Intervention de Jean-Louis Borloo

Réunion du 13 octobre 2005 à 15h00
Droit de préemption et protection des locataires en cas de vente d'un immeuble — Discussion d'une proposition de loi

Jean-Louis Borloo, ministre :

Quoi qu'il en soit, monsieur Sueur, cette avalanche de chiffres n'exonère personne. Je vous invite donc à un peu d'humilité et de pudeur, pour essayer, ensemble, de trouver des solutions équilibrées, afin d'atteindre les objectifs visés.

Premièrement, il faut faire en sorte que nos quartiers retrouvent un habitat et un environnement de qualité. C'est l'objectif du programme national de rénovation urbaine.

Deuxièmement, il s'agit de mettre en place un programme de reconquête des logements vacants dans notre pays. C'est ce qui est fait actuellement par l'ANAH, l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat.

Troisièmement, il convient de relancer la mise à disposition de foncier dans notre pays. Une décision vient d'être prise en ce sens : elle autorise l'octroi de prêts d'une durée de cinquante ans par la Caisse des dépôts et consignations, afin de permettre l'acquisition de réserves foncières au bénéfice soit des sociétés anonymes et des offices d'HLM, soit de n'importe quelle collectivité territoriale qui souhaiterait disposer de réserves foncières pour les mettre à la disposition du logement et de l'habitat.

Tels sont les actions mises en oeuvre en matière de logement social. Il faut absolument réduire l'écart constaté, qui est, je tiens à le dire, scandaleux. En effet, voilà quelques années, il était moins cher de se financer sur le marché privé, pour une acquisition privée, que sur le marché social, pour du logement social. C'était la réalité : l'écart se révélait très important, près d'un point ! Par des décisions successives sur les taux de commission, dont la dernière a été prise récemment, cet écart a été réduit, voire annulé.

Mesdames, messieurs les sénateurs, la réalité du problème, ce sont les logements d'Etat ou les logements sous tutelle d'Etat. J'ai ressorti les différents rapports publiés depuis vingt-trois ans. Or, 90 % du contenu du rapport Figeat figurait déjà dans le rapport Besson et dans celui du Conseil général des ponts et chaussées !

Sur tous ces sujets, mesdames, messieurs les sénateurs, sur lesquels nous avons récemment pris un certain nombre de mesures, vous savez bien qu'il y a une responsabilité collective, qui est tout à fait cruciale. A cet égard, j'ai obtenu un arbitrage qui permettra de proposer, dans les quartiers en rénovation urbaine, une TVA à 5, 5 % pour l'accession sociale à la propriété.

En définitive, la politique du logement s'apparente à une chaîne aux acteurs multiples. De ce point de vue, je vous encourage à vous inspirer des rapports publiés sur le sujet. Je citerai notamment le récent rapport d'information sénatorial Braye-Repentin sur les facteurs fonciers et immobiliers de la crise du logement. Dans ce domaine, nous devons tous prendre du recul et de la hauteur.

En ce qui concerne 2005, ce sera, je l'espère, une deuxième année historique en termes de production de logements, notamment de logements sociaux.

Pour la production globale de logements, il devrait y avoir près de 400 000 mises en chantier. En matière de logement social, je ne connais pas exactement le nombre final auquel nous allons parvenir, la production devrait être de 72 000 à 77 000 logements.

Par ailleurs, nous avons cessé de « faire nos fins de mois » avec le 1 %, improprement appelé, madame Borvo, « 1 % patronal ». Celui-ci est en effet géré par les partenaires sociaux, dans leur pluralité et leur diversité. Dois-je rappeler que nous avons mis un terme à cette pratique désastreuse, par laquelle l'Etat profitait de ce 1 % pour financer son budget ? Cela représentait 200 millions, 300 millions, voire 400 000 millions d'euros par an. Au final, les sommes ponctionnées sur le 1 % correspondant à peu près au montant versé par l'Etat pour l'aide à la pierre, il s'agissait d'un jeu à somme nulle.

S'agissant du problème du logement à court terme, la détente de la spéculation vient de l'augmentation de l'offre. Je suis très heureux de rappeler, il y a huit mois environ, la signature de la convention entre l'Etat et la ville de Paris, pour favoriser la construction de logements et la lutte contre l'habitat insalubre indigne. L'Etat met ainsi à la disposition de la ville de Paris 560 millions d'euros pour une telle politique du logement, ce qui est d'ailleurs normal.

Au demeurant, en matière de logement, il faut privilégier un partenariat absolu entre tous les acteurs, car personne ne gagnera à agir contre les autres. Il y a les partenaires sociaux pour le financement du logement social, l'Etat et les collecteurs du livret A. L'Etat a également, par vocation, un rôle d'impulsion. Il y a aussi, sur le terrain, les départements, les régions, les collectivités, les sociétés anonymes ainsi que les offices d'HLM et l'ensemble des opérateurs. Par conséquent, il ne sert à rien de dénoncer les actions des uns ou des autres.

Finalement, mesdames, messieurs les sénateurs, le texte, d'origine parlementaire qui vous est soumis aujourd'hui doit être appréhendé dans sa globalité. Il permet l'extension d'un accord collectif qui, lui-même, est très amélioré par rapport à l'ancien accord collectif de 1998 §et va plus loin encore, non seulement en son état actuel, mais également grâce aux amendements que vous présenteront la commission et le Gouvernement.

En résumé, il est simplement question de tarir la spéculation, qui est inacceptable. La meilleure façon de le faire, qui est le fondement même de ce texte, c'est de permettre d'acheter l'individuel au prix d'achat de l'ensemble. En effet, finalement, la spéculation, c'est le différentiel : cela revient à acheter au prix du menu et à revendre au prix de la carte. Désormais, grâce à la présente proposition de loi, il sera possible d'acheter le plat au prix du menu, ce qui tarit de fait et objectivement la spéculation.

Par ailleurs, si la proposition de M. Dominique Braye est acceptée, la nécessaire clarification au titre de la préemption sera clairement affirmée. De plus, le Gouvernement n'est pas hostile à ce que l'idée de M. Goujon en matière de droits de mutation soit reprise.

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