Intervention de Laurence Boone

Commission des affaires européennes — Réunion du 21 décembre 2023 à 9h05
Institutions européennes — Conseil européen des 14 et 15 décembre 2023 - Audition de Mme Laurence Boone secrétaire d'état auprès de la ministre de l'europe et des affaires étrangères chargée de l'europe

Laurence Boone, secrétaire d'État :

Cela est dû à une maladresse : la Hongrie a remis sa réforme de la justice en avril 2023 ; la Commission avait 90 jours pour l'examiner et libérer l'argent retenu dans l'attente de cette réforme. Il est regrettable qu'elle n'ait pas été plus rapide, car la concomitance avec le Conseil européen fait mauvais effet, c'est certain.

Sur les 50 milliards d'euros sur quatre ans prévus pour l'Ukraine, la négociation sera beaucoup plus difficile - toujours à cause de la Hongrie. Je pense que nous parviendrons à un compromis en nous engageant sur un an, ce qui sera déjà bien. Je rappelle qu'aux États-Unis, le blocage reste entier concernant le financement de l'aide à l'Ukraine.

Deux pays s'opposent à l'ouverture de Schengen à la Roumanie, largement pour des raisons électoralistes - une chose impensable chez nous ! Les Néerlandais sont revenus sur leur véto ; ils vont mettre du temps à former un gouvernement, ce qui n'est pas forcément une mauvaise chose... L'Autriche a demandé des données statistiques que la Roumanie a fournies : les choses devraient donc se débloquer petit à petit. Nous poussons en ce sens. La Bulgarie argue qu'il vaut mieux placer les agents de contrôle aux frontières extérieures de l'Union plutôt qu'à l'intérieur. Nous avançons doucement.

Sur la défense, tout d'abord, à l'évidence, les vingt-sept États membres de l'Union ne font pas assez en la matière. La guerre en Ukraine l'a cruellement montré : les dividendes de la paix que nous avons touchés se sont traduits, en Europe, par un recul des capacités de production industrielle, que nous devons désormais reconstruire.

Ensuite, en effet, l'idée est non pas de s'affranchir de l'OTAN, mais d'en constituer un pilier et de renforcer nos capacités de production, pour que nous soyons plus forts ensemble. Toutefois, si la prochaine élection présidentielle américaine se soldait par la victoire d'un candidat qui n'a jamais caché son mépris pour l'OTAN, voire son intention de s'en détourner, nous pourrions alors nous sentir un peu seuls.

Cette reconstruction de nos capacités industrielles pose plusieurs questions. La première porte sur la capacité d'investissement des pays européens et sur les moyens mis en commun. Ainsi, la France demande que les munitions soient produites en Europe, ce qui ne met pas en danger notre souveraineté. L'argent des contribuables européens doit servir à la fabrication de matériels européens et à la construction d'une capacité de production européenne. La seconde question a trait aux achats de matériel militaire américain, comme les avions F-35, par nombre de pays européens. En effet, ce matériel est doté d'une carte américaine qui permet de contrôler quand et comment il est utilisé, ce qui pose un véritable problème de souveraineté. C'est pourquoi nous encourageons le développement de solutions de substitution européennes. En outre, dans le cadre de la stratégie de défense définie par la Commission européenne, nous veillerons à la préservation de notre souveraineté et de nos capacités d'action.

Enfin, nous voulons rester une puissance souveraine. Nous sommes la seule puissance nucléaire de l'Union européenne, dotée d'un siège au Conseil de sécurité de l'ONU, ce qui n'est absolument pas remis en cause. Nous voulons aussi décider souverainement de nos exportations de matériel militaire. Les exportations sont nécessaires à la croissance de l'industrie, aussi ne souhaitons-nous pas qu'elles soient empêchées au motif que d'autres pays s'y opposeraient ; de même, nous refusons de nous voir imposer un mode de production particulier en la matière.

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