Intervention de Yves Coquelle

Réunion du 4 mai 2005 à 15h15
Énergie — Articles additionnels avant l'article 18

Photo de Yves CoquelleYves Coquelle :

Cet amendement tend à renforcer le droit à l'électricité pour tous en prévoyant une tarification spéciale pour sa fourniture.

Vous pourrez difficilement nier que l'électricité est un facteur de cohésion sociale essentiel. Source de froid, de lumière et de chaleur, elle permet tout à la fois de se nourrir, de s'éclairer et de se chauffer. De l'accès à l'électricité dépend donc bien souvent l'accès à la santé, à l'hygiène et à l'éducation.

En acceptant notre amendement, vous doteriez ce projet de loi des outils nécessaires pour atteindre les objectifs que vous proclamez. En effet, il tient compte du fait qu'aujourd'hui 3, 5 millions de personnes vivent sous le seuil de pauvreté en France. Parmi les personnes en difficulté sociale qui doivent faire face à des impayés, près de 37 % d'entre elles avaient des dettes envers EDF-GDF, taux qui est en augmentation de 3, 5 points depuis 1999.

Le problème que rencontrent ces familles dépasse la question de l'accès à l'électricité : il relève de la tarification de celle-ci. Un tarif social pour toutes les familles qui se trouvent en situation de pauvreté ou qui ont des conditions de vie précaires, ainsi que la mise en place d'une commission chargée d'instaurer de réels dispositifs de prévention sont donc loin d'être superflus.

Ces mesures s'avèrent d'autant plus indispensables que l'extension de la libéralisation du marché de l'électricité ne manquera pas de provoquer une augmentation du prix de l'électricité, comme l'a signalé la commission Roulet. En effet, les conclusions du rapport soulignent que la hausse des prix sera inévitable pour faire face au besoin d'augmentation des fonds propres et pour proposer des prix attractifs susceptibles d'attirer en France des producteurs étrangers d'électricité.

Pour comprendre l'urgence d'une extension de la tarification sociale de l'électricité à l'ensemble des familles modestes, il n'est pas inutile de préciser que c'est surtout dans les foyers les plus modestes que l'on a recours à des convecteurs mobiles, grands consommateurs d'électricité. Il n'est pas inutile non plus de préciser que la grande majorité des familles en difficulté sociale habitent des logements souvent mal isolés, voire insalubres, ce qui augmente encore leur consommation d'électricité.

A la hausse du prix de l'électricité s'ajoute, pour les personnes en difficulté sociale, l'augmentation des loyers, qui a été constatée dans le dernier rapport du Secours catholique : le loyer net moyen a subi une hausse de 13 % dans le parc social et de 27 % dans le parc privé pour les personnes en situation précaire.

Face à cet accroissement des coûts des services élémentaires, il apparaît indispensable d'étendre la tarification sociale de l'énergie et de prévenir les situations d'endettement et d'éventuelles coupures.

Faut-il rappeler au Gouvernement que la directive de 2003 sur le marché de l'électricité prévoit, dans son article 3, des obligations de service public pour les Etats membres ? L'alinéa 2 mentionne les obligations de service public aux entreprises du secteur électrique, portant notamment sur le prix de la fourniture.

Par ailleurs, conformément au dixième alinéa du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 - « La Nation assure à l'individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement » - et au 1 de l'article 25 de la Déclaration universelle des Droits de l'Homme de 1948 - « Toute personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille, notamment pour l'alimentation, l'habillement, le logement... » - des mesures assurant des conditions de logement décentes doivent être inscrites dans la loi pour que ces principes soient respectés.

Vous arguerez sans doute du fait qu'il existe déjà des dispositifs en faveur des personnes en difficulté pour les aider à payer leur facture d'électricité. Cependant, ceux-ci ne leur apportent qu'une aide limitée. Les quelque 150 000 coupures qui ont eu lieu en 2003 démontrent la nécessité de mener une action préventive renforcée.

Nous sommes malheureusement obligés de déposer des amendements visant à garantir les droits fondamentaux de nos concitoyens, car nous ne voyons ni changements politiques significatifs ni volonté politique majeure de votre part pour faire bouger les choses. Nous attendons donc que vous cessiez votre politique purement déclarative en adoptant cet amendement.

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