Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi qui nous réunit aujourd’hui partait d’une intention louable. Prenant acte de la modification des équilibres mondiaux et de la nécessité de renforcer notre diplomatie d’influence, il visait à redonner à la France les moyens d’un rayonnement culturel international de premier ordre.
Cet investissement constitue en effet une nécessité pressante pour demeurer dans la course des grandes puissances sources d’influence, notre capacité d’attraction reposant sans nul doute sur notre modèle culturel ainsi que sur notre aptitude à le valoriser à l’étranger.
Il s’agissait donc initialement de créer une grande agence chargée de coordonner et d’unifier la politique culturelle de la France dans le monde, sur le modèle de l’Institut Goethe ou du British Council.
Mais les restrictions budgétaires qui affectent le ministère empêchent de réaliser un tel objectif.
C’est donc un projet amputé de ses ambitions initiales qui nous est présenté, et c’est à l’affaiblissement de notre diplomatie d’influence que nous risquons malheureusement d’assister.
Mes collègues ont fait état des réductions successives du budget, et le tout récent projet de loi de finances rectificative pour 2010 consacre des annulations de crédits à hauteur de 13, 6 millions d’euros au titre de la mission « Action extérieure de l’État ». Nul doute que le secteur culturel pâtira très largement de ces restrictions.
Cette politique est d’autant plus dangereuse qu’elle vise à transférer progressivement les missions de l’État à une entreprise culturelle. Notre collègue Monique Cerisier-ben Guiga a beaucoup parlé du statut de l’EPIC, et je la rejoins sur le fait que le bien culturel n’est pas une marchandise.
Ce désengagement de l’État pourrait également se traduire par un nouveau report sur les collectivités territoriales. Ces dernières, qui jouent déjà un rôle des plus significatifs en matière de développement des territoires et de coopération culturelle, ne pourront pourtant pas pallier les carences d’une véritable ambition culturelle à l’international. Il est essentiel que les dotations de l’État demeurent substantielles. Or, dans le nouvel appel à contrat du ministère des affaires étrangères et européennes pour la période 2010-2012, seuls 20 millions d’euros proviennent du ministère sur les 100 millions d’euros investis dans des projets de coopération, en intégrant la participation des collectivités.
Cette situation est d’autant plus dommageable que la place réservée aux collectivités territoriales dans le projet de loi initial n’était pas satisfaisante. Heureusement, le travail en commission a permis de réaliser certaines avancées : ainsi, des représentants des collectivités pourront intégrer le conseil d’administration des établissements publics, prélude à la reconnaissance de leur savoir-faire.
Pour autant, on aurait pu espérer une meilleure prise en considération de leurs investissements en matière de politique culturelle extérieure.
En effet, l’action des centres culturels se concentre ordinairement sur les capitales et les grandes villes. Dès lors, c’est grâce aux partenariats de coopération décentralisée établis avec les collectivités territoriales que le relais de l’influence culturelle française est assuré dans les provinces.
J’en veux pour preuve le volet culturel de coopération entre mon département du Finistère et la région de Diana, à Madagascar, qui vise, d’une part, à soutenir des partenariats entre structures finistériennes et malgaches et, d’autre part, à appuyer des initiatives de jeunes.
Ce programme a notamment permis de créer une école de musique dans la région de Diégo-Suarez – laquelle a accueilli 250 élèves en 2009 –, d’instaurer un échange avec un établissement finistérien, de prêter des instruments et de former des formateurs. Mais rien ne remplace les témoignages émouvants de mamans malgaches qui affirment que, pour rien au monde, leurs enfants ne manqueraient un cours de violon ou de chant, même s’ils doivent marcher trois heures dans la brousse pour y assister !
Le soutien constant au théâtre de rue et les échanges entre les troupes de théâtre ont permis l’organisation du festival Zegny Zo. L’ambassade et le centre culturel étaient très sceptiques, en 2007, lors de la première édition. Mais, devant le succès de cette manifestation, ils sont désormais partenaires et apportent leur concours financier.
L’alliance franco-malgache de Diégo-Suarez, qui rencontre, comme beaucoup d’autres, de sérieuses difficultés financières, sollicite le Conseil général, lequel participe à l’installation d’un studio d’enregistrement ou d’une salle de projection de films, ainsi qu’à l’achat de livres.
Je pourrais multiplier les exemples de ce type.