Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, notre Haute Assemblée est donc saisie, en deuxième lecture, du projet de loi relatif à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire. Alors que nous avions adopté ce texte le 8 mars dernier, les députés en ont achevé l'examen le 29 mars.
Je rappelle que ce texte a vocation à donner, pour la première fois dans notre pays, alors que la France est un des leaders mondiaux dans le domaine des activités nucléaires, un corpus juridique stable en matière de régime des installations nucléaires de base.
Surtout, il tend à organiser une véritable transparence pour le fonctionnement de ce secteur, condition sine qua non de son acceptabilité par nos concitoyens.
Enfin, l'autre objectif majeur de ce texte est - nous en avons amplement discuté - de créer une autorité administrative indépendante chargée du contrôle des activités nucléaires en conférant un tel statut à l'actuelle direction générale de la sûreté nucléaire et de la radioprotection.
Bien évidemment, la commission se félicite que, sur le principe, le Parlement ait enfin pu discuter de ce texte, attendu depuis 2002. Surtout, je me réjouis que nous ayons eu, ici, au Sénat un débat de très bon niveau, qui a été constructif.
Les rapporteurs, M. Revol et moi-même, avons abordé - j'espère en tout cas que cela a été ressenti ainsi - l'examen des propositions d'amendements des différents groupes politiques avec la plus grande ouverture d'esprit possible. J'en veux pour preuve le fait que notre Haute Assemblée a adopté des amendements issus de tous les groupes politiques, UMP, UDF, groupes socialiste et CRC, mais aussi des amendements présentés par nos collègues Verts.
Je dirai maintenant quelques mots du travail accompli au Sénat sur les parties du projet de loi dont j'ai la charge en tant que rapporteur, notamment sur la création de l'autorité indépendante.
Je vous rappelle que nous avions essentiellement mieux encadré les conditions d'exercice du pouvoir réglementaire par l'Autorité de sûreté nucléaire et prévu un nouveau cas permettant de mettre fin au mandat d'un des membres du collège de celle-ci, le cas de manquement à ses obligations.
S'agissant du droit à l'information, notre Haute Assemblée a fait reposer l'obligation de communication des documents relatifs à la sûreté et à la radioprotection sur les seules exploitations les plus sensibles, à savoir les installations nucléaires de base.
S'agissant du Haut comité pour la transparence et l'information sur la sécurité nucléaire, nous avons porté à quatre le nombre de parlementaires membres de cette nouvelle instance qui a vocation à se substituer au Conseil supérieur de la sûreté et de l'information nucléaires, le CSSIN. Nous avons également prévu la présence de représentants des organisations syndicales au sein du Haut comité.
D'une manière générale, les députés ont confirmé très largement les grandes orientations retenues en première lecture. S'agissant des titres Ier, II et III, ils ont apporté de nombreuses améliorations rédactionnelles, que la commission approuve pleinement.
Ainsi, ils ont modifié la dénomination de l'autorité de contrôle, baptisée à l'origine « Haute autorité de sûreté nucléaire » et maintenant dénommée « Autorité de sûreté nucléaire ».
De même, ils ont systématiquement remplacé les termes « le ministre chargé de la sûreté nucléaire » par les termes « les ministres chargés de la sûreté nucléaire ». Ils ont ainsi voulu consacrer dans la loi le fait que la tutelle du nucléaire est conjointement exercée par les ministres de l'industrie et de l'écologie.
Enfin, ils ont également remplacé, dans tous les articles, le concept de « transport de matières radioactives » par celui de « transport de substances radioactives » au motif que ce dernier bénéficiait d'une définition juridique.
Au total, ces trois choix rédactionnels expliquent très largement le faible nombre d'articles votés conformes par l'Assemblée nationale alors même qu'une grande convergence de fond résulte des travaux des deux chambres du Parlement.
S'agissant du titre Ier, consacré aux dispositions générales, les députés ont précisé que les activités nucléaires doivent respecter le principe « pollueur-payeur » et le principe de « participation » des citoyens.
Surtout, l'Assemblée nationale a inséré un nouvel article 2 bis A qui dresse la liste des compétences respectives du Gouvernement, des ministres et de l'Autorité de sûreté nucléaire dans le domaine du nucléaire. Il s'agit là d'une initiative judicieuse de nature à apaiser les craintes qui avaient pu être émises dans notre hémicycle sur le dessaisissement supposé de l'État du contrôle du nucléaire. À la lecture de cet article, chacun pourra constater que les rôles des uns et des autres sont clairement établis.
En ce qui concerne les dispositions du titre II qui instituent l'ASN sous la forme d'une autorité administrative indépendante, les députés ont inséré deux articles additionnels fixant respectivement à l'ASN, d'une part, des délais dans lesquels elle sera tenue de rendre ses avis sur les projets de décret et d'arrêté de nature réglementaire, d'autre part, une obligation de publicité pour les avis et décisions délibérées par elle.
Dans le domaine de l'information du public en matière de sécurité nucléaire, régi par les articles du titre III, l'Assemblée nationale a essentiellement modifié les dispositions relatives aux commissions locales d'information et au Haut comité pour la transparence et l'information sur la sécurité nucléaire.
Pour ce qui concerne les CLI, les députés ont prévu que les parlementaires du département seront membres de ces commissions et que, dans le cas où le président du conseil général ne préside pas la CLI, mais désigne un élu local pour cette fonction, ce dernier devra être un élu du département.
Par ailleurs, ils ont autorisé les CLI à procéder à des études épidémiologiques et ont souhaité qu'elles soient informées des demandes de communication de documents en matière de sûreté nucléaire ou de radioprotection qui sont adressées à l'installation nucléaire de base par des citoyens.
S'agissant du Haut comité pour la transparence et l'information sur la sécurité nucléaire, les députés ont fixé à trente-quatre le nombre de ses membres. Ils ont aussi prévu la nomination de cinq personnalités qualifiées, dont trois désignés par l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, une par l'Académie des sciences et une par l'Académie des sciences morales et politiques.
En définitive, les députés ont abordé l'examen de ce texte dans les mêmes dispositions d'esprit que les sénateurs, avec les mêmes préoccupations, les mêmes questions et surtout le même souhait d'être constructifs. Ils ont, comme nous, souhaité redonner une visibilité juridique au secteur nucléaire. Ce but est, je le crois, atteint.
Pour ces raisons, la commission a considéré que la rédaction de ce texte était satisfaisante et pouvait être adoptée en l'état, dans la mesure où les compléments des députés lui sont apparus opportuns et qu'aucun des acquis importants résultant du vote du Sénat n'a été remis en cause.
Je le dis avec force à nos collègues des groupes de l'opposition qui, en commission, ont fait part des réserves que leur inspirait cette orientation, il ne s'agit pas, en l'espèce, de céder à un quelconque diktat qui nous serait imposé de l'extérieur. Nous considérons seulement que le processus parlementaire peut s'arrêter à ce stade dans la mesure où, je le répète, l'équilibre général du texte et sa rédaction nous paraissent véritablement satisfaisants.
C'est pourquoi la commission ne vous propose aujourd'hui aucun amendement et invite la Haute Assemblée à adopter conforme le projet de loi.