Intervention de François Baroin

Réunion du 8 juillet 2010 à 14h30
Orientations des finances publiques pour 2011 — Débat sur une déclaration du gouvernement

François Baroin, ministre :

Nous souhaitons également que toutes les dépenses d’intervention, qui représentent 66 milliards d’euros sur trois ans, soient réexaminées pour dégager des économies à hauteur de 10 %.

Le document qui vous a été distribué, mesdames, messieurs les sénateurs, vous montre le détail des réformes proposées. Je voudrais toutefois parer à d’éventuels procès d’intention : nous n’allons pas réduire les minima sociaux ni remettre en cause le RSA ; bien au contraire, il sera, comme prévu, étendu aux jeunes âgés de moins de vingt-cinq ans sous condition d’activité et à l’outre-mer dès l’année prochaine. Car nous voulons aussi un budget juste, équitable. Mais cette équité doit être conciliée avec les impératifs de maîtrise des finances publiques.

Le deuxième acteur devant contribuer à la maîtrise de la dépense est la sécurité sociale. Dans ce domaine, nous procéderons de la même façon que pour l’État, en associant réformes et maîtrise serrée de la dépense.

Je concentrerai mon propos sur trois points : l’assurance maladie, la réforme des retraites, la dette sociale.

Pour ce qui concerne les dépenses de l’assurance maladie, nous ramènerons la progression de l’ONDAM à 2, 9 % dès l’année prochaine.

Nous renforcerons l’efficacité de l’assurance maladie grâce à des innovations récentes. Je citerai, à titre d’exemple, la mise en place des agences régionales de santé, qui doivent permettre d’améliorer le lien entre ville, hôpital et secteur médico-social, ou bien encore les projets de performance des hôpitaux.

Parallèlement à des réformes structurelles, afin de trouver des outils permettant de respecter l’ONDAM, nous avons largement repris les conclusions du rapport Briet.

Le seuil d’alerte, fixé à 0, 75 % aujourd’hui, sera progressivement abaissé à 0, 5 % d’ici à 2012-2013. Le rôle du comité d’alerte sera étendu. Il se prononcera désormais ex ante sur la construction de l’ONDAM et son rôle de veille sur l’exécution de cet objectif sera renforcé. Ensuite, une fraction des dotations sera mise en réserve en début d’année.

Bien entendu, la réforme des retraites est un élément majeur de notre stratégie.

Cette réforme, nous l’avons voulue profonde et juste. Comme la solution démographique ne peut montrer tous ses effets à court terme, nous lui avons adjoint des mesures de recettes ciblées, qui permettent aussi de renforcer l’équité du système. L’augmentation des recettes destinées aux régimes de retraite s’élèverait, selon nos propositions, à 3, 7 milliards d’euros l’année prochaine ; ces recettes supplémentaires proviendraient des hauts revenus, des revenus du capital et des entreprises. Ces mesures feront l’objet du débat qui se déroulera à la fin de cet été.

Cette réforme devrait permettre aux régimes de retraite d’atteindre l’équilibre dès 2018. Elle générera, je vous le rappelle, un gain de 1, 2 point sur le déficit structurel et d’environ 10 points de PIB sur la dette publique à l’horizon 2020.

Le troisième aspect que je souhaite évoquer concerne la dette sociale. Bien que Jean-Jacques Jégou ne soit plus présent en cet instant dans l’hémicycle, je tiens à rappeler sa contribution en la matière : ses propositions aident le Gouvernement à trouver les réponses adéquates dans un contexte tout de même très difficile.

La dette sociale portée par l’ACOSS, l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, pour l’ensemble du régime général et du FSV, le Fonds de solidarité vieillesse, représentera en 2011 environ 87 milliards d’euros : c’est considérable !

Pour remédier à ce problème, nous avons étudié, avec la Commission de la dette sociale, composée de parlementaires, les différentes pistes envisageables. Sans préjuger des arbitrages qui seront rendus cet été, nous avons essayé, avec l’aide de tous les participants de cette commission – je rappelle que les conclusions que le Gouvernement tire de leurs travaux ne les engagent en rien –, de tracer une ligne de crête, évitant les solutions de facilité, tels la reprise de la dette par l’État, l’allongement pur et simple, sans borne, de la durée de vie de la CADES, ou encore le statu quo.

On s’orienterait dès lors vers une reprise de la dette par la CADES, à laquelle devraient être affectées de nouvelles recettes pérennes, sans toutefois casser la reprise en opérant des prélèvements obligatoires trop élevés. Un allongement de la durée de vie de la CADES, mais limité à un strict minimum pourrait donc être envisagé, afin de reprendre la seule « dette de crise », qui représente environ 35 milliards d’euros sur les 87 milliards d’euros mentionnés précédemment. Ce système équilibré ne porterait pas atteinte au pacte de solidarité intergénérationnel. Certes, il n’est pas pleinement satisfaisant, mais force est de constater l’impact de la crise mondiale : ses effets sur l’économie réelle se traduisent par un grand nombre d’emplois détruits et donc par un chômage en augmentation, ce qui pèse inéluctablement, en recettes et en dépenses, sur notre système de solidarité. Nous n’avons d’autre choix que de prendre ce problème à bras-le-corps.

À la fin de l’été, bien entendu, nous évoquerons en détail les mesures d’affectation des fonds résultant de la remise en cause de certaines niches fiscales, ainsi que les perspectives à court terme – les deux prochaines années – et à moyen terme. Je ne doute pas de la qualité des débats qui se dérouleront alors.

Enfin, nous souhaitons que les collectivités locales – troisième acteur – prennent part à la maîtrise de la dépense publique. Ce n’est pas aux membres du Sénat, lieu par excellence de représentation des collectivités territoriales, que je ferai l’affront de rappeler leur rôle dans l’irrigation économique de notre pays de par le poids de leurs investissements dans la dépense publique. Mais le partage des efforts est inévitable et cela signifie, pour les collectivités locales, qu’elles doivent s’habituer à vivre avec des transferts de l’État qui, eux aussi, comme les dépenses des ministères, resteront stables en euros courants sur la période 2011-2013.

Nous tenterons d’y parvenir par le gel des dotations que nous avons évoqué. Toutefois, nous sommes lucides et nous souhaitons aussi accompagner les collectivités locales dans leur rôle d’acteurs économiques. C’est la raison pour laquelle un moratoire sur les normes réglementaires, hors normes européennes, que l’État impose aux collectivités locales, est aussi prévu.

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