Intervention de Olivier Henno

Réunion du 25 janvier 2024 à 10h30
Dépistage des troubles du neurodéveloppement — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Olivier HennoOlivier Henno :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je tiens à saluer notre collègue Jocelyne Guidez pour sa détermination et la grande énergie qu’elle consacre à ce sujet, qui en a bien besoin ; je veux aussi saluer Mme la rapporteure, particulièrement à l’aise sur cette question, et la féliciter pour son premier rapport.

Madame la ministre, vous avez eu, au fond, la formule juste : tous les problèmes abordés lorsque nous débattons de ces sujets résultent d’un défaut de notre système de soins, celui d’avoir été, de tout temps, orienté vers le curatif au détriment du préventif.

C’est une des raisons pour lesquelles on se focalise souvent sur la crise des urgences. Certes, celle-ci occasionne beaucoup de souffrances, mais on oublie d’autres aspects, comme l’errance thérapeutique, qui rend les parcours douloureux et parfois dramatiques.

Dans un cas comme dans l’autre, on peut parler d’une perte de chance dont les conséquences sont souvent irréversibles.

Les troubles du neurodéveloppement sont un bel exemple de ces pathologies mal connues et mal identifiées, qui, faute de diagnostic et de prise en charge, ont maintenu trop de vies dans la souffrance.

Notre collègue Jocelyne Guidez, concernée à titre personnel par le sujet, est à l’écoute des patients et des familles depuis des années. Elle nous propose aujourd’hui un texte visant à mieux repérer, diagnostiquer et accompagner les TND. Notre groupe salue sa constance et son engagement, en espérant naturellement que cette proposition de loi tant attendue rencontrera le plus large soutien de notre assemblée.

Je rappelle que la catégorie des TND regroupe les troubles du spectre autistique (TSA), les troubles du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH) et les troubles spécifiques du langage et des apprentissages, dits troubles « dys ».

Je tiens au passage à excuser notre collègue Nadia Sollogoub, très investie également sur ces sujets, et qui regrette de ne pouvoir être parmi nous ce matin.

Il faut encore ajouter à cette liste les troubles oppositionnels de provocation (TOP), souvent associés aux TDAH, qui sont extrêmement lourds à gérer et à vivre pour les familles.

Au total, les TND pourraient concerner plus d’une personne sur dix, soit une part très importante de la population, que nous ne pouvons pas laisser sans réponse, sans aide, sans piste, sans une porte à pousser pour mettre un nom sur les troubles et, surtout, sans organiser une prise en charge adaptée.

La Revue neurologique publiait en avril 2022 cette synthèse : « Les […] TND sont fréquents en population générale et perdurent souvent tout au long de la vie, même s’ils peuvent être masqués par des mécanismes de compensation. […] Une reconnaissance des troubles et une prise en charge adaptée favorisent une intégration sociétale de bonne qualité. »

Voilà pourquoi il est essentiel, comme proposé à l’article 1er de cette proposition de loi, qu’un maillage de classes dédiées aux enfants présentant une forme de TND se mette en place sur le territoire national.

La présidente d’une association de mon département me disait de ces enfants, parfois infatigables, mais plus souvent très fatigables, qu’il leur faut une scolarisation de proximité, sans quoi la fatigue des transports fait perdre le bénéfice d’une scolarité adaptée.

C’est tout l’enjeu de l’inclusion scolaire, qui ne doit pas être source de complications supplémentaires ; il convient à l’inverse de la faciliter administrativement ; d’où les dispositions de simplification proposées à l’article 4. Dans ce domaine comme dans beaucoup d’autres, quand on interroge les familles, la lourdeur administrative fait figure de seconde peine. En matière de santé aussi, les codes ne cessent de grossir. Nous avons donc une obligation de simplification.

Toujours à propos des difficultés de scolarisation, on ne peut que regretter l’absence de mise en place des plans d’accompagnement personnalisés (PAP). S’ils étaient respectés à la lettre, ils permettraient parfois d’éviter des demandes d’heures d’AESH. Certaines choses sont simples, mais essentielles.

Le plus important – je rejoins en cela mon propos sur l’errance thérapeutique – reste la pose du diagnostic, qui doit être facilitée. C’est la raison pour laquelle la formation des soignants et des enseignants est absolument indispensable.

Voir que l’autre est différent, détecter ce qu’il possède de plus ou de moins que des enfants, des parents ou des patients comme nous toutes et nous tous, voilà ce qui permet de ne pas les envoyer, parfois sans retour, dans une voie de garage.

Je veux insister, pour conclure, sur la dimension humaine de cette proposition de loi. « Si tu diffères de moi, mon frère, loin de me léser, tu m’enrichis », disait Saint-Exupéry. Ce pourrait être une belle devise pour notre société, une société où la différence, loin de faire peur, aurait sa place et laisserait éclore les talents, dans leur diversité.

Pour cela, il faut aussi que les aidants soient reconnus. Cette proposition de loi concerne beaucoup de familles. Je veux encore saluer le travail réalisé par son auteure et par Mme la rapporteure.

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