...- on en reçoit beaucoup ces temps-ci -, on devient magistrat non pas au prix d'un concours mais au prix du couronnement d'une véritable carrière d'avocat, parce que l'on a « fait ses preuves ». Ces magistrats échappent dès lors à cet excessif particularisme qui caractérise notre magistrature et qui nourrit fatalement des réactions de caractère corporatiste. J'emploie cet adjectif non pas de manière blessante, mais simplement pour caractériser une situation dans laquelle un certain corps vit tout au long de la carrière en vase clos.
Sans aller jusqu'à imiter le système anglais, ce qui serait sans doute bousculer excessivement nos habitudes, est-il inconcevable de poser en principe général que nul ne peut devenir magistrat s'il n'a pratiqué d'autres activités dans des fonctions de responsabilité, de préférence non judiciaires d'ailleurs, pendant une période assez longue - de cinq à dix ans - pour avoir éprouvé concrètement ce que sont les réalités de la vie et appris à discerner le réel des apparences, le bon du mauvais, et à peser la charge d'humanité dont tout litige est porteur ?
J'ai déposé en ce sens un amendement, qui nous donnera, en tout cas, l'occasion d'approfondir cette question.
Est-il nécessaire d'ajouter immédiatement que cette exigence d'expérience ne diminue en rien et exclut moins encore l'exigence de la formation juridique et de la qualification qui la sanctionne ?
Je me heurte cependant ici à une autre difficulté, aussi fondamentale qu'imprévue, et qui, j'en suis sûr, en surprendrait plus d'un dans cette séance si toutefois nous étions assez nombreux, ce qui n'est pas tout à fait le cas.
Il paraît qu'on peut de nos jours devenir magistrat sans avoir fait réellement des études de droit !