Monsieur le sénateur Jacquin, vous m'interrogez sur les conditions de dialogue social et de droit des travailleurs des plateformes et sur l'état des travaux à l'échelon européen concernant la directive en discussion.
La manière dont la France a choisi de donner des droits sociaux aux travailleurs des plateformes n'est pas une démarche nouvelle, puisque cela remonte à la loi défendue en 2016 par Myriam El Khomri, complétée par les ordonnances prises par Mme Élisabeth Borne, alors ministre des transports, puis par des ordonnances prises au ministère du travail pour organiser les élections permettant la représentation des travailleurs de plateformes.
Le modèle que nous avons mis en place fonctionne. Pas plus tard qu'hier, trois accords ont été proposés, permettant, par exemple, de relever le prix minimum de course, de garantir un revenu horaire et kilométrique, et d'assurer une plus grande liberté tant pour les chauffeurs que pour les livreurs dans le choix des courses qu'ils veulent ou ne veulent pas effectuer. Depuis le début de l'année, une dizaine d'accords ont été soumis à discussion, au vote et à signature.
La directive qui sera proposée au Comité des représentants permanents vendredi concernant les travailleurs de plateformes est issue des trilogues entre le Parlement, la Présidence espagnole et le Conseil des ministres européens du travail. Elle est très différente du projet du Conseil. Le 12 juin dernier, la France a soutenu l'initiative du Conseil européen des ministres au travail et nous avons voté en faveur de la directive. Nous avions dit que nous pourrions la soutenir après le trilogue à condition qu'elle ne s'éloigne pas du projet initial.
Passer de trois critères sur sept à deux critères sur cinq, aller vers une directive qui permettrait des requalifications massives, y compris de travailleurs indépendants qui tiennent à leur statut, c'est un vrai changement, que nous ne pouvons pas soutenir. Je l'ai indiqué à mon homologue espagnol, à l'instar de nombreux autres de mes collègues européens, qui ont dit que ce projet de directive issu des trilogues n'est pas respectueux des équilibres trouvés en conseil des ministres du travail européens. §