Sous couvert de responsabilisation des parents, c’est à leur culpabilisation que vous procédez. Car c’est bien le présupposé de manque d’implication dans la scolarité de leurs enfants des parents de familles nombreuses issues des milieux populaires qui sous-tend la présente proposition de loi.
Monsieur le ministre, je ne connais pas de parents démissionnaires ; je connais des parents désemparés, dépassés. Ces parents sont en proie à des difficultés de tous ordres, économique, social, psychologique, qui font qu’ils n’y arrivent plus. La crise a aggravé leurs conditions de vie. Eux-mêmes ont parfois eu une relation difficile à l’école.
Comment rapprocher ces parents de l’école ? Certainement pas en faisant de l’inspecteur d’académie un agent de contrôle social, de culpabilisation et de répression ! Vous n’aboutirez ainsi qu’à exacerber les tensions et à envenimer les relations entre l’école et ces familles. Vous les éloignerez un peu plus encore du système scolaire, qu’elles percevront plus négativement. Ces parents ont besoin qu’on leur redonne confiance.
De nombreuses actions et structures existent pour faciliter et développer les relations entre les familles et l’école. Pourquoi ne pas s’appuyer sur elles ?
On peut mentionner en particulier la Fédération nationale des écoles de parents et des éducateurs, qui anime un réseau de cinquante associations d’accompagnement des parents et des jeunes confrontés à des difficultés dans leur vie relationnelle, scolaire et familiale.
Or, comme de nombreuses associations complémentaires de l’enseignement public, cette fédération, qui se trouve dans une situation financière critique, a dû réduire ses actions, alors qu’elle propose un suivi sur le long terme et bénéficie d’une expérience et d’une expertise. Plutôt que de renforcer l’existant, vous avez généralisé la mallette des parents…
Or que nous apprend l’évaluation de ce dispositif ? En réalité, 20 % des parents potentiellement concernés se sont portés volontaires pour assister à au moins une réunion. Parmi ces volontaires, 60 se sont effectivement rendus à au moins une de ces réunions, soit en moyenne cinq parents par classe et mille parents participants au total ! On est loin de la véritable « guidance » mise en place par les écoles de parents…
Il est bon de préciser également que cette mallette des parents se substitue à certains projets développés au sein même de l’éducation nationale.
Dans la même logique, le dispositif de la proposition de loi impliquerait une meilleure remontée par les chefs d’établissements des signalements d’absences aux inspections académiques. Mais, dans le même temps, vous supprimez des milliers d’emplois de vie scolaire, qui sont notamment chargés de ce suivi.
Nous pourrions également évoquer les conseillers principaux d’éducation. Combien de ces CPE ont été supprimés avec la révision générale des politiques publiques ? Combien de collèges restent actuellement sans CPE ?
Parce que votre « responsabilisation/culpabilisation » des parents d’enfants absentéistes est inefficace, incohérente et stigmatisante, nous ne pouvons pas vous suivre dans cette voie et nous appelons à la suppression de l’article 3.