Intervention de Sylvie Desmarescaux

Réunion du 29 avril 2010 à 15h00
Accès aux stages des étudiants et élèves travailleurs sociaux — Adoption d'une proposition de loi

Photo de Sylvie DesmarescauxSylvie Desmarescaux, coauteur de la proposition de loi et rapporteur de la commission des affaires sociales :

Madame la présidente, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, cette proposition de loi, dont M. Nicolas About a pris l’initiative et que j’ai cosignée, vise à remédier aux difficultés que rencontrent actuellement les étudiants en travail social pour trouver des structures d’accueil acceptant de les prendre en stage.

Elle s’inscrit dans un contexte qu’il me paraît important de rappeler pour bien comprendre le sens de notre démarche.

Nous le savons, les stages permettent aux étudiants non seulement de mettre en œuvre les connaissances qu’ils ont acquises dans le cadre des enseignements théoriques, mais aussi de leur donner une expérience du monde professionnel et de ses métiers. Ils apportent aux jeunes, outre un premier contact effectif avec le monde du travail, un complément de formation et une expérience qu’ils peuvent valoriser lors de leur entrée dans la vie active.

De leur côté, les structures d’accueil ont tout intérêt à faire découvrir aux étudiants leur secteur d’activité, d’autant que les stagiaires sont souvent en mesure de leur apporter un petit complément de main-d’œuvre bien utile.

Cependant, l’expérience a montré que certains stages peuvent être utilisés comme une modalité de pré-embauche, ou même correspondre à un véritable emploi mais sans contrat de travail. Les abus constatés nous ont conduits à encadrer le déroulement des stages.

Ainsi, l’article 9 de la loi du 31 mars 2006 pour l’égalité des chances, qui vise les stages en entreprise réalisés dans le cadre du cursus pédagogique des étudiants en formation initiale – hors apprentissage –, prévoit : d’une part, la conclusion d’une convention de stage entre l’entreprise d’accueil, le stagiaire et son établissement d’enseignement, afin de prémunir les étudiants contre les pratiques abusives et de leur assurer de bonnes conditions de travail durant leur stage : d’autre part, la gratification des étudiants lorsque la durée de leur stage est supérieure à trois mois consécutifs. On peut en effet considérer qu’un stage effectué sur une longue période permet aux étudiants de dépasser le simple niveau de familiarisation avec leur futur secteur professionnel et que ces derniers doivent être rétribués pour le travail accompli. Outre, bien évidement, le remboursement des frais liés au stage – je citerai comme exemple les frais de transport et de restauration –, l’étudiant reçoit donc une gratification correspondant à sa participation dans la vie de l’entreprise.

Je précise que nous devons le choix du terme « gratification » au rapporteur du texte qui est devenu la loi pour l’égalité des chances, Alain Gournac, membre de notre commission des affaires sociales, par analogie avec le nom de la rémunération des jeunes en première phase de formation d’apprenti junior, cette rémunération n’ayant pas le caractère juridique d’un salaire.

Depuis 2006, la réglementation des stages a fait l’objet de trois modifications importantes.

En 2008, la mesure a été élargie, par décret, aux stages effectués au sein d’une association, d’une entreprise publique ou d’un établissement public à caractère industriel et commercial.

Cette extension s’est poursuivie en 2009 puisqu’un décret a prévu la même gratification pour les stagiaires accueillis dans les établissements publics de l’État et les administrations.

Enfin, la récente loi du 24 novembre 2009 relative à l’orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie a ramené de trois à deux mois consécutifs la durée minimale du stage à compter de laquelle une gratification est due au stagiaire.

J’en viens à l’application concrète de ces mesures : ont-elles été favorables aux étudiants ? Il faut bien le reconnaître, elles n’ont pas eu que des effets positifs.

L’expérience montre en effet que la gratification des stages a entraîné, à l’usage, un résultat contre-productif : la restriction sensible de l’offre de stages. Sont particulièrement concernés les secteurs sanitaire, social et médico-social, pour lesquels les stages de longue durée occupent une part importante de la formation des étudiants et doivent obligatoirement être validés pour l’obtention des diplômes.

Il s’avère que de nombreuses structures d’accueil se sont désengagées de la formation des étudiants, estimant ne pas disposer des moyens financiers suffisants pour assumer les dépenses de gratification. Faute de proposition, de plus en plus de jeunes se retrouvent donc dans l’incapacité de valider des stages longs et d’achever leur cursus pédagogique. À terme, leur formation se trouve ainsi menacée.

Paradoxalement, cette situation a conduit certains étudiants à s’élever contre la gratification, pourtant destinée à leur apporter un soutien financier au cours de leurs études et, ainsi, à les protéger.

Nous avons déjà pu le constater lors de l’examen du texte qui est devenu la loi portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, dite « loi HPST », de la part des étudiants en orthophonie qui, face à la pénurie d’offres, demandaient à être exemptés de l’obligation de gratification lors de leurs stages. Le texte définitif, à l’article 59 de la loi, a d’ailleurs accordé cette exemption à l’ensemble des étudiants auxiliaires médicaux pour les mêmes motifs.

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