sans consentement. Bien que la matière soit différente, le raisonnement pourrait être transposé à la rétention, d’autant que nous ne proposons pas un délai de quinze jours, mais simplement un délai de cinq jours.

Deuxième réponse : lorsque le Conseil d’État a examiné le présent projet de loi, il a validé le report à cinq jours de l’intervention du JLD. Certes, le Conseil d’État n’est pas le Conseil constitutionnel. Mais le vice-président du Conseil d’État a émis un second avis favorable à ce délai devant le Conseil supérieur des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel, le CSTACAA, notamment pour des raisons pratiques sur lesquelles je reviendrai.

J’ajoute que le délai de quatre jours semble comporter un certain nombre de risques au regard de l’objet principal de la réforme. En effet, si le juge administratif ne peut pas se prononcer dans ce délai, nous risquons d’être de nouveau confrontés à cet enchevêtrement des compétences que nous voulons tous éviter, tout au moins les partisans de la réforme.

Troisième réponse : en pratique, comme il sera le premier juge saisi et comme des motifs de saisine supplémentaires sont institués dans ce projet de loi, le juge administratif risque d’être saisi d’un plus grand nombre de recours qu’auparavant. Il nous semble opportun qu’il puisse disposer d’un délai de trois jours pour se prononcer. C’est du reste cette considération qui a amené le CSTACAA à se prononcer en faveur du délai de cinq jours.

Étant donné qu’il est exclu d’amputer de vingt-quatre heures le délai dont dispose l’étranger placé en rétention pour former un recours, et comme nous ne voulons pas non plus réduire le temps imparti au juge pour statuer, nous souhaitons que le délai de cinq jours soit conservé.

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