Les stagiaires qui évoluent temporairement dans l’univers du travail sont, nous le savons tous, dans une situation d’extrême précarité, d’autant que leur double situation d’étudiant et de travailleur les place en quelque sorte au milieu du gué.
Contrairement aux autres salariés avec lesquels ils sont appelés à travailler, les stagiaires ne bénéficient d’aucune protection dans le cadre de leur activité professionnelle.
Pour remédier à cette situation de véritable non-droit, il est urgent d’apporter aux stagiaires la reconnaissance de leur spécificité. Nous devons instaurer, pour ce qui relève des activités professionnelles qu’ils réalisent dans le cadre de leur stage, une véritable protection, identique à celle à laquelle ont droit tous les salariés. Cela passe par la création, dans le code du travail, d’un livre qui leur serait spécialement dédié.
Je n’ignore pas que, dans leur ensemble, les organisations syndicales, salariales et étudiantes, n’ont pas encore tranché cette question. Elles considèrent que les stagiaires doivent conserver leur statut d’étudiant, et nous n’entendons pas revenir sur ce point.
Ce que nous tentons de faire, avec cet amendement sans doute perfectible, c’est de tenir compte du principe de réalité. Il suffit d’écouter les stagiaires pour se convaincre qu’elles et ils sont de fait placés dans une situation de dépendance envers leur maître de stage. Ils ne disposent d’aucune protection en cas d’abus, si ce n’est la rupture du stage, qui n’est pas sans conséquence.
En effet, les stagiaires sont les plus précaires des précaires. Je ne citerai qu’un exemple. Dans l’état actuel du droit, un stagiaire dont la durée totale du stage est de six mois – cela n’est pas rien – n’a légalement pas accès aux congés payés. Et en cas de conflit, les stagiaires ne disposent d’aucun recours pour faire reconnaître leurs droits.
C’est pourquoi, en nous inspirant pour partie des dispositions applicables aux apprentis - ces derniers sont de fait des étudiants à qui l’on reconnaît des droits en fonction du leur temps qu’ils consacrent à l’activité professionnelle - nous souhaitons qu’un livre entier du code du travail soit consacré aux stagiaires, afin de codifier le droit aux congés payés, la création d’un congé de préparation aux épreuves scolaires, la compétence de la juridiction prud’homale pour les conflits liés à l’exécution du travail, ou encore l’interdiction légale pour les stagiaires de réaliser des heures supplémentaires, ce qui est plus que légitime compte tenu de la faiblesse des gratifications.
Permettez-moi de revenir sur les objections qui nous ont été opposées en commission.
Certaines dispositions prévues dans cet amendement ont déjà été discutées lors de l’adoption de la loi de 2006. Si nous avons décidé de les reprendre dans cet amendement, c’est qu’elles relevaient soit du domaine réglementaire, ce qui constitue une protection insuffisante, soit du code de l’éducation. Or, comme nous voulons créer dans le code du travail un livre dédié à une véritable protection du stagiaire, il faut que les deux codes se fassent écho.
Enfin, certains craignent que l’adoption de cet amendement n’ait pour effet de priver les stagiaires de leur statut d’étudiant.
Nous avons me semble-t-il fait la démonstration que nos propositions garantissent au contraire le maintien de ce statut. Mais force est de constater que, dans les entreprises, les stagiaires sont placés dans une relation de subordination par rapport à leurs maîtres de stage. Compte tenu de cette relation, il faut leur apporter une protection.