Intervention de Jean-René Lecerf

Réunion du 4 octobre 2006 à 15h00
Contrôle de la validité des mariages — Discussion d'un projet de loi

Photo de Jean-René LecerfJean-René Lecerf, rapporteur :

Les dispositions nouvelles applicables à tous les mariages célébrés sur notre territoire, quelle que soit la nationalité des époux, ne posent guère de problème, qu'il s'agisse de l'ordre dans lequel doivent être accomplies les formalités préalables au mariage, de la constitution du dossier à la publication des bans, ou de l'amélioration des conditions de réalisation de l'audition des futurs époux.

Ce projet de loi comble également un vide juridique en faisant de l'obligation pour les futurs époux de présenter une identité officielle une exigence légale.

C'est assez surprenant, mes chers collègues, mais, comme M. le ministre l'a rappelé tout à l'heure, en l'état actuel du droit, l'officier d'état civil ne peut, sous peine de commettre une voie de fait, refuser de célébrer un mariage si les futurs époux se refusent à produire une quelconque pièce d'identité.

Votre rapporteur aurait même souhaité aller un peu plus loin sur ce point - mais la commission ne l'a pas suivi -, en prévoyant que l'identité des futurs époux devrait être justifiée par le seul moyen de la carte nationale d'identité ou du passeport, à l'exclusion de toute pièce délivrée par une autorité publique.

Le récent rapport de la mission d'information de la commission des lois du Sénat sur la nouvelle génération de documents d'identité et la fraude documentaire, présidée par Charles Guené et dont j'étais le rapporteur, préconise de retenir la carte d'identité et le passeport comme seuls documents valant justificatif d'identité pour l'ensemble des relations avec l'administration, tant le niveau de sécurité présenté par les autres documents se révèle évanescent.

Je sais bien que, à ce jour, la carte nationale d'identité n'est pas obligatoire. Toutefois, par cette remarque incidente, je souhaite me montrer cohérent avec nos travaux antérieurs et donner au Gouvernement l'occasion de s'exprimer sur la question.

Les dispositions essentielles du présent projet de loi concernent les mariages contractés par des Français à l'étranger. Elles privilégient les contrôles antérieurs à la cérémonie, dans la mesure où le Français désirant se marier devant une autorité étrangère devra obtenir préalablement un certificat de capacité à mariage attestant qu'il a accompli les formalités requises, notamment l'audition.

Les conditions de la transcription du mariage dépendront de l'octroi de ce certificat, ce qui se révèle d'autant plus essentiel que le projet de loi fait désormais de la transcription une condition de l'opposabilité du mariage en France, à tout le moins à l'égard des tiers.

Enfin, le projet de loi prend acte de l'échec de la procédure de vérification des actes de l'état civil étranger instaurée par la loi du 26 novembre 2003. Trop complexe, ce mécanisme de sursis administratif et de vérification par le procureur de la République de Nantes est resté inutilisé.

La mission d'information que j'évoquais précédemment avait constaté la validité incertaine de bon nombre d'actes de l'état civil établis à l'étranger. Ainsi, en 2001 et 2002, le ministère des affaires étrangères a tenté d'évaluer la réalité du phénomène en consultant certains de ses postes consulaires, en particulier en Afrique francophone. Il a conclu, par exemple, que le nombre d'actes irréguliers, falsifiés ou inexistants représentait une part considérable de ceux qui étaient présentés aux agents diplomatiques et consulaires - de l'ordre de 32 % au Niger, 60 % en Guinée et 90 % en République démocratique du Congo ou aux Comores.

Le Gouvernement entend donc mettre en place une nouvelle procédure plus efficace de sursis à statuer et de vérification, dont il prévoit de préciser les modalités par décret.

Tout en approuvant, sur le fond, la simplification souhaitée par le Gouvernement, la commission estime, en revanche, que le nouveau dispositif doit être explicitement prévu dans la loi. Elle vous présentera donc un amendement dans ce sens.

En conclusion, loin de stigmatiser les mariages binationaux, ce projet de loi rétablit cohérence et symétrie en appliquant les mêmes formalités aux mariages, qu'ils soient célébrés à l'étranger ou en France.

Sans mettre en cause la liberté constitutionnellement garantie de se marier, il apporte des moyens nouveaux de prévention des mariages simulés ou, à tout le moins, de paralysie de leurs effets.

Sous réserve de quelques amendements de précision et de simplification, votre commission vous invite donc à adopter ce projet de loi.

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