Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, je souhaite rappeler toute l'importance du projet de loi relatif à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire, que j'ai l'honneur de vous présenter en deuxième lecture.
Ce texte rénove en profondeur le cadre législatif applicable aux activités nucléaires et à leur contrôle.Il marque des avancées importantes concernant la transparence en matière de sûreté nucléaire et de radioprotection.Enfin, il crée une Autorité de sûreté nucléaire, chargée de contrôler la sûreté nucléaire et la radioprotection, ainsi que de contribuer à l'information du public dans ces domaines.
Cette loi est particulièrement nécessaire au moment où la France opère des choix importants concernant le nucléaire civil. Un haut niveau de sûreté, l'amélioration continue de celui-ci et la poursuite des progrès en matière de transparence sont les conditions d'un nucléaire au service des générations présentes et respectueux des générations futures. Le Gouvernement est particulièrement attentif au respect de ces conditions, compte tenu de la place qu'occupe le nucléaire dans notre politique énergétique, à côté des économies d'énergie et du développement des énergies renouvelables.
Par ce projet de loi, le Gouvernement met l'accent sur le fait que le ministère de l'écologie et du développement durable est un ministère majeur, qui occupe une place centrale dans le contrôle des activités pouvant présenter des risques pour les personnes et l'environnement.
Ce texte a été examiné en première lecture par le Sénat et l'Assemblée nationale. J'avais déjà salué le travail tout à fait remarquable réalisé par vos rapporteurs, MM. Bruno Sido et Henri Revol, et par votre Haute Assemblée. J'avais également souligné l'ambition et l'équilibre du texte qui en a résulté.
L'Assemblée nationale a conservé cette ambition et cet équilibre. Elle a apporté des améliorations tout à fait utiles, en parfaite cohérence avec celles que le Sénat avait introduites. La qualité du travail parlementaire en première lecture me conduit aujourd'hui à considérer, au nom du Gouvernement, que le texte obtenu est tout à fait satisfaisant.
Permettez-moi d'illustrer avec vous cette appréciation en parcourant les grands objectifs de la loi.
Le premier objectif du projet de loi est de poser les grands principes applicables aux activités nucléaires.
Conformément au souhait exprimé par les assemblées parlementaires et pleinement partagé par le Gouvernement, le projet de loi confirme désormais sans ambiguïté que l'ensemble des grands principes en matière de protection de l'environnement s'applique aux activités nucléaires : les principes de prévention, de précaution, le principe pollueur-payeur, ainsi que celui de participation et d'information du public.
Votre Haute Assemblée y a inscrit le principe fondamental de la responsabilité première de l'exploitant, ainsi que le rôle et les responsabilités de l'État en matière de sûreté nucléaire, de radioprotection et d'information du public. Nous disposons à présent d'un ensemble ambitieux et cohérent, qui décline de manière claire les grands principes de la Charte de l'environnement, faisant partie de notre acquis constitutionnel depuis un an.
Le deuxième objectif est de créer une Autorité de sûreté nucléaire, autorité administrative indépendante chargée, au nom de l'État, de contrôler la sûreté nucléaire et la radioprotection, et de participer à l'information du public.
J'ai déjà indiqué devant la Haute Assemblée pourquoi cette réforme institutionnelle majeure a été voulue par le Président de la République.
L'acceptation des activités nucléaires par le public repose notamment sur la confiance que celui-ci accorde au contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection. Dans la situation actuelle, les services chargés de ce contrôle sont intégralement placés sous l'autorité du Gouvernement, ce qui suscite des interrogations chez certains de nos concitoyens.
Le Gouvernement doit en effet assumer d'autres responsabilités, toutes aussi importantes pour la collectivité. Il doit ainsi veiller à l'approvisionnement énergétique ou jouer son rôle d'actionnaire principal des grands opérateurs du secteur nucléaire.
Il a donc considéré qu'il fallait apporter à ces interrogations une réponse sans ambiguïté. C'est pourquoi le projet de loi donne le statut d'autorité administrative indépendante à la structure chargée, au sein de l'État, du contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection.
L'Autorité de sûreté nucléaire comportera un collège de cinq membres nommés pour six ans par le Président de la République, le président de l'Assemblée nationale et le président du Sénat. Ces membres seront astreints à un devoir d'impartialité.
Le Gouvernement conservera par ailleurs les pouvoirs nécessaires à l'exercice de ses missions essentielles. Il continuera à définir la réglementation s'appliquant aux activités nucléaires. Il continuera également à prendre les décisions individuelles majeures présentant une forte dimension d'opportunité politique, à savoir les autorisations de création et de démantèlement des grandes installations nucléaires.
Il pourra, en cas de risque grave, suspendre le fonctionnement d'une installation et conservera, en cas d'accident, la responsabilité de prendre les mesures de protection de la population.
L'Autorité de sûreté nucléaire sera consultée sur les projets de textes réglementaires. Elle sera chargée du contrôle des activités nucléaires, à la fois des grandes installations nucléaires et des installations nucléaires dites « de proximité », et pourra à ce titre définir des prescriptions techniques individuelles s'appliquant à ces activités. Elle aura également la responsabilité de contribuer à l'information du public sur la sûreté nucléaire et la radioprotection.
Le travail parlementaire a apporté des améliorations particulièrement opportunes au dispositif, tout en préservant son esprit. Je pense notamment aux dispositions visant à améliorer la garantie d'un fonctionnement collégial et d'une réelle solidarité entre les membres du collège, y compris par des mécanismes de sanctions.
Je pense également au renforcement du contrôle du Parlement sur l'Autorité, à l'homologation par les ministres du règlement intérieur de l'Autorité, ainsi qu'à la possibilité pour le Gouvernement d'adresser des demandes à l'Autorité.
Le Gouvernement estime qu'un point d'équilibre satisfaisant est atteint. Cet équilibre apparaît clairement dans l'article 2 bis A introduit par l'Assemblée nationale, qui récapitule les compétences respectives du Gouvernement et de l'Autorité de sûreté nucléaire.
Le troisième objectif est de garantir les conditions effectives de la transparence en matière de sûreté nucléaire et de radioprotection.
L'ambition du projet de loi est de dépasser les incantations trop souvent entendues et de donner un contenu concret à cette notion de transparence. L'intervention de votre Haute Assemblée a été particulièrement riche sur ce sujet et le Gouvernement considère que l'ambition est atteinte.
La transparence, c'est d'abord la mise à la disposition du public d'une information complète sur la sûreté nucléaire et la radioprotection. Des efforts importants en la matière sont faits depuis de nombreuses années sous l'impulsion du Gouvernement, à la fois par les services chargés du contrôle et par les exploitants. Le projet de loi donne un cadre et une légitimité nouvelle à ces efforts.
La transparence, c'est aussi l'existence des conditions effectives du droit d'accès à l'information. Le projet de loi institue un droit d'accès nouveau du public à l'information détenue par les exploitants d'installations nucléaires et les détenteurs de matières radioactives.
La transparence, c'est enfin l'existence de lieux spécifiquement consacrés à l'information et au débat pluriel sur la sûreté nucléaire et la radioprotection. Le projet de loi donne un statut législatif aux commissions locales d'information, les CLI. Il consacre l'implication des collectivités territoriales, notamment des conseils généraux, et pérennise leur financement. Il prévoit enfin la création d'une fédération des CLI pour donner une assise à l'Association nationale des commissions locales d'information, qui existe aujourd'hui.
Le projet de loi a été profondément remanié par votre Haute Assemblée sur ce point. Le dispositif a pris de l'ampleur, et son ancrage dans la société civile et la réalité locale des sites nucléaires est mieux assuré.
Le projet de loi institue également un Haut Comité pour la transparence et l'information sur la sécurité nucléaire, qui est destiné à prendre la relève du Conseil supérieur de la sûreté et de l'information nucléaires. Votre Haute Assemblée a précisé la mission de ce Haut Comité, qui doit avant tout constituer un lieu de débat au niveau national et être, en quelque sorte, le pendant des CLI. Elle a ainsi contribué à clarifier les rôles et les missions des différents acteurs de la sécurité nucléaire.
Le quatrième objectif est de rénover la législation relative à la sûreté des grandes installations nucléaires, les « installations nucléaires de base », et du transport de matières radioactives.
Le constat est connu et partagé : la base législative du contrôle de la sûreté des grandes installations nucléaires est ancienne et incomplète. À côté de cela, la sûreté nucléaire et la radioprotection sont en France à un niveau qui n'a rien à envier aux meilleures pratiques étrangères. Leur contrôle est efficace et sa qualité est internationalement reconnue.
Notre législation n'est donc plus à la hauteur de notre pratique et de nos résultats. C'est l'ambition du projet de loi d'y remédier.
Le travail parlementaire a permis de valider et d'approfondir les améliorations que le Gouvernement avait apportées au projet initial par sa lettre rectificative.
Le texte définit maintenant clairement les intérêts à protéger avec une conception élargie de la sûreté nucléaire qui intègre la prévention des accidents, mais aussi la protection de la santé des personnes et de l'environnement.
Il précise les conditions posées à la délivrance de l'autorisation de création d'une installation. En particulier, il affiche clairement que le « risque zéro » n'existe pas et que les mesures prises ont pour objet de prévenir et de limiter les risques dans le cadre des connaissances scientifiques et techniques du moment, conformément à la Charte de l'environnement.
Le Gouvernement estime que de telles dispositions font partie intégrante de la transparence et du respect que nous devons aux Français.
Le texte donne ensuite à l'Autorité de sûreté nucléaire le pouvoir d'imposer à l'exploitant des prescriptions techniques complémentaires tout au long de la vie de l'installation.
Le Gouvernement considère que le travail parlementaire a permis d'obtenir un texte d'un haut niveau d'exigence et de qualité.
C'est, il faut le dire, un texte attendu depuis de nombreuses années, souvent annoncé, souvent reporté.
Il est indispensable pour fonder le contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection sur des bases solides et pour prendre acte des aspirations de notre société en matière de transparence.
C'est aussi un texte crucial pour que les décisions concernant le nucléaire civil attendues dans les prochains mois ou dans les prochaines années soient prises dans le cadre d'une nouvelle organisation institutionnelle du contrôle propre à renforcer la confiance des Français.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le travail réalisé par votre Haute Assemblée ainsi que par l'Assemblée nationale a permis d'obtenir un texte que le Gouvernement considère comme abouti.