Intervention de Stéphane Ravier

Réunion du 30 janvier 2024 à 15h00
Société du bien-vieillir en france — Discussion en procédure accélérée d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Stéphane RavierStéphane Ravier :

«  Liberté, Égalité, Fraternité » : que faisons-nous de la fraternité française entre générations ?

Au mois de janvier 2023, la France comptait 14 millions de personnes âgées, parmi lesquels 4 millions avaient plus de 85 ans.

Malheureusement, selon l'étude CSA pour les Petits Frères des pauvres, en 2021, 530 000 personnes âgées se trouvaient en situation de « mort sociale », c'est-à-dire sans contact avec les différents cercles familial, amical et de voisinage.

Selon les chiffres de la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees) de 2020, les personnes de plus de 75 ans se suicident deux fois plus que le reste de la population, ce qui concerne 20 % des suicides dans notre pays.

Cet abandon et cette souffrance de nos anciens sont une intolérable euthanasie cachée.

Tout cela est d'autant plus préoccupant quand on connait la dynamique de vieillissement de la population de notre pays.

Dans les dix prochaines années, le nombre des Français âgés de 75 à 84 ans va augmenter de 50 %, passant de 4 millions en 2020 à 6 millions en 2030. Entre 2030 et 2040, la population des plus de 85 ans augmentera, elle, de plus de 50 %.

En 2030, les plus de 65 ans seront plus nombreux que les moins de 20 ans. Le vieillissement est pourtant quelque chose de progressif, donc, par excellence, un nouvel état de fait que l'on peut prévoir et que l'on doit anticiper.

La première nécessité, pour que les personnes âgées ne soient pas abandonnées, est de garantir l'équilibre démographique et le renouvellement des générations par une politique familiale ambitieuse. Elle a été abandonnée depuis longtemps.

Y aura-t-il assez d'actifs pour assurer les services à la personne et « bâtir la société du bien-vieillir » ?

Avec une telle dénatalité, nous ne préviendrons pas la perte d'autonomie, pas plus que nous ne parviendrons à privilégier le maintien à domicile des personnes âgées. Les mesures techniques les plus inventives ne remplaceront pas la présence humaine et l'échange entre générations.

Sur le volet de la lutte contre la maltraitance, les scandales répétés et avérés appellent à une prise de conscience générale sur les dérives de certains groupes privés, mais il ne faut pas oublier la responsabilité du Gouvernement qui a aggravé l'enfermement des personnes âgées durant la période du covid.

Je n'oublie pas que M. Véran et le conseil scientifique ont interdit les promenades, empêchant même les familles de rendre visite aux parents et grands-parents ou de les accompagner vers la mort. Ils leur ont même refusé « l'adieu au visage » avant la mise en bière. Même le milieu carcéral n'a pas connu une telle infamie.

Dans son rapport de mission auprès du ministre des solidarités, Laurent Frémont parle de « ruptures anthropologiques inédites […] dont on a peine à imaginer l'ampleur ». Je partage totalement ce constat. Voilà le vrai visage des progressistes !

C'est pourquoi je salue l'avancée de la commission renforçant le droit de visite en Ehpad pour en faire un droit absolu, même en période de crise sanitaire.

Pour finir, la problématique des déserts médicaux est également très liée à l'abandon des personnes âgées et doit aussi être intégrée dans les objectifs de la prochaine loi de programmation financière du grand âge, dont on espère qu'elle n'est pas passée à la trappe avec la ministre qui l'avait engagée.

Bâtir une société, c'est d'abord ne pas se couper de ses racines et de sa mémoire. N'oublions jamais, mes chers collègues, que notre avenir réside dans le respect des personnes qui nous ont certes transmis le passé, mais qui nous ont d'abord donné la vie.

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