Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui une proposition de loi qui n’est pas l’alpha et l’oméga de la dépendance et de l’autonomie pour les années à venir. Toutefois, on peut saluer quelques avancées, notamment grâce au travail de nos rapporteurs, que je remercie, et aux modifications apportées par certains d’entre nous.
Saluons déjà l’œuvre de simplification et de déflation normative entreprise par les rapporteurs, avec la suppression de trente et un articles. Gageons que cela accroîtra l’efficacité et la lisibilité de cette proposition de loi et que les textes réglementaires viseront le même objectif.
Permettez-moi de citer quelques nouveautés de ce texte, sans en faire le répertoire exhaustif.
Je salue d’abord la création d’un service public départemental de l’autonomie et l’institution d’une carte professionnelle d’accompagnant de personnes à domicile. Je suis également satisfaite de la généralisation du programme Icope, visant à prévenir la perte d’autonomie, et de la garantie du droit des résidents-patients à recevoir de la visite – nous nous souvenons encore des situations difficiles vécues en 2020…
Mon propos s’attardera principalement sur l’hébergement des personnes âgées, naturellement abordé dans cette proposition de loi.
Pour ce qui concerne les Ehpad, le texte contraint les établissements et services publics pour personnes âgées à se regrouper, au travers de l’adhésion soit à un groupement hospitalier de territoire (GHT), soit à un groupement territorial de coopération sociale et médico-sociale (GTSMS), institué par ce texte. Cela permettra de mettre en œuvre une stratégie commune d’accompagnement dans une logique de parcours, de rationaliser les modes de gestion, de mettre en commun les fonctions et les expertises et de former des partenariats et des synergies. Cette mesure est d’ailleurs soutenue par les représentants du secteur.
L’habitat inclusif, instauré par la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (Élan), est conforté par cette proposition de loi. Il me semble pertinent de faire en sorte que ce type d’habitat ne soit assimilé à un établissement recevant du public (ERP), afin d’éviter de lui imposer des contraintes supplémentaires.
Ce texte traite également des conditions d’accueil et de prise en charge des résidents en Ehpad, mais sans approfondir le sujet.
La commission a maintenu dans le texte l’article 11 bis F, qui prévoit une expérimentation consistant à imposer l’ouverture de places consacrées à l’accueil de nuit dans les Ehpad. L’offre de solutions de répit pour les proches aidants étant très faible, les rapporteurs ont proposé d’étendre cette expérimentation aux résidences autonomie.
En revanche, cette proposition de loi souffre de nombreux manques, qui seront, je l’espère, comblés dans le projet de loi Grand Âge que vous avez annoncé la semaine dernière en commission des affaires sociales, madame la ministre, et qui doit être présenté au Parlement d’ici à l’été prochain. Nous attendons ce texte de pied ferme, l’urgence en la matière a été soulignée par mon collègue Jean-Marie Vanlerenberghe. Au-delà de la question du financement, très peu abordée dans ce texte, plusieurs enjeux devront donner lieu, sinon à une résolution, du moins à une orientation.
Je pense d’abord à la place des résidences pour seniors et des résidences services dans l’architecture de l’hébergement des personnes âgées, à leur financement et à la péréquation avec les Ehpad.
Ensuite, il conviendra de dresser un véritable bilan financier comparatif de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) versée en établissement et de l’APA versée à domicile.
Enfin, si le maintien à domicile est plébiscité par les personnes âgées et leur famille, son coût est-il supportable ? En outre – autre problème récurrent –, eu égard à la pénurie de main-d’œuvre, que l’on ne pourra pas remplacer par une intelligence artificielle – pour faire la toilette par exemple –, on peut comprendre que les intervenants déplorent le nombre de kilomètres à parcourir entre les patients, notamment en zone rurale. Ce temps de déplacement est perdu pour le soin, l’accompagnement et le partage. Quelle sera donc l’orientation du Gouvernement en matière de maintien à domicile ? Recruter, c’est bien, mais revaloriser ces métiers – tant le revenu qui leur est associé que l’image qu’ils véhiculent – est indispensable pour renforcer l’attractivité de la profession.
Toutes ces questions devront être traitées main dans la main avec les conseils départementaux et, plus largement, avec l’ensemble des partenaires du secteur, des bénéficiaires et de leurs familles. Ces acteurs de terrain auront des solutions de proximité à proposer, car ils connaissent par cœur les écueils auxquels se heurtent les politiques existantes. Écoutons les expériences du quotidien !