Intervention de Jean-François Rapin

Commission des affaires européennes — Réunion du 25 octobre 2023 à 13h30
Agriculture et pêche — Audition de M. Hervé Berville secrétaire d'état auprès de la première ministre chargé de la mer

Photo de Jean-François RapinJean-François Rapin, président :

Mes chers collègues, nous accueillons aujourd'hui Monsieur Hervé Berville, secrétaire d'État chargé de la mer. Monsieur le ministre, merci d'avoir accepté cette audition. Nous l'avions sollicitée il y a tout juste un mois, au moment où les pêcheurs, réunis à Nice pour leurs assises annuelles, clamaient leur inquiétude, n'hésitant pas à dénoncer une « trahison » du gouvernement après la fin annoncée de l'aide au carburant. Au 15 octobre dernier, devaient en effet cesser les aides à la trésorerie de 20 centimes par litre consenties aux pêcheurs pour les aider à faire face à la flambée du prix du gazole après l'invasion russe de l'Ukraine. La filière halieutique voyait dans l'interruption de ces aides, reconduites depuis dix-huit mois à plusieurs reprises pour un montant total de 75 millions d'euros, un « cataclysme » qui aurait précipité sa fin. Il est vrai que la flotte française, troisième de l'Union européenne derrière celles de l'Espagne et du Danemark, apparaît très fragile, éprouvée par une succession de crises : le covid, le Brexit, l'impact de la guerre en Ukraine... Le nombre de navires a diminué de plus d'un quart en vingt ans, nombre d'entre eux sont vieillissants, sans parler des marins, dont près de la moitié partiront à la retraite d'ici cinq à dix ans et dont la situation sociale est tendue : en effet, la rémunération des marins se réduit à mesure que le prix du gazole augmente.

Vous expliquiez alors ne plus pouvoir prolonger ces aides au gazole en raison de l'expiration du régime européen qui les autorisait. Et vous annonciez un « plan de transition énergétique » des navires de pêche, avec à court terme une réduction de 13 centimes d'euros par litre financée par TotalEnergies, et censée compenser la fin de la remise de 20 centimes d'euros. Ce plan n'a pas apaisé les pêcheurs qui vous ont défié publiquement, en appelant au Président de la République. Vous avez, depuis, fait marche arrière et annoncé il y a deux semaines que l'aide serait finalement prolongée jusqu'au 4 décembre. Pourquoi ce revirement ? Pouvez-vous nous assurer que l'aide au gazole sera prolongée aussi longtemps que durera la guerre en Ukraine et que les prix du gazole demeurent élevés ?

Vous avez en parallèle pris l'engagement de poursuivre la mobilisation au niveau européen afin que l'encadrement temporaire de crise de la Commission européenne, qui autorise jusqu'à fin décembre le versement de cette aide, soit prolongé en 2024 et associé à un relèvement des plafonds. Vous avez rencontré avant-hier le Commissaire européen à Luxembourg où vous participiez à un Conseil pêche : avez-vous obtenu de sa part des garanties à ce sujet ?

Nous restons inquiets. La pêche, vous le savez, représente toute une filière : au moins trois hommes à terre pour un homme en mer. C'est une filière d'avenir pour l'économie, pour l'environnement et pour la souveraineté alimentaire de la France, alors que nous importons déjà plus de 75 % du poisson consommé dans notre pays. Elle façonne nos paysages, notre culture, l'identité des populations côtières.

Pourtant, entre l'absolutisme de la Commission européenne autour des aires marines protégées (AMP), les projets d'éoliennes offshore, et les menaces sur les quotas de pêche dans les eaux anglaises après 2026, les préoccupations s'accumulent. C'est pourquoi nous tenions à vous entendre aujourd'hui sur votre vision de la filière et votre stratégie pour assurer son avenir.

Monsieur le ministre, je vous cède la parole.

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