Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, il peut paraître surprenant de devoir délibérer dans des délais aussi brefs sur le statut juridique de l'organisme gestionnaire du parc naturel régional de Camargue. Mais, comme l'ont excellemment rappelé M. le rapporteur et l'orateur précédent, le feuilleton chaotique des statuts successifs, régulièrement remis en cause à la suite de recours et de jugements négatifs répétés, nous conduit aujourd'hui à cette démarche tout à fait exceptionnelle.
En tant que parlementaire et, surtout, en tant que vice-président de la Fédération des parcs naturels régionaux, je me fais l'interprète de tous les présidents de parcs pour vous dire ma très grande satisfaction, monsieur le secrétaire d'État, monsieur le rapporteur, et ma totale adhésion à ce texte tant attendu à la fois par ceux qui défendent la cause de ces parcs et par les trente-sept salariés du parc naturel régional de Camargue.
Nous attendons cet heureux dénouement depuis des années. Nous espérons que les statuts du PNR de Camargue seront ainsi définitivement consolidés et que l'emploi des salariés, qui se sont tant battus pour la survie de ce parc, sera enfin sécurisé.
La loi Barnier du 2 février 1995 indique expressément qu'un parc naturel régional doit être régi par un syndicat mixte. En conséquence, la fondation d'utilité publique, structure porteuse du PNR, ne peut plus exercer ce pouvoir. S'agissant des instances dirigeantes du syndicat mixte, il est heureux d'avoir prévu que les propriétaires seront représentés au sein du comité syndical.
Le texte qui nous est présenté a reçu le soutien de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, du département des Bouches-du-Rhône, des deux communes du parc, Arles et Saintes-Maries-de-la-Mer, mais aussi de la Fédération des parcs naturels régionaux, dont le bureau a voté à l'unanimité, le 16 mai et le 4 juillet, une motion de soutien à ce parc.
Il faut dire et répéter que ce parc possède des caractéristiques environnementales tout à fait exceptionnelles, qui justifient la présence de l'outil institutionnel « parc naturel régional ». Même s'il ne regroupe que deux communes, Arles et Saintes-Maries-de-la-Mer, et qu'il réunit moins de 7 400 habitants, alors que la norme se situe, pour les PNR, entre 40 et 150 communes et autour de 100 000 habitants, il est d'une richesse faunistique et floristique hors du commun, qui en fait un fleuron du patrimoine naturel français et européen.
Il est d'une très grande richesse puisqu'il abrite 398 espèces d'oiseaux, soit plus de la moitié des espèces vivant en France, dont 132 espèces nicheuses. Il est également une zone d'hivernage pour les canards, une zone de nidification pour les hérons et une zone de halte migratoire, notamment pour les bécasseaux. De nombreuses espèces présentes au sein du parc sont protégées au niveau national et international. Parmi elles, cinq espèces sont en danger et figurent sur la liste rouge nationale. Enfin, on ne peut passer sous silence les 12 000 couples de flamands roses qui s'y reproduisent.
Le PNR de Camargue abrite, ensuite, 31 % des amphibiens que l'on compte en France, et est à ce titre un site exceptionnel, mais aussi de nombreux reptiles, des tortues sauvages, 44 espèces de mammifères recensées sur les 109 qui existent en France, comme le castor ou la musaraigne, et 13 espèces de chauve-souris.
En ce qui concerne les insectes, le tableau est le même : 43 espèces de libellules ont été recensées.
La flore est également particulièrement abondante puisque le parc contient 20 % de la flore française, ainsi que de nombreuses espèces végétales considérées comme étant d'intérêt patrimonial.
Tous ces éléments ont conduit à mettre en oeuvre, depuis de nombreuses années, des formes de protection différentes, mais ô combien nécessaires, comme la réserve naturelle nationale de 13 000 hectares de Vaccarès, propriété du Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres.
La Camargue dispose aussi d'un site Ramsar, favorable à la conservation des zones humides. Elle a par ailleurs été classée, en 1977, en réserve de biosphère, c'est-à-dire en site visant à rechercher les modalités d'exploitation durable.
Les signatures des conventions de Barcelone en 1982, de Berne et de Bonn en 1979, ont renforcé les actions de protection. Cela montre bien la volonté des hommes et des femmes de ce territoire de protéger par tous les moyens institutionnels ce milieu naturel exceptionnel.
Peuvent encore être ajoutés à ce tableau plus de dix-sept ZNIEFF, ou zones naturelles d'intérêt écologique, faunistique et floristique, et quatre sites Natura 2000.
L'État ne saurait donc se désintéresser des difficultés juridiques de ce parc, raison pour laquelle le ministre d'État, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables, doit être remercié de s'être déplacé en personne, au mois d'août, pour trouver un terrain d'entente et jouer les médiateurs.
C'est en effet cet acte politique important qui a permis de sortir de l'impasse alors que, dans ce territoire, il faut lutter en permanence contre la mer et le fleuve. Des crues catastrophiques viennent d'ailleurs nous rappeler, à intervalles plus ou moins réguliers, la fragilité du milieu : en 1840, en 1856, en octobre 1993, en janvier 1994, où le débit du Rhône a atteint 11 000 mètres cubes par seconde.
Les soixante kilomètres de littoral connaissent des évolutions géomorphologiques constantes, avec des zones d'engraissement et de construction de flèches littorales et des zones d'érosion, avec un recul du trait de côte de plus de cinq mètres par an, d'où la nécessité de construire et d'entretenir des digues, des brise-lames et des épis.
Cette zone abrite pourtant une richesse économique et humaine étonnante, qui doit être en permanence contrôlée et régulée par le parc.
Ainsi, si la pratique de la riziculture sur 18 500 hectares est économiquement intéressante, elle est aussi un moyen d'entretenir les canaux d'irrigation en empêchant la salinisation des sols, nuisible à l'écosystème du delta du Rhône : près de 120 exploitations sont concernées et bénéficient d'une IGP, c'est-à-dire d'une identification géographique protégée, depuis l'an 2000.
On n'oubliera pas l'exploitation du sel, laquelle concerne 18 000 hectares, soit 16 % de la superficie du parc, pour une production annuelle de 800 000 tonnes.
Mentionnons encore l'élevage original du cheval de Camargue, avec environ 15 000 têtes, du taureau de Camargue et du taureau de combat pour la corrida.
Quant à la pêche, en eau douce, dans les étangs, dans les lagunes ou en mer, elle représente une activité non négligeable et les chasses, communales et privées, constituent une ressource financière importante pour les propriétaires.
Puis, il y a le tourisme : un million de touristes fréquentent annuellement ce territoire et font vivre environ 200 restaurateurs, une hôtellerie de plein air comptant 6 000 places, quatre campings et hôtels représentant 2 400 places.
Ce rapide tableau du patrimoine naturel et des activités économiques de ce territoire illustre la nécessité institutionnelle du parc naturel régional : outil indispensable, c'est une infrastructure écologique nationale qui est au service des populations, du patrimoine naturel et de l'activité économique.
Le parc est en même temps représentatif des grandes problématiques auxquelles nous sommes confrontés : biodiversité, changement climatique, variété et richesse des paysages, maintien d'une activité économique qui puisse échapper à la dureté des lois du marché, faire vivre correctement des hommes des femmes, qui produisent mais entretiennent également un patrimoine naturel d'une qualité et d'une richesse exceptionnelles.
Les propositions qui nous sont soumises aujourd'hui reçoivent l'approbation pleine et entière du groupe socialiste, mais, comme l'a fait le rapporteur au travers de son excellent rapport, je souhaite insister sur la nécessité de mettre le patrimoine immobilier et mobilier de la fondation à la disposition du parc naturel régional, selon des modalités à définir, pour qu'il puisse continuer à fonctionner dans les conditions les plus propices à ses missions.