Intervention de Guislain CAMBIER

Réunion du 1er décembre 2023 à 19h00
Loi de finances pour 2024 — Cohésion des territoires

Photo de Guislain CAMBIERGuislain CAMBIER :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, au-delà du seul exercice comptable et budgétaire, la mission dont nous discutons aujourd'hui – c'est également valable plus largement pour le projet de loi de finances – doit nous amener à réfléchir au modèle de société que nous souhaitons défendre pour les générations futures.

Logement, hébergement, insertion des personnes vulnérables, aménagement des territoires, rénovation énergétique : cette mission est au carrefour d'enjeux fondamentaux pour le quotidien des Français.

Comme notre collègue Jean-Baptiste Blanc l'a rappelé, la politique du logement fait pourtant face à une crise d'une ampleur inédite : baisse de 28 % du nombre des permis de construire, baisse de 40 % du nombre des crédits immobiliers accordés, baisse enfin de 30 % du volume des transactions immobilières. La bombe sociale est bien là, et tous les signaux sont d'un rouge écarlate.

Le chantier est vaste, et les premières pierres tardent à être posées. Depuis quelques mois, monsieur le ministre, votre gouvernement met en exergue l'augmentation des taux d'intérêt pour expliquer la crise du logement. Sachez toutefois que nous ne sommes pas dupes.

Si nous pouvons naturellement souscrire à cet argument conjoncturel, il ne peut justifier la situation structurelle que nous connaissons ni l'absence, depuis six ans, d'une véritable politique du logement dans notre pays.

Une fois l'inflation prise en compte, l'augmentation des crédits n'est pas au niveau. L'ensemble des observateurs s'accordent à dire que 5 millions de logements doivent être construits dans les dix ans à venir. Les crédits proposés ne permettront pas d'honorer la feuille de route du Gouvernement pour le logement annoncée par la Première ministre le 16 novembre dernier à Dunkerque.

En définitive, les moyens ne sont pas au rendez-vous, monsieur le ministre.

Je souhaite insister sur trois points qui me paraissent prioritaires si nous voulons agir très rapidement.

Il nous faut tout d'abord lutter contre le phénomène de raréfaction du foncier. Le raz-de-marée emporté par le zéro artificialisation nette (ZAN) va renverser l'équilibre précaire du marché. Les terrains sont déjà rares et la spéculation désormais quotidienne.

Nous devons nous appuyer sur de nouveaux outils juridiques dans les documents d'urbanisme, afin de sanctuariser du foncier pour nos communes et, partant, de préserver la possibilité qu'elles accueillent de nouveaux habitants et réalisent des opérations de mixité sociale. Figer les équilibres démographiques à tout de la mauvaise idée.

Pour ne pas faire du ZAN un dispositif punitif pour nos collectivités, il est donc primordial de rénover la fiscalité foncière et de soutenir financièrement les communes dans leurs dépenses d'ingénierie.

La rénovation énergétique doit ensuite être globale et totale. Sur 37 millions de logements dans notre pays, 6, 5 millions sont encore des passoires thermiques. Nous devons faire plus et surtout mieux.

Si nous saluons, avec mon groupe, la refonte de MaPrimeRénov' au titre de l'efficacité et de la montée en puissance des moyens qui lui sont attribués, nous ne devons pas négliger les propriétaires qui souhaitent seulement faire des « monogestes » de rénovation ni ceux qui seront piégés par l'interdiction à venir des passoires thermiques. La rénovation énergétique se fera avec tout le monde, ou elle ne se fera pas.

Ce PLF porte enfin les crédits alloués à l'Agence nationale de l'habitat (Anah) pour la rénovation thermique des logements privés de 369 millions d'euros à plus de 1 milliard d'euros. C'est une bonne nouvelle, et nous la saluons, mais elle doit être assortie des moyens humains nécessaires, via la création de nouveaux équivalents temps plein.

Il ne faudrait pas que, en l'absence d'une organisation de l'offre, ces crédits ne soient que des effets d'annonce. Tel est le cas aujourd'hui, puisque le nombre de rénovations initialement prévues en 2023 n'est atteint qu'à 76 %.

Mes chers collègues, nous ne pouvons pas rester silencieux face à cette crise sans précédent. Il est de notre responsabilité de faire passer un message clair à l'ensemble des acteurs du logement et aux Français : nous sommes à vos côtés.

Nous attendons du Gouvernement un véritable choc de la politique du logement. Comme je vous l'ai déjà indiqué et écrit, monsieur le ministre, les parlementaires et les élus locaux doivent absolument être écoutés et associés dans le cadre du prochain projet de loi de décentralisation du logement. C'est donc aussi un changement de méthode qui est attendu.

Pour toutes ces raisons, le groupe Union Centriste ne votera pas les crédits de cette mission.

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