Intervention de Guy Fischer

Réunion du 30 mars 2005 à 15h00
Assistants maternels et assistants familiaux — Adoption d'un projet de loi en deuxième lecture

Photo de Guy FischerGuy Fischer :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, aujourd'hui, plus de 300 000 assistants maternels gardent à leur domicile des enfants. Ce mode de garde est devenu le plus répandu pour les enfants de moins de trois ans. Si son succès est dû en partie au confort dont peut bénéficier l'enfant, il s'explique aussi par les lacunes du système de garde collective.

Les parents des 2 300 000 enfants de moins de trois ans expriment des besoins nécessairement évolutifs, eu égard aux contraintes liées à leur emploi, à la déréglementation du travail, aux journées éclatées, peu compatibles avec les horaires de crèche, en somme à l'évolution de notre société.

Par ailleurs, les réponses apportées par l'Etat, les collectivités locales, les associations et le régime de protection sociale restent insuffisantes, très disparates sur le territoire et trop inégalitaires.

Dans les grandes villes, trouver une place en crèche constitue un véritable parcours du combattant pour une majorité de femmes qui ont une activité professionnelle, ainsi qu'une question douloureuse pour les familles monoparentales.

De nombreuses études le montrent, la liberté de choix du mode de garde est théorique et souvent illusoire, largement limitée, dans la réalité, par la pénurie quantitative et qualitative des modes de garde disponibles.

Le choix de faire appel aux assistants maternels, solution présentée comme le « meilleur système de garde », reste fortement prédéterminé par le niveau des revenus du foyer. Or la politique gouvernementale semble résolument axée sur le développement des pratiques individuelles de garde, au détriment des crèches familiales, dont les capacités d'accueil stagnent.

C'est en tenant compte de l'ensemble de ces éléments que nous abordons aujourd'hui, en deuxième lecture, le débat sur le projet de loi relatif aux assistants maternels et aux assistants familiaux.

On ne peut pas faire grief au Gouvernement de vouloir avancer dans ce domaine. En effet, un réel consensus existe autour de la nécessité de faire évoluer le statut des assistants maternels, tel qu'il résulte de la loi de 1992, un « statut dérogatoire et contesté », pour reprendre le titre d'une étude publiée en 1999 dans L'Actualité juridique, Fonctions publiques.

Il est en effet inadmissible que le statut des assistants maternels fasse « référence à un droit mixte », autrement dit « dépendant pour partie du droit privé et pour partie du droit public », qu'il diffère selon la qualité de l'employeur et qu'il soit source d'instabilité et de fortes inégalités, notamment en matière de rémunération. Cette profession a trop longtemps été maintenue en marge du code du travail, ce qui a entraîné des inégalités de traitement et des conditions de travail inadmissibles comme l'absence de limite horaire légale.

De même, et c'est là une cruelle lacune de ce projet de loi, comment justifier plus longtemps la place singulière faite, au sein de la fonction publique, aux assistants maternels, qui ne bénéficient ni du statut de fonctionnaire ni, pleinement, du statut de droit commun des agents non titulaires de droit public des collectivités locales ?

Enfin, il est indispensable de répondre aux revendications anciennes et légitimes des assistants familiaux accueillant à titre permanent des mineurs extrêmement fragiles. En effet, ils sont des maillons essentiels de la politique sociale en faveur de l'enfance et exercent une activité sociale toute particulière, mêlant intimement un espace privé, familial, et un investissement, certes, professionnel, mais essentiel pour la société.

Pour autant, on ne peut pas dire que le Gouvernement ait tout mis en oeuvre pour transformer le statut des assistants maternels et des assistants familiaux en un véritable statut de professionnels, qualifiés et dûment rémunérés. Tout n'a pas été fait pour permettre une véritable professionnalisation, qui aurait pour double but de créer des conditions de travail acceptables et de rendre ces professions attractives.

En effet, ce projet de loi ne permet pas de faire aboutir les propositions convergentes des organisations syndicales visant, à terme, à concevoir des cadres de métiers pour les assistants familiaux et les assistants maternels employés par les collectivités locales.

Ainsi, monsieur le ministre, vous restez imperméable à l'idée d'intégrer les assistants maternels dans la fonction publique territoriale, « estimant qu'un tel statut serait incompatible avec la nécessaire souplesse de l'accueil ». Si vous concédez qu' « il convient désormais de leur reconnaître toutes les caractéristiques d'un véritable métier de l'enfance », vous n'en tirez pas toutes les conséquences. Autant dire, dans ces conditions, que la reconnaissance des personnels accueillants restera partielle.

On ne peut pas dire non plus que le Gouvernement ait fait preuve d'une réelle volonté politique pour structurer et développer un véritable service public, diversifié et de qualité, d'accueil des jeunes enfants. Au contraire, la rupture dans la conception même des modes de garde est largement consommée.

L'objet de mon propos n'est ni de stigmatiser tel ou tel mode de garde ni de dévaloriser certains accueillants.

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