Intervention de Daniel Marsin

Réunion du 29 avril 2010 à 15h00
Accès aux stages des étudiants et élèves travailleurs sociaux — Adoption d'une proposition de loi

Photo de Daniel MarsinDaniel Marsin :

Madame la présidente, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, le texte de la proposition de loi qui est aujourd’hui soumis à l’examen de notre assemblée consiste à lever l’obligation de gratification afin de faciliter l’accès aux stages des étudiants en travail social et, donc, de ne pas compromettre leur formation.

Introduite par la loi du 31 mars 2006 pour l’égalité des chances, la gratification obligatoire des stages visait plusieurs objectifs : lutter contre les pratiques abusives de certaines structures d’accueil des stagiaires, redonner aux stages toutes leurs vertus en matière d’insertion professionnelle et combattre la précarité des jeunes étudiants.

Or, notamment dans les secteurs sanitaire, social et médico-social, cette mesure semble avoir produit un effet pervers qui n’avait pas été anticipé : celui de réduire l’offre de stages.

En effet, faute de propositions, de plus en plus d’étudiants se trouvent dans l’incapacité de valider des stages et, donc, d’achever leur formation. Cette mesure provoque notamment une diminution tant quantitative que qualitative des terrains de stages, une remise en cause des projets personnels de formation des étudiants et l’apparition de disparités régionales. Tous ces points ont été largement décrits par les orateurs qui m’ont précédé.

Les organisations professionnelles craignent que l’ensemble du dispositif de formation en alternance des travailleurs sociaux ne soit en danger.

Le 18 janvier dernier, la Direction générale de la cohésion sociale, la DGCS, organisait une table ronde sur l’alternance dans les formations sociales. À cette occasion, elle avait annoncé le lancement d’une mission commune pilotée par l’Inspection générale des affaires sociales, l’IGAS, et l’Inspection générale de l’administration de l’éducation nationale et de la recherche, l’IGAENR, pour mesurer les conséquences de la gratification sur l’offre de stages. Le rapport est très attendu et, comme cela a été indiqué, il sera probablement disponible d’ici au mois de juillet prochain.

La proposition de loi de nos collègues répond à un réel besoin. Il est, en effet, nécessaire d’agir rapidement, car, sur le terrain, la situation des stagiaires s’est fortement dégradée en raison de l’extension des gratifications aux stages de deux mois et plus. La plupart des étudiants doivent se contenter de formations tronquées par une offre de stages réduite et subissent de fortes inégalités suivant le statut de l’organisme dans lequel ils effectuent leur stage et la nature même du stage.

Les associations regrettent que cette situation conduise à de nombreux aménagements des stages pour échapper au versement de la gratification. Certains étudiants acceptent de ne pas être gratifiés afin de pouvoir accéder à un stage qui correspond à leur cursus de formation. D’autres sont parfois contraints de signer un engagement à ne pas réclamer de gratification. Cette situation est inacceptable et menace directement la qualité et l’existence même de l’alternance.

De plus, ainsi que l’a affirmé le Président de la République le 24 avril 2009 : « Il n’est pas normal que les stages soient synonymes de précarité ».

En effet, le principe de gratification permet la reconnaissance et la valorisation du travail des stagiaires et évite que des employeurs mal intentionnés ne profitent d’une main-d’œuvre surdiplômée, docile et gratuite.

Aussi, supprimer une disposition censée apporter aux étudiants un soutien financier et les protégeant de certaines dérives est une décision sans doute grave. C’est la raison pour laquelle la proposition de loi ne peut être qu’une solution d’appoint très temporaire.

Eu égard à la réalité du problème posé par les élèves et étudiants concernés et à la nécessité de trouver des solutions urgentes dans un cadre légal, les membres du groupe RDSE ne voteront pas contre le texte de la commission, la majorité d’entre eux s’abstiendront.

Nous pensons en effet, madame la secrétaire d'État, qu’il est nécessaire et urgent de réfléchir à une solution de fond qui écarte la gratuité des stages. Certains ont d’ailleurs évoqué avant moi, sous certaines conditions, un mode de financement public à la fois par l’État et par les collectivités territoriales.

J’espère donc que le débat d’aujourd'hui sera prolongé, sans désemparer, par celui, plus général, de l’accès aux stages obligatoires inclus dans les cursus diplômants, pour l’ensemble des étudiants, dans le secteur médico-social comme dans les autres, car le problème se pose avec acuité pour un certain nombre d’autres formations.

Vous l’aurez compris, madame la secrétaire d'État, nous comptons sur vous pour prendre ce problème à bras-le-corps et nous proposer rapidement un texte concernant l’ensemble des étudiants, qui permettra de juguler la pénurie d’offres de stage, sans remettre en cause les principes et objectifs de la loi du 31 mars 2006.

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