Monsieur le ministre, la politique des pôles de compétitivité est une politique essentielle à double vocation de croissance et d'aménagement de notre territoire à laquelle le Gouvernement s'est employé depuis deux ans avec un grand volontarisme que je voulais saluer.
Je veux également féliciter de son initiative le président de la commission des affaires économiques, M. Jean-Paul Emorine.
On ne peut que saluer l'initiative de séances du Sénat consacrées ces dernières semaines au bilan d'application de la loi d'orientation agricole, de la loi sur les PME la semaine prochaine, par exemple, tant il est vrai qu'une bonne loi est d'abord une loi appliquée. Il est important, à mon sens, que les Français puissent disposer, par l'intermédiaire de leurs élus, d'éléments de transparence et de tangibilité dans leur quotidien et qu'ils sachent ce que fait concrètement le législateur pour eux, au bénéfice de leur quotidien immédiat et de leur avenir.
Aujourd'hui, monsieur le ministre, je suis particulièrement heureux d'intervenir sur le sujet précis des pôles de compétitivité dont le succès est à mettre au compte du Gouvernement, de plusieurs de ses ministres, puisqu'il s'agit d'un sujet transversal. Ce succès est incontestable et très prometteur pour notre avenir.
Avec la politique des pôles de compétitivité engagée à la fin de l'année 2004, il s'agissait de décloisonner les rapports entre les entreprises et les organismes de recherche. Il s'agissait aussi de mieux irriguer les territoires.
Je voudrais revenir successivement sur ces deux objectifs, éminemment complémentaires, en insistant toutefois sur la dimension de l'aménagement du territoire, très importante pour mon département.
Tout d'abord, les pôles de compétitivité doivent être des outils de croissance.
D'une part, en aidant et en soutenant des initiatives privées identifiées par leurs qualités et potentialités qui, pour l'occasion et de façon relativement nouvelle, se coordonnent et mutualisent leurs énergies et savoir-faire, au moyen d'investissements, de fonds publics, on table sur l'avenir et part du principe qu'à plusieurs on est forcément plus forts.
D'autre part, en promouvant l'innovation, on met l'accent sur cette exigence qu'ont l'ensemble des pays développés avec la France, de créer des produits, de fournir des services à forte valeur ajoutée plutôt que des produits à coûts réduits.
C'est ainsi que la France, l'Europe et les pays développés sont et seront en mesure de rivaliser dans la compétition internationale.
Il est clair que de notre capacité d'innovation dépend notre avenir et, face à la compétition internationale, les entreprises ont tout intérêt à s'organiser en groupes coordonnés et complémentaires, mieux à même d'imaginer l'avenir et d'anticiper les besoins.
Par ailleurs, je voulais insister sur l'avantage d'avoir privilégié un cadre juridique relativement souple pour ces pôles de compétitivité. La structure de ces pôles est adaptée aux spécificités et aux compétences des entreprises regroupées.
L'intervention des acteurs publics n'est prévue qu'en tant que de besoin pour sélectionner, aider au financement, puis évaluer, et ce sans trop alourdir le processus de décision. C'est là quelque chose de tout à fait exemplaire dans un domaine, l'innovation, où les retards que pourrait constituer la lourdeur administrative se paient très chers sur la concurrence étrangère.
Les pôles de compétitivité apparaissent donc comme une réponse à la mondialisation, où l'innovation est mise en valeur et promue, où le regroupement est la règle avec la mise en commun de savoir-faire différents et complémentaires.
Je regretterai, toutefois, que les parlementaires ne soient pas davantage impliqués dans la démarche décisionnelle, lorsqu'ils ne sont pas président de département ou de région, et je me permettrai de suggérer de les impliquer davantage, formellement, dans le processus décisionnel même si rien ne leur interdit d'intervenir, comme aujourd'hui devant vous.
L'autre petit bémol que je souhaiterais émettre, monsieur le ministre, concerne les PME et les TPE familiales.
En effet, les petites et moyennes entreprises paraissent rencontrer quelques difficultés à trouver leur place dans les pôles de compétitivité, alors qu'elles sont très nombreuses dans les rangs des entreprises innovantes. C'est d'ailleurs ce qui ressort d'une enquête conduite entre la mi-2005 et la mi-2006 par le comité Richelieu, association regroupant 160 PME de haute technologie : les PME sont certes très bien représentées dans les pôles de compétitivité, mais, d'une part, ce sont pour beaucoup des filiales de grands groupes et, d'autre part, sur les 323 projets qui sont actuellement financés dans les grands pôles, seuls 101 sont portés par des PME. La cause principale de cette situation serait, toujours selon cette étude, que les PME seraient trop peu représentées dans les commissions habilitées à labelliser les projets.
J'aimerais, monsieur le ministre, que vous nous disiez ce que les conclusions de cette étude vous inspirent.
Cependant, je ne saurais terminer sur les PME sans évoquer deux avancées très importantes autant que favorables qui sont intervenues au courant de l'année 2006, sur l'initiative du Gouvernement : d'une part, au début du mois de septembre, la modification du code des marchés publics, qui devrait, je l'espère, faciliter l'accès des PME à la commande publique ; d'autre part, surtout, l'amélioration significative du mode de calcul du crédit d'impôt recherche introduite dans la loi de finances pour 2007.
Je voudrais maintenant évoquer la politique des pôles de compétitivité telle qu'elle est appliquée dans mon département, le Cher, où, à ce jour, plusieurs entreprises sont associées à des pôles labellisés depuis 2005 : le pôle « Céramique », localisé à Limoges ; le pôle « ViaMéca », sis à Lyon ; enfin, le pôle « Sciences et techniques de l'énergie électrique », rattaché à Tours.
Monsieur le ministre, mon département, territoire au développement économique fragile, est situé dans une zone géographique où l'accès aux grands réseaux de communication n'est pas toujours évident. Vous comprendrez dès lors que j'insiste - deuxième point sur lequel je voulais intervenir - sur la nécessité de soutenir davantage ces entreprises innovantes, c'est-à-dire sur la vocation d'aménagement du territoire de ces pôles.
Or, force est de constater que les pôles les plus importants sont implantés dans les régions naturellement les plus favorisées : Île-de-France, Rhône-Alpes, notamment. C'est en soi, bien évidemment, une bonne chose, mais le risque est réel que les disparités interrégionales s'accentuent.