Cette anecdote en dit long sur le travail qu'il reste à accomplir. Et je ne parle pas de la mobilité dans les carrières, bien que ce magistrat soit toujours au même poste !
S'agissant du régime disciplinaire, notre groupe se félicite des mesures prises en matière de mobilité, et notamment de la disposition que nous proposera la commission des lois afin de faciliter la nouvelle obligation de mobilité pour l'accès aux postes les plus élevés, hors hiérarchie.
En fin de législature, il n'était sans doute pas opportun de trancher le débat en réformant le régime de la responsabilité civile des magistrats. Soit ! Je me range donc avec satisfaction aux conclusions pertinentes de notre éminent président et rapporteur, M. Jean-Jacques Hyest.
Notre groupe souscrit pleinement à ses propositions, qui parviennent à un juste équilibre entre respect de l'indépendance de l'autorité judiciaire et exigence de responsabilité accrue des magistrats.
Ainsi, le dispositif qui nous est proposé va pleinement dans le sens qui doit animer le législateur. Il sera simple à mettre en oeuvre et renforcera la confiance de nos concitoyens en notre justice. Ils ne pourront plus la qualifier d'opaque lorsqu'ils s'estimeront lésés par le comportement d'un juge de l'ordre judiciaire.
La commission de transparence de la justice qui nous est proposée par M. Jean-Jacques Hyest permettra un meilleur accès à la justice, car elle se substitue au triple filtre initial constitué par le triptyque parlementaire, médiateur, ministre de la justice ou chef de juridiction. En saisissant directement cette instance, le justiciable aura la certitude d'obtenir une réponse circonstanciée et, le cas échéant, la transmission de la plainte au garde des sceaux aux fins de saisine du Conseil supérieur de la magistrature.
Nous approuvons également sa composition. En effet, pour éviter toute complaisance corporative, cette autorité collégiale rassemblera des personnalités dont la majorité devra ne pas appartenir au corps de la magistrature.
Mais le véritable enjeu, et il dépasse largement les prérogatives du seul législateur, est celui de la formation des magistrats, comme Pierre Fauchon vient si brillamment de le rappeler avec moult détails.
Bien évidemment, il ne s'agit pas pour notre groupe de remettre en cause l'excellence de la formation que bon nombre de pays nous envient et qui honore l'École nationale de la magistrature. Cependant, il nous semble qu'un effort considérable doit être mené dans les prochaines années afin que les générations qui sortiront des écoles de magistrature, d'avocats, mais également des écoles de police ou de gendarmerie, apprennent à mieux se connaître, à se comprendre et à respecter mutuellement leurs fonctions et leur rôle dans la chaîne judiciaire. Ce qui frappe les étrangers qui viennent étudier chez nous, c'est justement l'existence de ces frontières quasi infranchissables entre les différents corps.
Il est essentiel d'huiler notre chaîne judiciaire pour améliorer son fonctionnement. Il faut offrir cette chance aux futures générations qui sortiront de leurs écoles respectives dans les années à venir. Elles doivent apprendre à se comprendre et à se respecter. Voilà l'enjeu pour le futur immédiat, et il n'est pas négligeable.
Aussi, nous nous félicitons des dispositions du projet de loi organique qui ont pour objet d'allonger la durée du stage en cabinet d'avocat et de l'identifier plus clairement au cours de la scolarité. Cependant, à la lecture des réactions négatives des courriers de magistrats, retraités ou encore en exercice, que nous recevons sur cette simple mesure, je me dis que le chemin à parcourir est encore long. Notre conviction n'en est pas pour autant entamée.
D'ailleurs, pourquoi devrait-on limiter cette mesure aux seuls cabinets d'avocats ? Un stage dans un commissariat de police ou dans une brigade de gendarmerie serait tout aussi formateur pour ceux qui se destinent aussi bien au parquet qu'au siège.
Nous ne pouvons pas non plus passer à côté du défi de la réforme de la formation des magistrats. L'excellence de ce corps passe par une modernisation désormais nécessaire des enseignements. Il est en effet inconcevable qu'il n'y ait ni droit comparé, ni criminologie, ni droit international privé dans les matières enseignées. L'École nationale de la magistrature ne peut pas vivre en vase clos.
Il faudra réfléchir dans les délais les plus brefs aux aménagements nécessaires. Je ne doute pas que notre commission des lois jouera son rôle d'éclaireur en la matière et prendra toute sa part à ce débat.
Je souhaiterais aborder tout de suite le droit de réserve, car il a suscité un certain émoi, tant parmi certains de nos collègues que dans la presse locale.
Nous sommes nombreux à considérer comme totalement inadmissible que des magistrats puissent outrepasser leur devoir de réserve pour investir le champ de la politique.