Intervention de Philippe Arnaud

Réunion du 14 mars 2006 à 16h00
Fonction publique territoriale — Discussion d'un projet de loi

Photo de Philippe ArnaudPhilippe Arnaud :

Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, le projet de loi relatif à la fonction publique territoriale que nous examinons aujourd'hui était attendu ; il est donc le bienvenu.

Vos propositions, messieurs les ministres, complétées et amendées par la commission des lois et son rapporteur, notre excellente collègue Jacqueline Gourault, vont indiscutablement dans le bon sens.

À défaut d'une réforme en profondeur du statut de la fonction publique territoriale, pourtant tant attendue par les élus locaux, les adaptations proposées clarifient les champs de compétences et les missions des centres de gestion et du CNFPT, simplifient les règles de promotion interne des fonctionnaires territoriaux, notamment par une meilleure prise en compte des compétences acquises par l'expérience, mettent un terme à l'absurdité de certaines formations obligatoires pour valider après un concours un changement de cadre statutaire. Tout cela est positif.

Mais, messieurs les ministres, de grâce, résistez à la tentation de créer un « machin » supplémentaire avec le Centre national de coordination des centres de gestion.

Je le sais, on ressent parfois le besoin de coordonner les coordinations et, dès que l'on confie des compétences à des entités, pourtant réputées responsables et par ailleurs encadrées, naît un sentiment d'inquiétude légitimant la création d'une nouvelle instance pour veiller au grain. La nature est ainsi faite : les institutions produisent des institutions, les administrations génèrent de nouvelles administrations. Les usines à gaz, messieurs les ministres, si complexes soient-elles, ont le mérite de fabriquer du gaz, et l'on peut s'interroger sur l'utilité des usines à brasser de l'air...

Messieurs les ministres, nous vous demandons le retrait de cette proposition, la gestion de quelques dizaines de cadres de catégorie A+ pouvant être assurée par les structures existantes.

J'en viens à un sujet qui me tient à coeur, relayant en cela les graves difficultés des élus des communes rurales quand ils sont confrontés à la suppression d'un service - donc d'un poste d'agent titulaire de la fonction publique territoriale - à la suite d'une décision prise par une autorité supracommunale, qui s'impose donc à la collectivité.

Déjà, en 1998, j'étais intervenu à cette tribune sur ce sujet, largement soutenu sur toutes les travées de notre assemblée, et j'avais obtenu du Gouvernement à l'époque l'engagement que ce problème serait réglé dans le cadre d'une réforme des statuts de la fonction publique territoriale.

La meilleure illustration de mon propos est la situation née de la fermeture d'une classe dans une petite commune, décidée - et c'est légitime - par l'autorité académique, c'est-à-dire par l'État, et qui s'impose donc, souvent douloureusement, à celle-ci.

Je dis « douloureusement », parce que, outre la désolation pour des élus de voir une classe ou une école fermer, le budget de la commune peut en être très sensiblement grevé. Dans certains cas, la contribution nouvelle auprès des centres de gestion, qui représente 150 % du salaire de l'agent qui a perdu son poste, peut en effet représenter 30 % des recettes fiscales de la collectivité.

Par ailleurs, il convient de rappeler que les communes dont l'école aura été fermée seront appelées à contribuer par la suite aux frais de fonctionnement de l'école voisine.

Les communes se trouvent donc pénalisées par une décision qui n'est pas de leur fait. Cette situation n'est pas conforme à l'esprit de la loi qui, à l'époque, avait voulu responsabiliser davantage les collectivités au regard de leurs actes.

En 1998, lors du débat que nous avions eu sur ce sujet, notre collègue Michel Charasse avait suggéré que, dans le cadre d'une réforme du statut de la fonction publique territoriale, le Gouvernement examine la possibilité, en cas d'ouverture de classe, d'autoriser les communes rurales et leurs EPCI à engager des contractuels non titularisables si le conseil municipal en délibérait ainsi. Si la classe venait à être supprimée, ces agents pourraient alors prétendre à l'allocation chômage versée par les ASSEDIC, puisque les communes ont le droit d'adhérer à ce régime. Il avait ajouté avec insistance que cette question était importante et ne devait pas être évacuée.

Vous l'aurez remarqué, messieurs les ministres, mes chers collègues, il ne s'agit que de situations particulières intéressant des postes fonctionnels dont la création ou la suppression est totalement indépendante du bon vouloir des élus locaux.

Il conviendrait donc, pour respecter un autre principe fondamental de la fonction publique territoriale qu'est la titularisation des agents et la garantie de l'emploi, que la décision de pourvoir ces postes par des agents contractuels soit dûment motivée par délibération du conseil municipal. C'est pourquoi je vous proposerai un amendement en ce sens. Je vous appelle, mes chers collègues, à saisir l'opportunité de ce projet de loi pour lui donner une suite favorable.

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