Intervention de Joëlle Garriaud-Maylam

Réunion du 22 février 2010 à 14h30
Action extérieure de l'état — Discussion d'un projet de loi en procédure accélérée

Photo de Joëlle Garriaud-MaylamJoëlle Garriaud-Maylam :

Le défi, c’est de prouver que notre culture est non pas passéiste ou déclinante, symbole du vieux monde, mais au contraire rayonnante ! Il nous faut nous tourner résolument vers l’avenir pour rajeunir et renouveler notre image. Notre stratégie ne doit pas être polluée par des relents de naphtaline. J’aimerais savoir combien de visiteurs étrangers choisissent chaque année de visiter les maisons de Victor Hugo ! Pensez-vous que beaucoup de jeunes artistes ou créateurs se sentiront motivés par ce choix ?

Certes, je crois à la nécessité de connaître notre passé, nos racines culturelles. J’ai même créé un site internet, racinesfrance.com, dans ce but. Mais je crois surtout à l’impérieuse nécessité de nous ouvrir à la modernité, de respirer l’air du grand large et de la diversité, de savoir prendre des risques et innover.

Beaucoup d’entre nous ont vécu comme humiliante et destructrice, voilà deux ans, la couverture du Time suggérant que la culture française n’était plus ce qu’elle était. Nous avons besoin d’une nouvelle ambition, mais celle-ci doit s’incarner dans la modernité, l’initiative, le mouvement. Les plus beaux bijoux ont besoin d’un écrin simple et élégant, tel que l’appellation « Institut français », qui est d’ailleurs déjà utilisée dans de très nombreux pays. Deux tiers des personnes interrogées, nous dit-on, la préfèrent à toute autre. Voilà à peine deux jours, mes propres sondages, certes non scientifiques, auprès non seulement des personnels d’ambassade, mais aussi des responsables et des élus des Français de l’étranger, m’ont permis de conclure que 100 % des personnes interrogées préfèrent l’appellation « Institut français ».

Je ne voudrais pas que l’on puisse de nouveau citer l’expression d’André Gide, lequel, quand on lui avait demandé quel était son poète préféré, avait répondu « Victor Hugo, hélas ! ». J’espère, de la même manière, que l’expression « hugoliade » ne sera pas empruntée à Ionesco pour qualifier ce projet.

Je soutiendrai donc l’amendement qui sera présenté par notre collègue Colette Mélot à ce sujet. Je vous exhorte, monsieur le ministre, mes chers collègues, à surseoir, si vous le pouvez, à une telle décision. L’architecture institutionnelle ne sera véritablement prête que dans trois ans. En conséquence, est-il si urgent d’adopter aujourd’hui cette dénomination ? Nous pourrions encore nous laisser le temps de la réflexion pour un choix aussi symbolique et important. Cette question pourrait également, comme je l’ai déjà suggéré en commission, faire l’objet d’un grand sondage internet sur le site du ministère, ce qui contribuerait à créer un mouvement d’adhésion des citoyens français ou francophones à notre politique culturelle.

En outre, dans un temps de crise où chaque économie compte, repousser cette décision permettrait d’éviter de gros frais de conception – je pense au logo et à la modification des sites internet – et de publication. J’imagine que la suggestion de Mme Mélot ne sera pas retenue, mais je le regrette dès à présent.

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