Intervention de Catherine Tasca

Réunion du 22 février 2010 à 14h30
Action extérieure de l'état — Discussion d'un projet de loi en procédure accélérée

Photo de Catherine TascaCatherine Tasca :

Une fois de plus, pardonnez-moi de vous le dire, monsieur le ministre, votre Gouvernement a choisi de soumettre ce texte à la procédure accélérée. Auriez-vous estimé que ce projet de loi ne méritait pas plus d’attention et n’exigeait pas un véritable échange entre les deux chambres ?

Nous le déplorons fortement car le débat parlementaire s’en trouve tronqué et le bicamérisme contourné. Cela n’est pas de bon augure au moment où l’on s’interroge sur la qualité du travail législatif.

J’en viens à votre projet de loi. J’interviendrai exclusivement sur l’action culturelle, qui est le cœur du projet ; mes collègues Monique Cerisier-ben Guiga et Yves Dauge reviendront sur ce point et traiteront également d’autres sujets, notamment de l’expertise et de la mobilité internationales.

Tous ceux qui suivent les questions de politique étrangère, et en particulier celles qui touchent à l’action culturelle extérieure, s’accordent à reconnaître que celle-ci est un élément majeur de la politique d’influence de notre pays.

Le Livre blanc sur la politique étrangère et européenne de la France et les travaux de nos deux commissions ont bien pointé les faiblesses de l’action culturelle extérieure et suscité l’espoir d’une véritable rénovation et relance du réseau.

Dès lors, comment nier notre déception ? Le texte du projet de loi tel qu’il nous a été transmis était très en deçà de toutes les préconisations. Il ressort du travail en commission une rédaction qui nous laisse perplexes car, malgré le travail très positif des rapporteurs, les amendements n’ont pas suffi à lui donner la cohérence et surtout l’ambition attendues.

Perplexes, nous le sommes, car nous avons souhaité cette réforme et nous voudrions croire à son efficacité.

Ce débat nous éclairera peut-être sur la volonté réelle du Gouvernement de créer une véritable cohérence et une impulsion de l’administration centrale à la nouvelle agence et de celle-ci à nos centres et instituts de par le monde.

La quasi-concomitance de ce débat avec l’adoption du projet de loi de finances rectificative est évidemment fâcheuse, puisque ont été entérinées de nouvelles amputations du budget du ministère des affaires étrangères et européennes dont nous avions déjà vu en 2008 qu’il était « à l’os ».

Ainsi disparaissent 13, 6 millions d’euros pour la mission « Action extérieure de l’État » et 23, 4 millions d’euros s’agissant de la mission « Aide publique au développement ». Il serait injuste d’imputer ces décisions à vous seul, monsieur le ministre, car nous savons bien le poids du budget dans la hiérarchie gouvernementale et les effets de la mécanique destructrice de la révision générale des politiques publiques. Mais vous comprendrez que nous ne puissions pas non plus les mettre à votre actif...

La principale innovation de votre réforme visait la création d’une grande agence chargée des échanges culturels à l’étranger, et regroupant pour ce faire CulturesFrance et les centres et instituts culturels à l’étranger.

Malheureusement, vous vous êtes arrêté en chemin, puisque vous avez fini par reporter à trois ans la décision de rattachement du réseau à l’agence, amputant ainsi la réforme de sa principale audace.

En définitive, le projet de loi se contente de transformer le statut de CulturesFrance en établissement public à caractère industriel et commercial. On est donc loin de la réforme d’ampleur souhaitée.

Cette transformation du statut de CulturesFrance constitue-t-elle une réponse à la crise des moyens de notre diplomatie culturelle ? À la lecture du projet de loi, on peut en douter. On peut ainsi lire, dans l’exposé des motifs, que les nouveaux opérateurs retirent « une part significative de leurs ressources du produit de leurs propres prestations ». Et, à l’article 3 relatif aux ressources de ces établissements, dans sa rédaction initiale, « les recettes provenant de l’exercice de leurs activités » figuraient à la première place.

Ainsi, en transformant le statut de CulturesFrance en celui d’établissement public à caractère industriel et commercial, l’objectif initial était d’aller vers la diminution, voire la suppression de tout financement public, en incitant ces opérateurs à mener des activités lucratives...

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion