Il faut rappeler ce que ce texte n’est pas. Il n’est pas une proposition de loi sur l’ouverture à la concurrence des bus publics relevant, en tant qu’opératrice exclusive dans la région Île-de-France, de la RATP. Quoi que nous en pensions, cette question a déjà été longuement, largement et régulièrement débattue.
Il faut également distinguer le débat sur l’ouverture à la concurrence de celui sur la privatisation, qui n’est aucunement la question ! §La plupart des métropoles de France organisent leurs services de transport, notamment les bus, par délégations de service public, lesquelles sont, ni plus ni moins, le modèle ici proposé.
Il s’agit aujourd’hui non pas de revenir sur des étapes considérées à juste titre par M. Karoutchi comme essentielles, mais d’apporter des garanties supplémentaires tout le long de ce processus, qui devrait s’ouvrir à partir de la fin de l’année 2024, selon les termes de la législation actuelle.
J’ai eu l’occasion, voilà plus d’un an, d’exprimer mes doutes et même mes craintes au sujet du calendrier. Je suis donc heureux que la présidente de la région francilienne et d’Île-de-France Mobilités ait accepté d’ouvrir la discussion en confiant une mission à MM. Grosset et Bailly, deux personnalités reconnues en matière de dialogue social par toutes les parties prenantes, y compris par les organisations syndicales. Les intéressés ont remis un rapport détaillé, contenant des propositions de garanties sociales supplémentaires à destination de la région Île-de-France et de l’autorité organisatrice de la mobilité (AOM) francilienne.
Je me réjouis également, monsieur le sénateur Vincent Capo-Canellas, qu’une initiative parlementaire ait traduit dans un texte une large partie de ces propositions, qui nécessitaient une adaptation législative.
La rédaction actuelle contient deux principales avancées qui me conduisent à exprimer un avis extrêmement favorable.
Premièrement, le texte contient une série de garanties sociales supplémentaires, notamment celle qui fonde sur le volontariat la mobilité des chauffeurs et des machinistes en cas de changement de centre-bus ; cette question a été longuement débattue dans l’hémicycle. D’autres apports essentiels font suite à des recommandations de la mission Bailly-Grosset. Le rejet du texte ne permettrait pas d’offrir ces assurances, car elles nécessitent une adaptation législative.
Deuxièmement, ce texte contient un autre élément clé : le calendrier du processus. L’ouverture à la concurrence mise en œuvre par une autorité organisatrice de la mobilité n’a de bienfaits qu’à condition de se faire selon des échéances réalistes et maîtrisées. Le texte est profondément lié à un tel enjeu.
Pour aller dans le sens de cette proposition de loi, il est clair qu’une bascule généralisée vers la mise en concurrence par un transfert de personnel vers d’autres opérateurs au 1er janvier 2025 n’est protectrice ni pour les agents ni pour les usagers du service public. Il était donc nécessaire d’introduire de la souplesse par un décalage du calendrier ; ce texte y pourvoit. Accorder deux ans supplémentaires permettra d’agir par étapes et sous l’égide de l’autorité organisatrice Île-de-France Mobilités pour que le processus soit maîtrisé et protecteur.
La somme de ce double apport – modification du calendrier et garanties sociales supplémentaires – est de nature à améliorer la mise en place de l’ouverture à la concurrence pour en assurer la réussite. Je le pense profondément.
Un certain nombre de débats ont eu lieu, jusqu’à la commission mixte paritaire, sur plusieurs paramètres contenus dans le texte initial ; c’est normal ! Je pense à la répartition des prérogatives ayant conduit l’Autorité de régulation des transports à disposer de la compétence en matière de règlement des différends. Je me réjouis qu’un accord ait été trouvé entre les deux chambres. Comme vous nous y invitez, monsieur le rapporteur, nous veillerons – ce point relève du pouvoir exécutif – à ce que l’ART dispose effectivement de la capacité d’exercer pleinement cette compétence.
Vous l’aurez compris, le Gouvernement soutient, comme il l’a fait tout au long de la navette parlementaire, cette proposition de loi. J’y insiste : ce texte apporte des garanties sociales supplémentaires et fournit un calendrier pragmatique et réaliste. Au contraire, l’absence de vote ne permettrait pas de maîtriser le processus, par le biais d’échéances raisonnables, et d’apporter les protections longtemps ignorées.