Cet amendement, que mon groupe a déjà défendu à plusieurs reprises, ne suffira certes pas à lui seul à endiguer toute forme de racisme, j’en conviens. Il peut néanmoins contribuer à faire changer les mots et peut-être même les discours. Cela prend tout son sens dans un texte relatif à l’audiovisuel, qui plus est public.
Voilà quelques années, mon groupe avait déposé une proposition de loi tendant à supprimer le mot « race » de tous nos textes de loi. On lui avait alors répondu qu’il était urgent d’attendre, une telle disposition rendant obligatoire la modification de nombreux codes et de la Constitution.
Nous avons déjà manqué cette occasion lors de la réforme constitutionnelle.
Faire de nos lois un élément exemplaire de lutte contre la discrimination en supprimant de leur rédaction le mot « race » est un premier pas que nous devons franchir.
Les avancées scientifiques, dont certaines ont été évoquées à l’instant, doivent constituer, pour le législateur, de réels points d’appui. Il nous faut utiliser les connaissances nouvelles pour rompre définitivement avec une page de notre histoire au fil de laquelle, nous le savons bien, afin d’asseoir la domination d’une société sur l’autre, on a tenté d’établir des distinctions.
Aujourd’hui, le concept qui défendait l’existence d’une hiérarchie en recourant notamment à la notion de « race » n’a plus la moindre légitimité scientifique et, depuis près de quarante ans, de nombreux chercheurs ont démontré que, dans la famille humaine, il n’y avait pas de « races ».
Il est bon de rappeler que c’est en 1939 qu’est apparue une telle notion dans notre législation, mais que c’est sous le régime de Vichy que le mot « race » a trouvé une définition juridique dans les lois du 3 octobre 1940 et du 2 juin 1941.
Depuis, dans notre pays, le législateur n’a eu de cesse – dans une volonté de progrès, je le concède – de recourir à cette notion pour proscrire justement les discriminations fondées sur la race, ce qui a eu pour effet, au final, d’entériner cette notion.
Pis encore, dans les différentes lois où ce mot apparaît, il est suivi ou précédé des mots « religion », « nation », « ethnie » ou « origine ». Autrement dit, pour le législateur, la race est une donnée objective, aussi objective que l’appartenance à une religion, à une nation ou à une ethnie.
Par cet amendement, nous entendons supprimer du vocabulaire de ce projet de loi toute référence à une notion que nous jugeons insoutenable.
Aussi, je vous demande d’ouvrir cette brèche afin de voir bannir à jamais toute thèse qui soutiendrait l’existence d’une « race supérieure », au nom de laquelle beaucoup de crimes pourraient être commis, comme cela s’est déjà malheureusement produit.