Intervention de Cédric Perrin

Commission des affaires européennes — Réunion du 28 février 2024 à 16h35
Politique étrangère et de défense — Audition de M. Charles Fries secrétaire général adjoint du service européen pour l'action extérieure seae

Photo de Cédric PerrinCédric Perrin, président de la commission des affaires étrangères et de la défense :

Mes chers collègues, nous avons le plaisir de recevoir cet après-midi M. Charles Fries, secrétaire général adjoint du Service européen pour l'action extérieure (SEAE), chargé de la paix, de la sécurité et de la défense. Monsieur le secrétaire général, nous vous remercions de vous être déplacé jusqu'à nous, dans un contexte difficile sur le plan géopolitique.

Notre commission est d'abord préoccupée par la montée en puissance de nos capacités de production nécessaire pour soutenir l'Ukraine. La stratégie relative à l'industrie de défense européenne (EDIS), ainsi que le programme européen d'investissement dans le domaine de la défense (EDIP) devaient être présentés hier, le 27 février. Leur présentation a été ajournée mais sans doute pouvez-vous tout de même nous dévoiler le résultat des échanges avec les États membres, les industriels, les think tanks et les acteurs financiers, auxquels le SEAE a été associé.

Thierry Breton a appelé à la création d'un fonds de 100 milliards d'euros. Certes, c'est beaucoup ; par comparaison, le montant alloué au Fonds européen de la défense 2021-2027 est d'un milliard d'euros par an durant les sept années de la période de programmation. Comment le SEAE contribue-t-il à la réflexion sur cet outil et, en particulier, sur son financement ?

Nous peinons à voir les progrès que l'urgence de la situation actuelle aurait permis de faire à l'Union européenne sur les autres aspects de défense. En matière de « coopération structurée permanente », censée être le niveau politique de la défense européenne, la liste des projets s'est allongée, mais les résultats se font attendre.

Il n'est pas plus aisé d'évaluer le volet de gestion de crise de la PSDC. Certaines missions auparavant de premier plan, comme celle qui est menée au Sahel, semblent mal en point, pour les raisons que l'on imagine. Nous souhaiterions aussi savoir où en sont les missions en Libye ou en Irak. Quant à la mission de gestion du point frontière de Rafah reconduite en juin dernier, est-elle dépassée par les événements, pour le dire sobrement ?

Une capacité de déploiement rapide (CDR) a été mise au point à la fin de l'année dernière afin de vite réagir face aux crises. Même si le projet est intéressant, son effectif théorique de 5 000 hommes ne représente que deux groupements tactiques, qui n'ont jamais été déployés et ne seront opérationnels qu'en 2025... À l'heure où les crises se multiplient à un rythme sans précédent, l'Union peut-elle s'organiser pour rapidement faire face à l'urgence ?

Comment percevez-vous les moyens et l'action du SEAE, près de quinze ans après sa création ? Nous approchons d'une échéance électorale qui a déjà suscité quelques idées d'un saut fédéral au sujet des questions de politique étrangère. La Cour des comptes européenne vient précisément de rendre un rapport sur le SEAE, le 30 janvier dernier, relevant un manque d'effectifs, un problème dans leur répartition et des lacunes dans les moyens informatiques. Le financement alloué par l'Union européenne à son service diplomatique au sens large, comprenant environ 8 000 employés, dépasse pourtant 1 milliard d'euros.

J'espère enfin que nous pourrons, lors de nos échanges, déborder du champ de la Politique de sécurité et de défense commune (PSDC) pour évoquer plus largement les grands dossiers de politique extérieure. Je songe à la situation au Moyen-Orient, sur laquelle nous peinons à voir quelles finalités diplomatiques et politiques poursuit l'Union européenne, dont l'action est essentiellement financière. Accessoirement, nous peinons à savoir qui conduit cette action, la présidente de la Commission européenne semblant parfois insoucieuse des compétences fixées par les traités. Je songe aussi à la situation en Arménie, sur laquelle le Sénat a eu l'occasion d'exprimer sa grande préoccupation.

Monsieur le secrétaire général, nous mesurons bien que la tâche assignée au SEAE est difficile. Nous vous remercions des éclairages que vous pourrez nous apporter.

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