La remise en cause du droit de grève ne réglerait rien en termes de qualité de service. En revanche, il s'agirait d'une atteinte très directe et dangereuse aux principes même de la démocratie.
De plus, la restriction du droit de grève pourrait permettre d'imposer des réformes qui nuiraient aux salariés et aux usagers du service public en limitant la contestation dans sa manière visible. Ce serait une perversion des rapports de force au sein de l'entreprise et un déni de démocratie.
Acquis populaire et démocratique, le droit de grève, liberté individuelle et collective, a, depuis 1946, valeur constitutionnelle : « Le droit de grève s'exerce dans le cadre des lois qui le réglementent ». Or ces lois existent ! Ainsi, la loi de 1963 a instauré le préavis de cinq jours dans les services publics et celle du 19 octobre 1982 fait obligation d'ouvrir les négociations en cas de préavis de grève.
L'exercice du droit de grève est une liberté publique. C'est la raison pour laquelle la jurisprudence rejette, en invoquant l'ordre public social, les clauses conventionnelles qui le restreignent. Quoi qu'il en soit, nous n'avons pas besoin de le réglementer davantage. Il convient plutôt d'améliorer les conditions de travail, le recrutement et le statut des personnels, de développer les missions de service public.
On ne peut continuer dans la voie régressive. Ce serait oublier que les Français sont très attachés au service public et aux acquis qui fondent notre société dite développée.
Faut-il rappeler que les mouvements sociaux qui ont débouché sur les plus grands acquis furent souvent ceux que l'on avait interdits ou qui s'opposaient à la législation de l'époque ?
Les grèves sont parfois un élément essentiel du progrès social. Il s'agit d'un droit utile. En ce sens, le droit positif n'est que le résultat de rapports de force à un moment donné, dans lesquels les citoyennes et les citoyens restent la force la plus légitime et la plus déterminante. C'est le fondement même de la démocratie. Par exemple, les accords de Grenelle, après la grève générale de 1968, ont bénéficié à l'ensemble de la population. Ce fut une véritable amélioration des conditions de vie, un vrai progrès social pour tous.
La volonté de remodeler la société française selon les principes ultralibéraux a au moins une limite : les principes économiques imposés ne sont ni socialement ni humainement efficaces ; les femmes et les hommes de ce pays s'en rendent compte tous les jours.
Remettre en cause un droit fondamental, c'est remettre en cause les fondements même de la démocratie. Et ce débat n'apporte aucune solution concrète aux problèmes du service public. Avant tout, il convient de redonner du sens au service public, d'en renforcer les moyens, les effectifs, et de prendre toutes mesures susceptibles de favoriser le climat social.
Si un projet de loi instaurant un service minimum dans les transports devait finalement venir en discussion devant le Sénat, le groupe communiste républicain et citoyen le combattrait, comme il se doit, au nom des principes constitutionnels et des fondements de la démocratie. Et je pense que nous ne serions pas les seuls.