Intervention de Alain Vasselle

Réunion du 8 juillet 2010 à 14h30
Orientations des finances publiques pour 2011 — Débat sur une déclaration du gouvernement

Photo de Alain VasselleAlain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales :

Le Gouvernement s’y était alors vigoureusement opposé, au motif qu’une telle augmentation affecterait de manière sensible la compétitivité de nos entreprises, notre économie et le pouvoir d’achat de nos concitoyens.

Selon les calculs que nous avons effectués nous-mêmes, la mesure aurait représenté, pour un smicard, une dépense supplémentaire d’environ un euro par mois. Je ne suis pas persuadé que cette somme aurait eu l’impact évoqué sur le pouvoir d’achat de nos concitoyens.

En tout état de cause, reporter à plus tard l’effort rendra ce dernier d’autant plus douloureux

La preuve en est que, au lieu d’avoir à transférer 20 milliards d’euros, les déficits cumulés du régime général et du FSV atteindront 55 milliards d’euros, voire 87 milliards d’euros si l’on y ajoute les prévisions négatives pour 2011, que vous avez rappelées, monsieur le ministre. C’est là un montant que l’on n’a jamais connu et qui fait peur, s’agissant de la dette qui se sera constituée sur trois exercices pour l’ensemble des branches. Il n’est donc plus possible de différer la reprise de la dette.

Bien entendu, le Gouvernement n’avait pas eu d’autre solution que d’augmenter le plafond de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, l’ACOSS, qui est passé de 30 à 65 milliards d’euros. Dieu merci, il se situera à environ une dizaine de milliards d’euros au-dessous des besoins.

Mais l’ACOSS a-t-elle vocation à supporter la dette d’année en année ? N’a-t-elle pas uniquement pour objet d’assurer la trésorerie des branches et de jouer sur les fluctuations des entrées et des sorties, dans la limite, déjà relativement élevée, de 30 milliards d’euros ?

La Cour des comptes a émis une proposition, qui a été développée devant la commission des affaires sociales, afin que nous présentions une disposition, peut-être d’ordre organique, par laquelle le Gouvernement se verrait contraint de fixer un plafond annuel de 30 milliards d’euros à la dette de l’ACOSS pour ne pas la laisser filer, et d’en confier la gestion à l’Agence.

Je laisse ce point à votre réflexion, mes chers collègues. Pour ma part, je l’étudierai très sérieusement de façon à vous faire des propositions, peut-être dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Par ailleurs, nous nous posons une série de questions.

Quel sera le montant de la reprise de la dette ? J’ai cru comprendre qu’il concernerait seulement les déficits de 2009 et 2010. de 2011 ?

Quel sera l’allongement de la durée de vie de la CADES ? Vous avez indiqué un report de quatre ans de son terme. Nous ne pourrons apprécier la crédibilité de cette durée que lorsque nous connaîtrons les conditions exactes de la reprise.

Quelles ressources affectera-t-on à la CADES ? J’ai noté que vous envisagiez de transférer des recettes de l’ordre d’environ 3, 2 milliards d’euros, niches sociales ou fiscales incluses. Pourquoi pas ?

Cependant, je tiens à attirer votre attention, monsieur le ministre, sur le fait que c’est de la nature des recettes transférées à la CADES que dépendra la crédibilité de la Caisse au regard du marché. Soyons donc vigilants de ce point de vue. Autant la CSG et la CRDS sont des recettes sûres, autant les niches sociales que vous voulez transférer ne présentent pas pour l’instant de garanties suffisantes à cet égard. Je ne les connais pas aujourd'hui et vous-même n’avez pas été en mesure de nous en donner le détail. Nous verrons cela à l’automne. En tout état de cause, assurons-nous qu’elles sont suffisamment crédibles pour que la CADES ne rencontre pas de difficultés sur les marchés qui lui imposeraient des coûts supérieurs à ceux d’aujourd'hui.

Mes chers collègues, si l’on décidait de ne pas allonger la durée de vie de la CADES, il faudrait, pour qu’elle reprenne les déficits du régime général et du FSV des seules années 2009 et 2010, attribuer à la CADES 0, 47 point de CRDS, et donc porter le taux de cette dernière de 0, 5 % à 0, 97 %. Y ajouter les déficits de 2011 impliquerait de le fixer à 1, 24 %.

Plus nous retardons la prise en compte des déficits, plus nous nous rapprochons de la fin de durée de vie de la CADES et plus le montant progresse d’année en année ; de ce fait, plus l’effort que nous demanderons à nos concitoyens sera élevé.

Telle est la raison pour laquelle nous avions demandé d’amorcer déjà cette opération l’année dernière.

Mais ne parlons pas d’augmentation de la CRDS, puisque le Gouvernement n’en veut pas.

Cela étant, j’imagine difficilement que nous n’ayons pas à y procéder un jour ou l’autre, parce que, si nous sommes en voie de régler le problème concernant une partie de la dette, celle de la branche vieillesse, qui devrait parvenir à l’équilibre en 2018, le reste de la dette va continuer à courir. Il s’agit, je le rappelle, de celle de la branche maladie, de la branche famille et de la branche accidents du travail et maladies professionnelles. Il faudra donc bien que nous trouvions une solution également pour cette dette.

Pour que nous puissions apprécier avec pertinence les propositions que vous nous ferez, il est donc essentiel qu’au moment où nous examinerons la loi organique nous ayons connaissance des trois textes, en particulier le projet de loi portant réforme des retraites et le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011.

En effet, comment pourrions-nous fixer la durée de vie de la CADES et nous déterminer sur la viabilité de ce que vous nous proposez si nous n’avons pas toutes les données pour ce faire ?

En deuxième lieu, j’aborderai, brièvement, le chantier des retraites.

Notre mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale, la MECSS, a travaillé pendant plusieurs mois à la préparation du rendez-vous de 2010. Elle a présenté un rapport, après avoir procédé à une quarantaine d’auditions.

Nous avons pris note du fait que le Gouvernement souhaitait jouer sur les paramètres, sans s’engager pour le moment dans une réforme structurelle.

La commission des affaires sociales considère, pour sa part, que, outre le problème de la pénibilité et la question de l’emploi des seniors, on ne peut évacuer la nécessité de se pencher sur une éventuelle réforme structurelle du système de retraites. Plusieurs pistes doivent être explorées : l’harmonisation progressive des paramètres et des règles de calcul entre régimes, le rapprochement des gouvernances, le renforcement du droit à l’information des assurés, ainsi que l’organisation d’un large débat national. Ce dernier permettrait d’envisager le passage progressif à un système par points, dans lequel d’autres pays de l’Union européenne, comme la Suède et l’Allemagne, se sont engagés.

Pourquoi la France ne mènerait-elle pas une réflexion afin de rechercher une formule susceptible de convenir à l’ensemble de nos concitoyens ?

En troisième lieu, j’évoquerai le chantier de l’assurance maladie.

Une réflexion a été menée sur l’ONDAM. Dans le rapport qu’il a établi à la suite d’une demande du Président de la République formulée lors de la première Conférence nationale des finances publiques, en vue de trouver des solutions permettant de mieux contenir les dépenses de l’assurance maladie, M. Briet a livré plusieurs propositions intéressantes.

Elles sont d’ailleurs mises en œuvre dès cet exercice 2010, puisque, en 2009, les dépenses relevant de l’ONDAM ont progressé de 3, 7 %, alors que l’objectif fixé dans la loi de financement de la sécurité sociale était de 3, 3 %. Pour 2010, le comité d’alerte a déjà identifié un risque de dépassement de 600 millions d’euros. Le déficit de la branche, supérieur à 10 milliards d’euros en 2009, sera de l’ordre de 13 milliards d’euros en 2010. Il va donc falloir prendre des dispositions pour essayer de contenir l’ONDAM dans les années futures.

L’idée a été avancée de revoir le seuil d’alerte – vous l’avez rappelé, monsieur le ministre –, en l’abaissant à 0, 5 % de l’ONDAM, contre 0, 75 % actuellement, et de faire appel à des experts afin de déterminer si les hypothèses présentées dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2010 étaient crédibles.

Il a été également prévu de mettre en réserve, en début d’année, des dotations s’apparentant à des crédits budgétaires. C’est ce qui a été déjà proposé dans ce même projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2010.

Toutefois, pensez-vous, monsieur le ministre, que ces trois mesures proposées dans le rapport Briet seront suffisantes pour contenir l’évolution des dépenses d’assurance maladie ?

Un autre dossier important a été abordé, celui de l’hôpital, avec la loi « Hôpital, patients, santé, territoires », dite loi HPST, et la création des agences régionales de santé, les ARS.

On le voit bien, la mise en route et le fonctionnement de ces dernières sont laborieux. Les missions qui leur ont été confiées sont si nombreuses et leur champ d’intervention si large qu’elles auront du mal, me semble-t-il, à faire face à ces compétences et à traduire en résultat concret les économies de dépenses que nous attendons au travers de la gestion du risque pour ce qui concerne l’assurance maladie.

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