Le gouvernement Raffarin a entrepris de rattraper ce retard. En 2004, grâce à l'action de l'ancien ministre UDF de l'équipement, Gilles de Robien, et de Marc-Philippe Daubresse, ministre délégué au logement et à la ville, la construction a repris : 364 000 logements ont été réalisés.
Mais nous sommes obligés de constater que cette évolution reste insuffisante pour répondre aux besoins et que le ralentissement du rythme de production a indéniablement créé un déséquilibre entre l'offre et la demande.
Nous savons très bien que les évolutions de notre société - l'augmentation des familles monoparentales, l'arrivée des jeunes ménages, ainsi que le vieillissement de la population - engendrent une multiplication du nombre de personnes seules et provoquent une demande très forte. D'une manière générale, il existe un véritable décalage entre l'offre et la demande de logement, qui concourt à amplifier les phénomènes précédemment énumérés.
Il ne s'agit pas ici de dresser un état des lieux exhaustif des particularités de la crise du logement, il s'agit davantage de montrer que le phénomène des ventes à la découpe est un élément du dysfonctionnement du marché de l'immobilier dans son ensemble.
Certes, la France n'est pas un cas isolé. Depuis 1997, les hausses des prix du logement atteignent 60 % aux Etats-Unis, et même 140 % en Espagne et au Royaume-Uni.
Toutefois, notre situation est telle que certaines catégories de la population ont de plus en plus de difficultés pour devenir propriétaire, malgré des taux d'intérêt très bas.
Comme le révélait le groupe de travail « foncier, logement », la hausse des prix de l'immobilier pose un grave problème aux jeunes ménages.
La France compte 56 % de propriétaires. Ce n'est pas mal, mais c'est un niveau beaucoup plus faible que dans d'autres pays de l'Union européenne. Ainsi, la Grèce compte 74 % de propriétaires, l'Espagne 83 % et l'Irlande 78 %.
J'insiste sur ce point, car la vente à la découpe pose bien la question de l'accès à la propriété et il me semble que notre politique en matière de logement néglige son importance.
La vente à la découpe est une pratique ancienne qui n'a pas toujours eu les effets négatifs que nous lui prêtons aujourd'hui, car elle a notamment libéré des logements et a permis à de nombreux locataires de devenir propriétaires. Elle représente à Paris, depuis une vingtaine d'années, de 9 % à 18 % des transactions.
Depuis trois ans, les ventes à la découpe sont reparties à la hausse. Entre 2001 et 2004, elles ont augmenté de près de 50 %. Les données pour 2005 pourraient d'ailleurs révéler une poursuite de ce mouvement.
Mais si les ventes reprennent, elles ne se présentent plus tout à fait sous les mêmes aspects.
Tout d'abord, cette reprise des ventes par appartements coïncide, comme je l'ai déjà dit, avec une hausse forte des prix de l'immobilier et une crise généralisée du logement.
En outre, les organismes institutionnels, tels que les compagnies d'assurance, les banques, les mutuelles et les caisses de retraites, ont défini depuis une dizaine d'années de nouvelles stratégies patrimoniales conduisant à des arbitrages dans leur portefeuille de logements, considéré comme peu rentable, ne serait-ce qu'en raison des charges de gestion qu'il faut assumer.
Le problème est que ces transferts de propriété passent parfois par des investisseurs intermédiaires qui sont intéressés seulement par la valeur patrimoniale de l'immeuble. Ces intermédiaires tirent leurs revenus non pas des loyers mais de la plus-value entre la valeur d'achat et celle de la revente. Là réside le problème des ventes à la découpe à ce jour, car les locataires, en bout de chaîne, subissent les conséquences de ces opérations spéculatives.