Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la formation professionnelle est un enjeu essentiel. Dans un monde ouvert aux échanges, la compétitivité d’un pays repose en grande partie sur la qualification de sa population.
L’enjeu économique se double d’un enjeu social. La formation professionnelle ne conditionne pas seulement aujourd’hui l’accès à l’emploi. Elle détermine pour chacun la possibilité de se maintenir dans celui-ci par l’adaptation de ses connaissances au rythme de l’évolution du progrès technique et de la recomposition des métiers. Elle s’affirme ainsi comme l’instrument majeur de la sécurisation des parcours professionnels.
Dans un discours prononcé après son élection, le Président de la République a déclaré son intention de revoir notre système de formation non seulement parce que la formation professionnelle est une « nécessité économique », mais également parce que « c’est le droit à la seconde chance, […] un modèle de société où, à tout moment, on peut remonter dans l’ascenseur social ».
La formation professionnelle doit, en effet, offrir une possibilité de promotion professionnelle et sociale à chaque salarié. Elle constitue une chance pour celui qui souhaite évoluer dans son emploi, et un atout pour celui qui doit en trouver un autre.
Car la vie professionnelle ne peut plus se résumer à une carrière linéaire, comme à l’époque où les bases du droit à la formation ont été posées. Personne ne peut être assuré qu’il passera toute sa vie dans la même entreprise, qu’il fera le même métier, ou que sa vie professionnelle se déroulera sans rupture. Il s’agit bien désormais d’un véritable parcours.
Or, alors que les enjeux sont considérables et que la France consacre chaque année 27 milliards d’euros à la formation professionnelle, notre système de formation n’a plus l’efficacité souhaitée.
J’ai participé, en 2007, à une mission d’information présidée par notre collègue Jean-Claude Carle. Le rapport publié par la suite, souvent cité depuis, a dénoncé « la grande complexité, les cloisonnements et les corporatismes » – les fameux trois C – de notre système de formation professionnelle. Son plus grave défaut est sans doute d’être fortement inégalitaire, comme l’a rappelé M. le secrétaire d’État. En effet, un ouvrier sur sept bénéficie d’une formation selon ses besoins, alors qu’un cadre sur deux aura l’opportunité de se former.
Quant aux salariés des PME et à leurs entreprises, ils financent la formation professionnelle sans en bénéficier. La probabilité de se former pour le salarié d’une entreprise de moins de 10 salariés est cinq fois moindre que celle du salarié d’une entreprise de plus de 500 salariés.
On sait par ailleurs que 75 % des demandes de formation des chômeurs n’aboutissent pas, alors même que la formation professionnelle est considérée, depuis près de trente ans, comme l’une des clés de la réinsertion dans l’emploi et comme l’un des meilleurs outils au service de la lutte contre le chômage.
Réformer la formation professionnelle, qui a une longue histoire, n’en est pas moins difficile, car le dispositif de formation est très complexe et fonctionne par compartiments.
La qualité du dialogue social engagé par l’État est un gage de réussite de la réforme. Je souhaite à cet égard souligner que l’accord conclu entre les partenaires sociaux le 7 janvier dernier a été adopté à l’unanimité. Cette réforme doit donc nous rassembler, au-delà des clivages politiques.
Comme nous l’a expliqué M. le secrétaire d’État, le projet de loi est sous-tendu par trois objectifs : assurer une plus grande justice du système, garantir l’emploi ou les conditions d’un retour à l’emploi, la transparence du dispositif, sa lisibilité et son évaluation.
Je me réjouis des principales orientations du projet de loi.
Tout d’abord, la création du fonds de sécurisation des parcours professionnels, qui aura vocation à financer la formation des demandeurs d’emploi, permettra la formation de 500 000 salariés peu qualifiés et de 200 000 demandeurs d’emploi supplémentaires. Ce fonds collectera 900 millions d’euros par an.
Ensuite, et c’est un autre point majeur, la réorientation de la formation professionnelle vers les petites et moyennes entreprises réduira les inégalités. En effet, les sommes que versent les entreprises de moins de cinquante salariés au titre de la formation seront « sanctuarisées ». Au total, chaque année, 1, 2 milliard d’euros du plan de formation sera exclusivement consacré à la formation dans ces entreprises.
Enfin, je souhaite souligner l’importance de la réforme du statut des organismes collecteurs paritaires agréés, ou OPCA, dont il faut réduire le nombre et mieux contrôler l’action. La diminution du nombre des OPCA devrait permettre de simplifier la mécanique financière d’une complexité effarante qui régit actuellement la collecte des fonds et de réduire les dérives ainsi que les frais de gestion. Je rappelle que, chaque année, les frais de fonctionnement des OPCA représentent environ 9, 9 % de la collecte, soit 600 millions d’euros.
Sur ce point, la commission spéciale a apporté plusieurs améliorations notables. Elle a ainsi instauré l’obligation de conclure une convention d’objectifs et de moyens entre chaque OPCA et l’État. La part prélevée pour les frais de gestion de l’OPCA sera conditionnée à un véritable exercice de programmation et d’évaluation des performances. Il s’agit de tenir compte de la situation particulière de chaque organisation et de garantir à chacune d’elle les moyens nécessaires à son fonctionnement, tout en maîtrisant mieux les dépenses.
Je ne reviens pas sur tout ce qui a déjà été dit, mais je veux souligner l’importance qu’il y avait à élargir le débat sur la question de l’orientation, sujet introduit dans le projet de loi par les députés.
L’idée de la mise en place d’un système de labellisation des organismes d’information et d’orientation est pertinente. La France compte en effet plus de 8 500 organismes d’orientation. Dans ces conditions, il est difficile, il faut l’avouer, de se retrouver dans ce labyrinthe.
La commission a souhaité modifié les dispositifs de labellisation. Les organismes devront offrir leurs services à « toute personne intéressée » et non pas seulement aux personnes s’engageant dans la vie active. Cette mesure permettra de viser les lycéens et les étudiants et de faire un lien entre formation initiale et formation continue.
Nous avons également pris en considération certaines mesures proposées par le Livre vert de la commission de concertation sur la politique de la jeunesse, présidée par Martin Hirsch. Ainsi, un amendement adopté en commission permettra de lancer l’expérimentation d’un livret de compétences. Dans les établissements d’enseignement volontaires, chaque élève disposera pendant trois ans d’un livret de compétences mentionnant ses connaissances, ses liens avec des activités associatives, sportives ou culturelles, ainsi que ses expériences de découverte du monde professionnel. Ce livret sera pris en compte au moment de l’orientation et il pourra suivre la personne dans la vie active.
J’ajoute que l’école devrait développer des liens plus étroits avec le monde de l’entreprise, …