Je pense également à la suppression de l’exonération de quinze points de charges sociales des particuliers employeurs et du régime spécifique des structures agréées dans le domaine des services à la personne.
Voilà un exemple de volontarisme en la matière.
S’agissant de cette mesure, j’insiste sur le fait que nous proposons, en revanche, de préserver les avantages pour les personnes fragiles et de maintenir l’avantage fiscal de 50 %.
J’ai utilisé volontairement l’exemple des services et des particuliers employeurs. Maîtriser la dépense publique ne doit pas nous empêcher de maintenir notre soutien ciblé à certains secteurs économiques, pour poursuivre l’autre objectif de notre politique économique : restaurer l’emploi.
Je souhaite maintenant tracer quelques perspectives économiques pour la France pour 2010 et 2011, en rappelant d’abord les grandes caractéristiques de l’environnement international, avent d’indiquer les trois grands principes de la stratégie économique que nous entendons suivre pour l’économie française de l’après-crise.
Le contexte international de l’année 2010 est très varié si l’on en juge par les études menées au sein de l’OCDE ou par le Fonds monétaire international, qui a institué un véritable observatoire des situations économiques à travers le monde.
Les États-Unis tireront profit, comme certains de leurs partenaires, de mesures budgétaires très lourdes qui ont été mises en place à la fin de 2009, alors que nous-mêmes avons fait porter l’effort sur le début de l’année 2009. Le plan américain, entré en vigueur assez tard en 2009, se poursuit en 2010. Le taux de chômage, anormalement élevé pour ce pays, entre 9 % et 10 %, restera ainsi stable cette année.
La croissance devrait s’accélérer un peu en fin d’année. L’INSEE prévoit, pour les États-Unis, un rythme de croissance trimestrielle de l’ordre de 0, 4 %, comme au premier trimestre 2010. Cela correspond à un rythme de croissance annuelle de 2, 9 %.
Les pays émergents, tirés en particulier par l’Inde et surtout par la Chine, compte tenu d’un plan de relance massif, mis en place dès le début de l’année 2009, mais aussi des pays auxquels on pense moins, comme l’Indonésie et le Mexique, qui font partie du deuxième groupe de pays émergents à croissance forte – je pense également à la Turquie – deviendront les moteurs de la croissance mondiale.
Dès 2011, voire dès la fin de 2010, la Chine passera au deuxième rang des puissances économiques. Bien entendu, compte tenu de l’« assiette », cela ne signifie pas pour autant que son produit intérieur brut par habitant avoisinera celui des pays développés, mais, sa puissance économique globale va se traduire désormais par cette deuxième place.
Dans la zone euro, la hausse de l’activité est plus contenue. Le rythme de croissance trimestriel de la zone euro se situe aux environs de 0, 2 %. De l’aveu même du directeur général du FMI, il est difficile d’expliquer pourquoi la croissance de la zone euro est plus modérée que celle des pays à niveau de développement à peu près équivalent, tels les États-Unis.
L’activité en zone euro devrait se redresser un peu au deuxième trimestre, soutenue par le rebond du commerce mondial. Elle serait toujours caractérisée par une grande hétérogénéité entre les zones. Ainsi l’Allemagne et la France sont susceptibles de bénéficier d’un rebond plus important, alors que l’activité en Espagne, en raison de son modèle de développement économique, devrait stagner au cours de toute l’année 2010.
La demande intérieure hors stock de la zone euro se tasserait un peu après l’été, selon l’INSEE, contrairement à ce qui devrait se passer en France, où la demande intérieure est susceptible d’accélérer. Je me fie, en cela, aux chiffres publiés par l’INSEE au mois de juin.
L’examen de ces chiffres confirme donc que la France traverserait le début de l’après-crise plutôt mieux que le reste de la zone euro, tout comme elle avait plutôt mieux traversé la période de crise que l’ensemble de la zone euro, sortant de la récession dès le deuxième trimestre de 2009 et bénéficiant d’un taux moyen de croissance de l’économie de l’ordre de 0, 3 % au cours de la dernière année, étant entendu que des variations sensibles peuvent être enregistrées d’un trimestre à l’autre : c’est ainsi que la croissance a été de 0, 6 % au quatrième trimestre de 2009 et de 0, 1 % au premier trimestre de 2010.
Quand on analyse en détail les différents postes de la croissance du produit intérieur brut français, on s’aperçoit que cette évolution s’explique, à l’évidence, par la décrue de la prime à la casse, d’autant que, si celle-ci a connu un grand succès en France, elle a aussi été appliquée dans un certain nombre d’autres pays.
En tout cas, pour ma part, je préfère retenir, pour déterminer la croissance tendancielle, que le PIB de la France a augmenté de 0, 3 % par trimestre depuis un an.
Pour le reste de l’année 2010, le cadrage macroéconomique que nous avons retenu dans le programme de stabilité de février dernier a efficacement anticipé les prévisions de l’INSEE qui ont été rendues publiques en juin dernier.
Ainsi, l’investissement des entreprises serait en légère progression sur l’année, de l’ordre de 0, 6 %. Cette hausse est modérée, me direz-vous, mais elle constitue un grand progrès par rapport à l’année dernière : vous vous en souvenez, l’investissement des entreprises avait été très affaibli pendant l’année de la crise – il avait diminué de 8 % –, ce qui avait considérablement « plombé » notre croissance.
L’investissement logement des ménages s’améliorerait tout particulièrement à la fin de l’année 2010, et cela avant tout pour deux raisons : d'une part, la politique du crédit est soutenue par des taux d’intérêt qui demeureront bas pendant le reste de l’année 2010 ; d'autre part, certains outils que nous avons mis à la disposition des ménages font sentir leurs effets, notamment le dispositif Scellier et le doublement du PTZ, le prêt à taux zéro, qui permet aux particuliers de s’endetter pour acquérir un bien immobilier.
En outre, la réduction du déstockage soutiendrait la croissance au cours des prochains trimestres.
Par ailleurs, mais, pour auditionner régulièrement des chefs d’entreprises, vous le savez aussi bien que moi, la baisse de l’euro, en particulier par rapport au dollar et au yen, sera de nature à stimuler les exportations. Elle bénéficiera à nos entreprises dont les bases de coûts se situent sur le territoire français.
Dans le domaine de l’emploi, nous constatons quelques éléments de stabilisation.
Le premier trimestre a vu la création de 23 900 nouveaux emplois, contre 7 300 destructions de postes au quatrième trimestre de 2009. Le taux de chômage est resté stable à 9, 5 %. Ces résultats justifient parfaitement notre objectif de créer des emplois dans notre pays.
Sur l’ensemble de l’année 2010, le produit intérieur brut français est susceptible de croître de 1, 4 %. Cette estimation est conforme à nos prévisions antérieures, mais aussi à celles, qui ont été révisées, du Fonds monétaire international, dont les derniers chiffres seront publiés aujourd'hui même, me semble-t-il. En revanche, elles sont légèrement inférieures aux prévisions de l’OCDE, qui s’établissent à 1, 7 %.
En 2010, nous resterons donc dans le cadre des prévisions que nous avions formulées : l’économie française sera passée d’un recul du PIB de 2, 6 % en 2009 à une croissance de 1, 4 % en 2010.
Je le rappelle, les hypothèses d’inflation que nous avions retenues étaient de 1, 2 % en moyenne annuelle. Quant aux prélèvements obligatoires, ils se stabiliseront à 41, 5 % du produit intérieur brut, soit à peu près au même taux que l’année dernière, ce qui signifie que nous ne soutiendrons pas plus – mais pas moins ! – l’activité en 2010 qu’en 2009. D’ailleurs, le déficit structurel serait pratiquement le même, puisqu’il se réduirait seulement de 0, 1 %.
Il s'agit là d’une décision délibérée : nous avons choisi de ne pas accélérer la politique de réduction des déficits à la fin de l’année 2010, mais d’engager celle-ci de manière extrêmement ferme et déterminée dès le début de l’année 2011.
J’en viens, justement, à l’année 2011. La poursuite du rebond cyclique amorcé en 2010 devrait nous permettre d’atteindre un rythme de croissance proche de la tendance de long terme de l’économie française.
Je sais parfaitement, et je comprends ce point de vue, que la prévision de croissance que nous formulons pour l’année 2011 est l’objet de doutes. Toutefois, je persiste à penser qu’elle n’est pas irréaliste, bien qu’elle soit ambitieuse et même audacieuse.
Premièrement, nous nous sommes efforcés de procéder par analogie, en observant ce qui s’était passé lors d’une autre crise grave, en 1993. Cette année-là, le PIB de la France recula de 0, 9 %, mais l’année suivante fut marquée par un net rebond puisque l’augmentation de la richesse nationale, dont on prévoyait qu’elle serait de 1, 4 %, fut de 2, 2 %, l’économie française rejoignant son potentiel de croissance.
Traditionnellement, le rebond économique est aussi fort que le choc a été brutal. Il n’est donc pas totalement inepte de penser que, après une crise aussi grave que celle que nous avons subie pendant l’année 2009, nous puissions fortement rebondir et rejoindre, cette fois encore, notre potentiel de croissance.