Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à en croire un certain nombre d’orateurs et de porte-parole de la majorité – je me réfère notamment à la discussion de ce matin –, la France aurait traversé avec moins d’encombres que d’autres pays les turbulences de l’année 2009, année de la crise, selon la formule qui a été utilisée à compter de l’été 2008 et du krach des subprimes à Wall Street.
Une telle assertion, au moment où nous débattons de l’exécution budgétaire de 2009, appelle quelques observations liminaires.
Pouvons-nous faire croire à la population de notre pays, aux jeunes, aux familles, aux salariés et retraités, que la « crise » a débuté durant l’été 2008 et qu’elle est en voie de disparition, que nous serions entrés, selon le mot-valise de Mme Christine Lagarde, dans l’ère de la « ri-lance » ?
Outre qu’il faudrait s’interroger sur l’étymologie et le sens du mot « crise » – il ne signifie pas nécessairement que tout va mal, mais traduit plutôt une situation de trouble –, la majorité ne pourra pas faire admettre aux 2 millions de chômeurs comptabilisés avant l’été 2008, aux 4 millions de salariés à bas salaire et à temps partiel, aux millions de Français vivant sous le seuil de pauvreté qu’avant la tempête de l’été 2008, nous vivions sous un ciel était serein et sans nuages .
La crise, pour ceux qui auraient tendance à l’oublier ou à le cacher, dure en réalité depuis 1970. Elle a connu des phases d’aggravation, des rémissions plus ou moins nettes, de courtes phases de relance, parfois suivies de pics, mais surtout de creux particulièrement profonds, de l’activité et de l’emploi.
L’été 2008 n’a finalement constitué qu’un épisode particulier, lié à l’éclatement de la bulle des subprimes. Nous avons vécu d’autres épisodes similaires par le passé – bulles de l’immobilier, bulle de l’internet – ayant précipité, selon les cas, le Crédit Lyonnais ou le Nasdaq dans les abîmes.
Cette crise aiguë de l’été 2008 a connu quelques répliques au fil de l’année 2009 et depuis le début de la présente année, la moindre n’étant pas la crise obligataire qui a suivi l’intervention massive des états sur les marchés interbancaires pour assurer un niveau de liquidités susceptible de restaurer un semblant de confiance.
Prétendre aujourd’hui que tout va mieux qu’avant l’été 2008, c’est tout bonnement travestir la réalité !