Intervention de Bernard Kouchner

Réunion du 22 février 2010 à 14h30
Action extérieure de l'état — Discussion d'un projet de loi en procédure accélérée

Bernard Kouchner, ministre :

L’agence prendra en charge plusieurs missions nouvelles, parce que la culture, ce n’est pas seulement les beaux-arts. La culture, c’est aussi la langue et tout ce qu’elle véhicule avec elle d’humanisme. La culture, ce sont aussi les idées, y compris les idées scientifiques.

Je crois que la première mission de la France, c’est de défendre cette idée large et englobante de la culture.

Ainsi, l’agence développera des programmes de soutien à la langue française, qu’il s’agisse d’encadrer l’activité d’enseignement du réseau culturel ou d’œuvrer au renforcement de la place de notre langue dans les systèmes éducatifs étrangers.

Elle engagera des programmes destinés à renforcer la place de la France dans le débat d’idées à l’étranger, à promouvoir les savoirs français et la culture scientifique, qui est aussi notre héritage – celui des Lumières – et notre avenir.

Enfin, elle sera investie d’une mission de conseil et de formation professionnelle très solide et obligatoire des personnels français et étrangers de notre diplomatie culturelle.

Ce point est essentiel : l’agence aura pour mission de coiffer les 143 établissements de notre réseau, qui seront ses relais à travers le monde.

L’agence et le réseau ne partageront pas seulement le même nom. Ils seront, dès le début, unis par des liens fonctionnels très forts, grâce à un dialogue et à des échanges constants. Non seulement je m’y engage, mais c’est inscrit dans le projet de loi !

Les personnels de l’agence et du réseau se mélangeront dès le début, ce qui n’était pas le cas jusqu’alors. Dans l’agence, les personnels issus du réseau rencontreront déjà le personnel en poste à Paris et en France. Ces liens se traduiront notamment dans deux domaines, la formation et la programmation de l’activité.

Pour l’instant, le réseau des centres et instituts français à l’étranger reste rattaché administrativement au ministère des affaires étrangères et européennes. Toutefois, comme vous le savez, mesdames, messieurs les sénateurs, j’ai souhaité sur ce sujet une clause de rendez-vous. Ainsi examinerons-nous dans un délai de trois ans l’opportunité de rattacher organiquement le réseau à l’agence.

Telle est d’ailleurs la recommandation unanime de la commission des affaires étrangères et de la commission de la culture et tel est le cap que je souhaite fixer. Mais une réforme ne s’impose pas d’en haut : elle se gagne quand elle est acceptée par ceux qui sont ensuite chargés de la faire vivre.

Vous proposez de commencer par des expérimentations locales. Si ce principe est retenu, nous lancerons ces dernières dès que possible, c'est-à-dire immédiatement. Je pense que c’est une très bonne idée. Dans tous les cas, c’est un préalable indispensable pour une bonne décision, consensuelle et informée.

Faisons confiance aux hommes, à leur intelligence, à leur volonté. Laissons à la politique la part d’invention et procédons par ordre, en commençant par nous doter d’une agence à la fois légitime et efficace.

Une agence légitime, c’est une agence qui associe tous ceux qui ont leur mot à dire sur la définition et sur la mise en œuvre de notre diplomatie culturelle, au premier rang desquels, je ne le répéterai jamais assez, le ministère de la culture, les parlementaires, les collectivités locales, les milieux culturels.

Une agence efficace, cela signifie une tutelle unique, un contrat d’objectifs et de performance, une unité de commandement. En cas de conflit – c’est arrivé bien souvent dans d’autres réseaux voisins du nôtre – entre le représentant de l’agence et un ambassadeur, il reviendra au ministre de trancher ; cela sera inscrit dans le décret. Cette efficacité de commandement doit également se décliner dans la composition du conseil d’administration, qui, tout en étant représentatif, ne doit pas être pléthorique. Il doit rester une instance resserrée de pilotage décisionnel.

Légitimité et efficacité : cette double logique a aussi présidé au choix du statut juridique. D’aucuns prétendent que nous privatisons notre action culturelle. Mais ce n’est pas une privatisation ! Olivier Poivre d’Arvor le sait. Alors qu’aujourd’hui CulturesFrance est une simple association, nous voulons faire de la nouvelle agence un établissement public.

Un établissement public est plus légitime qu’une association pour mettre en œuvre une politique publique. Et un établissement public industriel et commercial, un EPIC, est plus efficace qu’un établissement public administratif, parce qu’il offre une souplesse de gestion que n’a pas l’administration.

Le statut d’établissement public industriel et commercial a fait ses preuves : l’Agence française de développement, l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger sont des EPIC.

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