Intervention de Jean-François Rapin

Commission des affaires européennes — Réunion du 12 octobre 2023 à 9h00
Fonctionnement de l'union européenne — Audition de M. Serge Guillon ancien secrétaire général des affaires européennes

Photo de Jean-François RapinJean-François Rapin, président :

L'enjeu de l'information rejoint celui de la capacité d'influence.

De fait, la France souffre d'un défaut dans la relation entre parlement national et institutions européennes : la compétence législative communautaire y est complètement déléguée à l'exécutif national, contrairement à d'autres États membres. Pour rappel, lors d'un déplacement en Suède en début d'année, quand ce pays assurait la présidence du Conseil, l'ambassadeur m'expliquait que mon homologue dans ce pays était réveillé la nuit par le ministre et devait parfois réunir en toute vitesse sa Commission, pour obtenir l'avis de cette dernière avant d'arrêter la décision à défendre lors de négociations.

Au-delà du contrôle de subsidiarité et des propositions de résolution européenne, nos relations avec les institutions européennes passent par les échanges bilatéraux avec nos homologues ou par la Conférence des organes spécialisés dans les affaires communautaires (Cosac). Malgré les efforts que nous avons déployés pour la présidence française, cette dernière est une grande endormie, largement sous l'emprise du Parlement européen, alors qu'elle a vocation à permettre l'expression des parlements nationaux. Taper du poing sur la table y est mal vu : ce n'est pas dans les coutumes. Le sujet des relations entre parlement national et institutions européennes y est perçu comme spécifique à la France.

Toutefois, au titre de la présidence française de la COSAC, j'ai constitué en son sein un groupe de travail qui a émis des propositions pour renforcer l'implication des parlements nationaux dans le fonctionnement de l'UE afin de le rendre plus démocratique - par exemple la création d'un « carton vert » -, tout en prenant en compte les différences institutionnelles entre États membres. La ministre aujourd'hui en charge des affaires européennes me donne raison à ce sujet : il est normal que les parlements nationaux exercent leur influence du fait de leur contact avec les territoires et les administrés.

Ainsi, dans mon département, même si, d'un point de vue macroéconomique, le secteur n'excède pas 1 % du PIB européen, la pêche représente 5 000 emplois à Boulogne-sur-Mer. Le parlementaire national est là pour défendre de telles causes. Personne d'autre ne le fait, car l'élu européen est plus éloigné du terrain, et le serait plus encore avec des listes transnationales.

Certains parlementaires européens se défendent d'une telle distance en raison de leur élection par le peuple. Hier, un maire m'a demandé le numéro de téléphone de l'élu européen des Hauts-de-France, alors que nous n'en avons plus depuis longtemps, les listes étant nationales !

Comme l'a souligné Pascal Allizard, il faut remettre en cause ces dysfonctionnements institutionnels. Fort de votre influence, vous pouvez nous y aider. Je suis content que le Gouvernement me donne raison, mais pour quel effet ?

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